Au conservatoire de Poitiers redécouvrez Moondog, le clochard devenu un immense musicien
Les clichés sont saisissants, un homme à la barbe hirsute, coiffé d'un casque viking, ses yeux aveugles l'isole un peu plus du grouillement de la rue new yorkaise. Moondog, de son vrai nom Louis Thomas Hardin, a fait carrière au coin de la 53e rue et de la 6e avenue, dans la rue de Manhattan. Il y joue ses compositions sur des instruments qu'il invente, chante les airs de ses symphonies, déclame ses poèmes. Nous sommes au début des années cinquante et ce clochard céleste attire l'attention de Charlie Parker ou de Toscanini. Moondog aura composé une centaine de symphonies, inclassables, synthéses des courants du jazz et des musiques classiques et anciennes.
Le conservatoire de Poitiers lui consacre une exposition de photos et propose le 8 février un concert de ses oeuvres par l'ensemble "Minisym".
Reportage France 3 Poitou-Charentes F. Gibert / T. Chapuzot / S. Bourin / C. Pougeas
Des partitions en braille
Rendu aveugle à l'âge de 16 ans par l'explosion d'une cartouche de dynamite, Moondog apprend à jouer de la musique à l'école des malvoyants. Il écrira sa musique en braille et l'on doit à la fille de la famille allemande qui l'a recueilli à la fin de sa vie d'avoir remis en notes ses partitions menacées d'oubli.
Pendant trente ans, l'erratique carrière de ce clochard céleste proche des poètes de la "beat generation" sera faite de rencontres. Les jazzmen noirs, Charlie Parker notamment, mais aussi Janis Joplin qui, en 1967, reprend à son compte "All is loneliness". En 1969, grâce aux jeunes musiciens de l'avant-garde de l'époque, Philipp Glass et Steve Reich, il peut enregistrer chez CBS plusieurs de ses oeuvres avec un orchestre symphonique. En témoignent ses deux premiers disques sobrement intitulés "Moondog" et "Moondog 2". Mais son aura ne dépassera jamais le cercle étroit des spécialistes.
C'est un compositeur qui avait des influences venues du jazz, mais il a rencontré aussi des compositeurs plus classiques comme Léonard Bernstein, il était inspiré par des musiques anciennes, comme celle de Bach, mais aussi par d'autres, bien antérieures.
Eric Valdenaire
Et puis, il a fait le lien entre le jazz, les musiques classiques et les musiques anciennes,
Pour un conservatoire comme le nôtre, c'est passionnant, parce qu'il n'est pas évident de trouver des compositeurs qui réunissent ainsi toutes les familles.
Directeur du conservatoire de Poitiers
"Regard sur Moondog", exposition photographique au conservatoire de Poitiers, jusqu'au 8 février
"Moondog", l'ensemble Minisys déchiffre des pièces inédites du compositeur Moondog, le 8 février à l'auditorium Saint-Germain de Poitiers
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.