La mort de Jean Ferrat, le chanteur engagé
C'est un chanteur qui disparaît, mais aussi un militant indéfectible. Jean Tenenbaum pour l'état-civil, a porté l'étoile jaune à 11 ans, et perdu son père, déporté à Auschwitz. L'enfant sera alors sauvé par un militant communiste. Il ne l'oubliera jamais. "On ne guérit pas de son enfance", dira-t-il plus tard.
À la Libération, il quitte le lycée pour aider sa famille, devient aide-chimiste jusqu'en 1954, passe alors ses premières auditions dans des cabarets parisiens et prend le nom de Jean Ferrat. En 1961, c'est le succès, sa première grande scène à l'Alhambra. Il triomphe avec "Ma môme" et "Deux enfants au soleil". Mais très vite, il choisit d'interpréter des textes plus engagés.
"Je ne chante pas pour passer le temps"
"Nuit et brouillard" en 1963 ne sera pas diffusée sur les radios. Puis "Potemkine" en 1965 sera interdite d'antenne. Il composera et interprètera comme ça quelque 200 chansons, mêlant hommages à Louis Aragon, déclaration d'amour à sa région d'adoption l'Ardèche et textes politiques.
Jean Ferrat sera compagnon de route du PCF, sans jamais cependant être encarté. Rapidement, d'ailleurs, il prend ses distances avec Moscou. Dans "Camarade", il dénonce l'invasion russe de Prague en 1968 et, dans "Bilan", il fustige la déclaration de Georges Marchais sur le "bilan globalement positif" des pays de l'Est.
Plus récemment, l'homme reste engagé. Il multiplie les apparitions à la fête de l'Huma, se prononce pour la candidature de l'altermondialiste José Bové à la dernière présidentielle et apporte son soutien, pour les régionales, à la liste du Front de gauche en Ardèche.
"Je ne suis qu'un cri"
Politique, mais chanteur. Sa discographie est prolifique : "Aimer à perdre la raison", "La femme est l'avenir de l'homme", "Camarade", "Que serais-je sans toi ?"... Réticent à passer à la télévision, après ses expériences de censure, Jean Ferrat sera pourtant récompensé pour son œuvre à deux reprises, en recevant le prix de l'académie Charles Cros en 1963 et le grand prix de
la chanson de la SACEM en 1994.
Il quitte la scène pourtant en 1972, après un dernier passage au Palais des sports. Et se retire en Ardèche, sa région de cœur. Son havre de paix s'appelle Antraigues, petit village, immortalisé en 1964 pas sa chanson "la Montagne".
Disque de platine en 2009
Dès lors, il sortira peu de sa tanière. Mais chaque apparition, chaque nouvel album est un évènement médiatique et l'occasion d'un nouveau coup de gueule. Et la dernière compilation de ses succès, sortie fin octobre dernier, est disque de platine et s'est classée parmi les 10 compilations les plus vendues en 2009, preuve d'un succès rémanant. En 1985, il signait "Je ne suis qu'un cri", où il chantait "Moi, si j'ai rompu le silence, c'est pour éviter l'asphyxie"...
Cécile Quéguiner avec agences
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