L'orchestre Zohra de Kaboul : musiciennes au péril de leur vie
Pour une femme afghane, faire de la musique relève d'une volonté et d'un courage que l'on a peine à imaginer. Les jeunes filles qui composent l'orchestre Zohra à Kaboul vivent leur passion sous la menace permanente des talibans et des afghans les plus conservateurs. Alors, jouer ensemble, c'est envoyer un message à la société afghane :Ma famille a dû affronter tellement de problèmes ! Les talibans les ont menacés encore et encore en disant : retirez votre fille de l'école de musique ou nous vous tuerons".
Comme mes parents m'ont autorisée à m'instruire, les autres parents doivent aussi autoriser leurs filles à s'émanciper. Les gens qui ne veulent pas, il faut leur expliquer pour qu'ils comprennent.
Une musicienne de Zohra
Reportage : N.Bertrand, T.Donzel, L.Ricard
Negin Khpolwak cheffe d'orchestre : "Les gens en dehors de notre pays pensent que nous restons simplement assises à la maison et que les femmes d'Afghanistan ne sortent pas de chez elles. Mais non ! Nous voulons montrer aux gens que nous travaillons beaucoup, que nous voulons la paix et donner le meilleur".
Toutes les musiciennes de Zohra vivent dans un orphelinat au coeur de Kaboul. la moitié sont des orphelines les autres ont des parents trop pauvres pour pouvoir s'occuper d'elles. Une jeune musicienne dit la chance qu'elle a d'être ici : "Chez moi, aucune fille n'a accès aux études et les filles sont mariées bien avant de devenir adultes. Ma famille était contre ça. Bien sûr elle me manque mais je suis là pour les études. Je dois tenir le coup".
Un lieu d'émancipation
Dans un pays où la condition de la femme est une des pires de la planète, être dans un tel établissement apparaît à certains égards comme une chance. L'orphelinat est dirigé par Pashtana Rassoul une ancienne pensionnaire. Son père, instituteur, a été exécuté par les talibans alors qu'elle était enfant : "Les femmes qui restent à la maison n'ont pas le droit d'ouvrir la bouche devant leur père ou leur frère. Ici, elles apprennent comment se comporter, être indépendantes et être fortes. elles vont obtenir un diplôme plus tard et devenir des professeurs, des docteurs."
L'angoisse du kidnaping et de l'acide
Après le petit déjeuner, les pensionnaires prennent le chemin de l'école sous la protection armée de six gardes. Quinze minutes de marche qui ailleurs serait banale, mais qui à Kaboul est synonyme de grand danger. Pashtana Rassoul le rappelle à chaque sortie : "Noubliez pas de surveiller à chaque instant tout ce qui se passe autour de vous". Le parcours n'est pas long mais les jeunes filles en connaissent les risques " Il se peut que nous soyons kidnapées, et tout ce qui arrive en Afghanistan : les attaques à l'acide et les attentats suicides".
La réputation de Zohra a franchi les frontières. L'orchestre se rend parfois à l'étranger comme à New Dehli en Inde. Les 30 musiciennes donnent hors des frontières l'image d'un autre Afghanistan, loin de la haine, du terrorisme et du rigorisme religieux.
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