Le pianiste João Donato, maître du groove brésilien, en concert rarissime à Paris
À 85 ans, il a connu les débuts de la bossa nova et a travaillé avec toutes les générations de musiciens brésiliens qui ont suivi. Sa tournée européenne s'achève à Paris mercredi, avec à ses côtés des membres du formidable collectif Bixiga 70.
De mémoire de brésilophile, son dernier passage en France remonte à avril 2015 à Montreuil, en clôture du festival Banlieues Bleues. Auparavant, il n'avait quasiment jamais joué du côté de Paris. La venue de João Donato au New Morning constitue donc un événement. Le musicien carioca, qui a suspendu ses engagements hors de Rio durant l'été sur ordre de son cardiologue, répond présent en Europe pour quatre dates automnales à Lisbonne, Londres, Berlin et enfin Paris, au New Morning, mercredi 20 novembre.
Nouvelles compositions, nouveau groupe
Casquette vissée sur la tête, souvent vêtu d'une chemise imprimée, João Donato présente sur scène son dernier album en date, Donato Elétrico, sorti au Brésil en 2016. Ce disque rassemble dix nouvelles compositions d'un pianiste peu enclin à se reposer sur ses lauriers. Nouveau programme, mais aussi nouvelle génération de musiciens à ses côtés sur ce projet, en l'occurrence quatre membres du formidable collectif Bixiga 70. Ce groupe de São Paulo, bouillonnant cocktail d'afrobeat et de funk, transforme chacun de ses concerts en happening musical au groove irrésistible, mais aussi en tribune de résistance face à l'extrême droite au pouvoir au Brésil.
Entre João Donato et les membres de Bixiga 70, le courant ne pouvait que passer, le pianiste ayant depuis des décennies fusionné sous ses doigts le jazz, la samba, les sons latinos et afro-cubains et autres influences funk.
Initiée par le producteur Ronaldo Evangelista (aux manettes de Donato Elétrico), la première rencontre entre le pianiste et le collectif pauliste a été très fructueuse. Un concert a été organisé à São Paulo pour célébrer le 40e anniversaire de l'album Quem é Quem de Donato. Tout le monde s'est retrouvé peu après en studio pour enregistrer un nouveau disque. Le pianiste y a retrouvé le son de ses années analogiques, jouant sur des claviers vintage comme le Fender Rhodes et le Clavinet. En 2016, l'album Donato Elétrico a reçu une nomination aux Latin Grammy Awards au titre de meilleur album de musique instrumentale.
Un roi de la fusion musicale
Né le 17 août 1934 à Rio Branco, dans le nord-ouest du Brésil, João Donato de Oliveira Neto a démarré sa carrière à 15 ans comme accordéoniste avant de se consacrer au piano. Au milieu des années 60, le jeune homme, qui a vécu les débuts de la bossa nova à Rio de Janeiro, jouait aux côtés de Tom Jobim, cofondateur de ce mouvement musical, sur les plateaux de télévision américains. Très tôt, Donato a connu le succès avec des thèmes comme Muito à Vontage (1962), avant de graver un futur classique, Amazonas, en ouverture de l'album The New Sound of Brazil (1965) réalisé aux États-Unis avec le légendaire arrangeur Claus Ogermann.
Dans les années 70, João Donato va faire sensation en fusionnant jazz, samba, soul et funk dans un groove psychédélique, avec plusieurs disques marquants comme l'album de fusion A Bad Donato (1970) et Quem é Quem (1973) avant une pause discographique de quelques années. À cette époque ont émergé de grands classiques comme le très funk The Frog ("la grenouille") en 1970, retitré plus tard en portugais A Rã et revisité dans une version chantée sans paroles en 1973, ou encore Chorou, Chorou (1973). Plus de quarante ans plus tard, João Donato groove toujours et peut se targuer d'avoir travaillé, au cours de sa longue carrière, avec d'illustres artistes du Brésil : Tom Jobim, João Gilberto, Marcos Valle, Eumir Deodato, Caetano Veloso, Sergio Mendes, Carlos Lyra, Roberto Menescal, les chanteuses Gal Costa, Joyce, Paula Morelenbaum... En jazz, il a collaboré durant ses années américaines avec Nelson Riddle, Chet Baker ou encore Herbie Mann.João Donato en concert à Paris
Mercredi 20 novembre 2019 au New Morning, 21H
Avec quatre membres du group Bixiga 70 : Maurício Fleury (guitare), Douglas Antunes (trombone), Marcelo Dworecki (basse), Décio Silva (batterie).
Lancez la conversation
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour commenter.