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La samba revient à Rio en s'adaptant aux mesures sanitaires dues au coronavirus

Après plus de sept mois de restrictions sanitaires en raison de la pandémie, la samba reprend ses droits à RIo de Janeiro en s'adaptant aux gestes barrière.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 3 min
Les musiciens de Samba doTrabalhador en concert au Renascenca club du quartier d'Andarai dans la banlieue de Rio de Janeiro, le 26 octobre 2020, dans le respect des mesures sanitaires due à la pandémie de coronavirus. (MAURO PIMENTEL / AFP)

Un rythme endiablé, des musiciens qui jouent autour des tables, entourés d'une foule qui s'étreint et boit de la bière : l'une des grandes traditions de Rio de Janeiro, la samba, vient d'y faire son retour, mais avec des aménagements. Car ceux qui ont voulu, en ces temps d'épidémie de coronavirus, maintenir bien vivante la samba ont dû s'adapter pour retrouver leur public et des revenus.

"La samba ne peut pas mourir"

"On ne joue plus autour de tables de bar, mais sur une scène devant un public", explique à l'AFP Moacyr Luz, 62 ans, qui a fondé il y a 15 ans la Samba do Trabalhador (samba du travailleur), une fête qui peut rassembler jusqu'à 1 500 personnes le lundi après-midi.

Pour ce compositeur, l'un des plus reconnus du Brésil pour ce style musical et dont le dernier disque a été nominé aux Grammy Latino-2020, jouer de la samba sans la foule c'est, comme au foot, marquer un but et ne pas pouvoir exulter. "On perd un peu en naturel, mais la samba ne peut pas mourir. On vit une mutation", dit Luz, un homme à la crinière blanche et à la barbe grisonnante.

Après plus de sept mois sans avoir joué devant un public mais seulement occasionnellement sur internet, le groupe a repris ce mois-ci ses concerts dans un club, le bien nommé "Renascença" (Renaissance). C'est dans cette petite institution de la zone Nord de Rio que les musiciens font résonner avec talent les instruments typiques de la samba, comme le pandeiro (une sorte de tambourin) ou le cavaquinho (petite guitare de la taille d'un violon).

Gestes barrière

Mais quand, avant l'arrivée du coronavirus, une foule déchaînée dansait, aujourd'hui ce sont des petits groupes d'amateurs qui sont assis à des tables de plastique. Ils ont réservé sur internet les 300 places autorisées, qui se sont arrachées comme des petits pains.

A l'entrée du club, la prise de température est obligatoire, et l'on ne peut circuler entre les tables sans porter de masque. "Avant les gens s'agglutinaient autour des musiciens", se souvient Dalia Melo, 42 ans, venue avec son mari. "Avec cette nouvelle formule, on a perdu le contact physique, la chaleur des rondes de samba. Avant, on était si près qu'on se sentait faire partie du groupe". "Mais l'important c'est que la samba est revenue", dit-elle.

Bon pour le moral

Ce n'est qu'en juin que la ville de Rio a autorisé une reprise graduelle de l'activité. Mais les concerts de musique ont été les derniers à reprendre, à la condition que le public soit réduit de 50%, et sans piste de danse.

Cela n'empêche pas les amateurs de chanter à plein poumons les paroles de Moacyr Luz, tout en consommant boissons et croquettes de morue ou autre amuse-bouches. "La samba fait partie de la culture brésilienne. Ca renvoie à tant de bonnes choses : l'union du peuple, la préservation d'une tradition. Et ça apporte une joie incommensurable", explique Cristina Barreto, autre cliente assidue de la Samba do Trabalhador. "Être ici c'est (bon pour la) santé mentale, cela nourrit notre âme, pour que nous puissions affronter tout ça avec sécurité", dit-elle en référence à l'épidémie de covid-19. 

L'Etat de Rio de Janeiro, qui compte environ 17 millions d'habitants, a enregistré plus de 20 000 morts, sur les plus de 158 000 que déplore le Brésil depuis mars. Dans la capitale de l'Etat, même si la courbe baisse, 37 patients sont morts en moyenne chaque jour ces deux dernières semaines.

"J'ai appris à perdre"

Pour Moacyr Luz, la pandémie a été synonyme de pertes, surtout après la mort du compositeur Aldir Blanc, fauché par le covid-19 en mai, à 73 ans. "J'ai appris à perdre : nous avons perdu notre grand public, les tournées, j'ai perdu le principal partenaire de ma carrière, avec lequel j'ai composé plus de 100 chansons", se désole Luz. "Mon plus grand désir est de pouvoir ouvrir les bras aux autres, ne plus avoir peur de montrer de l'affection", dit-il, en référence à la nécessaire distanciation physique.

Mais la pandémie n'a pas tué sa créativité. Au contraire, elle lui a permis d'écrire une trentaine de chansons ces derniers mois. "Toute cette confusion, je sais que ça va passer", prédit l'une d'elle.

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