Flamboyante et complice avec son public, Madonna a donné de sa personne pour sa première date parisienne du "Celebration Tour"

À 65 ans, Madonna revient sur scène à Paris dans une tournée événement, le "Celebration Tour", qui fête les 40 ans de sa carrière. La reine de la pop a délivré une performance mémorable et pleine d'énergie commencée avec 1h30 de retard.
Article rédigé par Yemcel Sadou
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 7 min
Madonna lors de l'ouverture du "Celebration Tour" à l'O2 Arena de Londres, le 14 octobre 2023. (KEVIN MAZUR / WIREIMAGE)

Toutes les générations se rencontraient dans les files d’attente pour la première date du Celebration Tour de Madonna à l’Accor Arena de Paris. 1983, 1993, 2003, 2013, 2023 : quatre décennies de pop portées par la reine du genre qui a définitivement touché toutes les générations. "Je connais ses chansons les plus connues, donc ça va être génial", confie Maëva 22 ans qui accompagne sa mère, elle, âgée de 56 ans. "J’ai grandi avec elle, c’est vraiment une icône !", ajoute sa mère. Et une icône, on est prêt à l’attendre pendant des heures. À 20h30, heure du début du concert, une voix annonce un entracte de 30 minutes. Madonna ne dérogera pas à sa légendaire réputation, et n’arrivera définitivement jamais à l’heure.

Chansons intemporelles

Après une heure et demie de retard, le gagnant de RuPaul’s Drag Race, Bob the Drag Queen ouvre le show dans la tenue Marie-Antoinette que Madonna portait lors de sa performance aux MTV Video Music Awards en 1990. Comme un meneur de revue, la drag-queen rappelle les moments phares de la légendaire carrière de Madonna en demandant : "Rappelez-vous. À quel moment êtes-vous tombé amoureux de Madonna pour la première fois ?". Le Blond Ambition Tour, son baiser avec Britney Spears en 2003, sa chorégraphie dans le clip Vogue, ou sa performance au Superbowl, tous les grands moments de la Madone sont évoqués.

Puis il est temps pour la reine de la pop de faire son entrée sur Nothing Really Matters dans un kimono noir signé Jean Paul Gauthier, une couronne en cristal sur la tête. Place ensuite aux années 1980 avec Everybody, le premier grand tube qui lancera la carrière de Madonna. Les costumes punk qui rappellent l’ère rebelle de Madonna, font référence à l’irrévérence de la star et au style qu’elle a contribué à populariser.

"Nothing Really Matters", chanté par Madonna lors du Celebration Tour
Nothing Really Matters Madonna "Nothing Really Matters", chanté par Madonna lors du Celebration Tour (Madonna / LIive Nation)

"Je suis contente que ce ne soit pas un concert lié à un nouvel album où il n’y aurait que deux chansons connues. C’est frustrant quand on aime un artiste", glisse une spectatrice. Place ensuite à Into the Groove. Les danses sont particulièrement fraîches et dynamiques grâce aux apports des Français La Horde et Nicolas Huchard. Madonna réussit le pari de moderniser des titres qu’on pourrait prendre pour vieillissants.

Connexion avec le public

Les meilleurs moments du concert sont ceux où Madonna s’adresse directement au public. Elle n’hésite pas à prendre le temps de le remercier et de raconter des anecdotes personnelles sur sa vie et son parcours au plus grand bonheur du public qui en redemande. Ce côté rock & roll, imprévisible, est ce que l'on attend de la reine de la pop qui aime bousculer ses fans. "Je veux vous accueillir dans l’histoire de ma vie", lance Madonna en français. "Je ne parle pas bien français", ajoute-t-elle avec son accent américain, rappelant que ses enfants eux, le parlent très bien.

Madonna lors de l'ouverture du "Celebration Tour" à l'O2 Arena de Londres, le 15 octobre 2023. (KEVIN MAZUR / WIREIMAGE)

Cette tournée anniversaire, Madonna la dédie à ceux qui lui ont permis de devenir une superstar. "La plupart des artistes avec qui j’ai commencé à New York ne sont plus parmi nous, comme les musiciens et les créateurs de mode. Je fais partie des chanceuses, je le reconnais et j’ai de la gratitude chaque jour. Je veux célébrer ça avec vous ce soir", dit-elle au micro, une bière à la main, avant d’entamer Burning Up en version rock qu’elle performera pour la première fois au club CBGB.

Madonna lors de l'ouverture du "Celebration Tour" à l'O2 Arena de Londres, le 15 octobre 2023. (KEVIN MAZUR / WIREIMAGE)

"Tout ce que je veux faire, c’est vous impressionner, être parfaite. Je donne encore de l’importance à ce que les gens pensent !", ajoute-t-elle. Le voyage dans la vie de Madonna et sa troupe d’amis artistes, rockeurs, danseurs et rebelles, nous plonge dans une ère de liberté et de légèreté. Madonna reconstitue des moments de sa vie sur scène. Elle fait semblant de monter les marches du Paradise Garage, le club où le DJ Larry Levan y a délivré des performances mémorables. Sous une boule à facettes, on retrouve l’ambiance de la fête teintée des inoubliables notes de Holiday.

La fête prend fin lorsque Madonna rend hommage aux artistes disparus à cause du sida. Leurs portraits s’affichent alors que Madonna entame Live to Tell suspendue dans les airs. On voit défiler Freddie Mercury, le chanteur disco Sylvester, Robert Mapplethorpe, le peintre Keith Haring, ou le physionomiste des légendaires clubs Danceteria et Studio 54 Haoui Montaug, et de nombreux autres qui sont chers au cœur de la Madone.

Concert dédié aux enfants de Madonna

Comment Madonna peut-elle se retrouver sur scène après avoir frôlé la mort ? Elle prend le temps de l’expliquer à son public dans un moment inoubliable. "J’ai attrapé une maladie rare. Je me suis retrouvée mourante dans un hôpital. Je ne respirais plus par moi-même", confie Madonna émue en chapeau de cow-boy et santiags stylisées. "Quand je me suis réveillée, tous mes enfants étaient à mon chevet. J’ai compris que ce serait mes enfants qui me sauveraient". Madonna ajoute ne pas avoir su si elle serait en état physique d’assurer cette tournée, se surnommant Wonder Woman. "Mes managers sont revenus vers moi pour me demander : veux-tu que la tournée ait lieu ? J’étais intubée avec de l’oxygène dans mon nez. Je ne pouvais même pas me diriger vers la salle de bains seule", dit-elle en trouvant difficilement les mots.

Madonna et sa fille Mercy James se produisent lors de la soirée d'ouverture du "Celebration Tour" à l'O2 Arena, le 14 octobre 2023 à Londres. (KEVIN MAZUR / WIREIMAGE)

Un exploit donc, de retrouver Madonna sur pieds, délivrant une performance en live, dont une excellente et appropriée reprise a cappella du titre I Will Survive de Gloria Gaynor. "Je me suis dit, si je ne le fais pas maintenant, ce moment n’arrivera jamais. Mes enfants m’ont sauvé parce qu’ils m’ont poussé à tenir le coup. Merci beaucoup mes enfants pour la vie", complète Madonna avec ces quelques mots de français. Ces enfants l’accompagnent d’ailleurs sur scène dans de nombreux moments du spectacle.

Le dur choix des chansons

Même s’il s’agit d’une tournée avec ses plus grands tubes, Madonna ne peut pas tous les chanter. C’est peut-être le seul point négatif du concert, l’absence de certains titres phares qui auraient pu en remplacer d’autres. On aurait aimé écouter Madonna chanter Like a Virgin, Express Yourself, Papa Don’t Preach, Borderline ou Music à la place de Crazy for You, The Beast Within, Die Another Day, Don’t Tell Me ou Mother and Father. Pour la frustration, Madonna répond déjà. "Ce sont juste des pages de mon livre. Il y a trop de pages, je ne peux pas tout vous raconter. Revenez pour la partie deux."

Madonna lors de l'ouverture du "Celebration Tour" à l'O2 Arena de Londres, le 15 octobre 2023. (KEVIN MAZUR / WIREIMAGE)

Lorsqu'on voit les intermèdes qui rendent hommage à sa carrière et que l'on écoute les différents titres se succéder, on se rend compte de l'étendue du talent de Madonna. Une reine de la pop qui prouve de nouveau qu’elle n’a pas volé son titre. La scène se transforme en un temple païen serti de croix lumineuses pour Like a Prayer. Les danseurs se balancent sensuellement, les visages cagoulés de dentelle. Un titre fort avec le blasphème en toile de fond, porté par une mise en scène dynamique avec un plateau tournant impressionnant.

Madonna avec ses deux filles Estere et Lourdes Leon se produisent lors de la soirée d'ouverture du "Celebration Tour" à l'O2 Arena, le 14 octobre 2023 à Londres. (KEVIN MAZUR / WIREIMAGE)

Le tableau le plus réussi reste celui de la chanson Vogue. La mise en scène, mal comprise par de nombreux médias, rend hommage à une communauté que Madonna adore : la communauté ballroom. Pour préparer ce tableau, Madonna s’est entourée de figures du milieu, afin de coller le plus à l'ambiance impertinente de la communauté ballroom. On retrouve cette irrévérnce à travers les nombreuses références aux bals, ces compétitions où les danseurs de voguing s’affrontent. Madonna brandit les panneaux "10" pour saluer le talent des performeurs qui défilent devant elle.

Ode à la différence et à la communauté queer, les costumes cassent les codes. Les garçons en talons et en jupe, de la fourrure, des strass, l’exubérance fait foi dans la ballroom et Madonna leur rend un flamboyant hommage. Estere, la fille de Madonna, enflamme d’ailleurs la scène dans une performance de voguing impressionnante pour son jeune âge. "Telle mère, telle fille", lance Bob the Drag Queen. Madonna enflammera l'Accor Arena pour trois autres dates les 13, 19 et 20 novembre.

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