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Mohammad Assaf triomphe à "Arab Idol", la Palestine en liesse

Les Palestiniens ont fêté dans la nuit de samedi à dimanche la victoire de Mohammad Assaf dans le télé-crochet "Arab Idol", Nouvelle Star du monde arabe, dont la finale avait lieu à Beyrouth. Le jeune chanteur de Gaza est devenu ces derniers mois l’idole de tout un peuple, suspendu aux résultats du concours télévisé
Article rédigé par franceinfo - Valérie Oddos (avec AFP)
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Publié Mis à jour
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Mohammad Assaf, vainqueur du concours "Arab Idol"

C'est la première fois qu'un Palestinien s'illustre aussi brillamment dans ce genre de manifestation artistique. "Arab Idol" a suscité depuis des semaines un engouement sans précédent  dans les Territoires palestiniens.
 
Les célébrations ont éclaté spontanément dans la bande de Gaza et en Cisjordanie dès l'annonce des résultats de cette compétition panarabe à Beyrouth, où était produit le show.
 
A Jérusalem-Est, le secteur à majorité arabe occupé et annexé, les coups de klaxons ont continué à retentir tard dans la nuit autour des remparts de la  Vieille ville. A la porte de Damas, une des entrées de la Vieille ville, des heurts ont éclaté entre des jeunes Palestiniens et la police israélienne qui a procédé à des arrestations, coupant court à la fête, selon une journaliste de l'AFP et la police.

 
Pétards dans les rues à Gaza

A Gaza, d'où est originaire Mohammad Assaf, des dizaines de milliers de badauds ont aussitôt rempli les rues et les promenades du front de mer, au milieu des explosions de pétards.
 
Dans la soirée, toutes les places étaient réservées dans les hôtels, les  restaurants et les cafés de la bande de Gaza pour suivre la retransmission en direct du dernier programme d'"Arab Idol". Selon Salah Abou Hassira, directeur de l'office des restaurants et hôtels de la bande de Gaza, "il s'agit d'un grand événement national" palestinien.
 
"Félicitations à Assaf  qui a relevé la tête de Gaza et de la Palestine", se réjouit Diana Chams, 14 ans, qui a suivi le programme dans un restaurant du  front de mer de la bande de Gaza.
 
Les policers du Hamas en joie
"Le monde doit savoir que nous sommes pour la paix et que nous aimons la vie, comme tout le monde, pas la guerre et la mort", commente Imad al-Sawirki, venu en famille sur la terrasse d'un hôtel réputé. Son épouse Amani "remercie Assaf qui a uni notre peuple derrière lui".
 
Même les policiers du Hamas, qui tentent de réguler la circulation aux  principaux carrefours se laissent gagner par la liesse ambiante. "Nous sommes tous les enfants d'un même pays", souligne l'un d'eux sous  couvert de l'anonymat. "Voter pour Assaf  est une sorte de bataille remportée par notre peuple  (...), il y a beaucoup de formes de résistance", estime-t-il, alors que le jury  a surnommé le candidat palestinien "la roquette". Dans un premier temps, le Hamas ne voyait pas d’un très bon œil le jeune chanteur, qui chante des chansons nationalistes et aussi des chansons d’amour aux accents peu islamiques, mais le parti au pouvoir à Gaza a dû taire ses critiques face au succès populaire.
 
Ramallah en liesse
Des portraits géants du chanteur gazaoui à la tête d’ange qui fait chavirer le cœur de toutes les jeunes Palestiniennes étaient affichés sur les façades d'immeubles de Gaza et de Cisjordanie.
 
Sa victoire était aussi fêtée dans toute la Cisjordanie. Sur une des principales places de Ramallah, en Cisjordanie, où des milliers de personnes fêtent bruyamment la victoire de Mohammad Assaf, Naama Ibrahim, qui vit avec son mari et ses quatre enfants aux Etats-Unis, confie n'avoir  "jamais éprouvé une telle joie".
 
"C'est comme une manifestation spontanée dans tout le pays, c'est un tableau de l'unité qu'a dessiné l'artiste Mohammad Assaf ", se félicite-t-elle.
 
Mohammad Assaf a conquis le jury
Doté d’une voix exceptionnelle, Mohammad Assaf, 23 ans, qui a grandi dans le camp de réfugiés de Khan Younes, avait séduit le public et le jury depuis le début du concours. Il les a encore enthousiasmés lors de la finale vendredi soir, en interprétant une célèbre chanson nationaliste, "Alli al-kouffiya" (Brandis le keffieh, le foulard traditionnel).

Quand il a été proclamé vainqueur, il a remercié le peuple palestinien. Dans des images diffusées sur le site du Guardian, il proclame que "la révolution, ce n'est pas seulement celle de celui qui porte un fusil, elle se fait aussi avec le pinceau de l'artiste, le scalpel du chirurgien (...). Aujourd'hui, je représente la Palestine et je me bats pour une cause avec mon art."
 
Ces derniers mois, les Palestiniens ont retrouvé une source de fierté en suivant ses succès chaque vendredi et samedi, jours de diffusion par la chaîne de télévision panarabe MBC à Beyrouth de l'émission, déclinaison d'un programme  occidental. Ils se sont massivement mobilisés sur les réseaux sociaux pour faire voter en faveur de leur candidat.
 
Le soutien a gagné les hautes sphères puisque le président Mahmoud Abbas a encouragé en personne Mohammad Assaf. Son ministre des Affaires religieuses Mahmoud al-Habbache a même désavoué le mufti de Naplouse qui estimait contraire à l'islam de regarder "Arab Idol" ou de voter pour les candidats.
 
La direction du Hamas se rallie
La direction du Hamas elle-même a fini par se rallier à l'engouement  populaire. Un député du mouvement à Gaza, Yehia Moussa, a salué "une étoile palestinienne prometteuse, Mohammad Assaf ", sur sa page Facebook, affirmant qu'il "représente la Palestine et son peuple endurant. Il est l'ambassadeur d'une juste cause".
 
Dans un communiqué, l'agence de l'ONU pour les réfugiés palestiniens  (UNWRA) a annoncé qu'elle avait nommé Mohammad Assaf comme son premier ambassadeur de la jeunesse dans la région, qualifiant sa victoire de  "fantastique".
 
Côté israélien, le porte-parole en arabe de l'armée, Avichaï Adraee, a  félicité le jeune Palestinien de Gaza sur son compte Twitter.
 
Le blocus imposé par Israël à la bande de Gaza a contribué à rendre mythique l’histoire de Mohammad Assaf, puisque le jeune homme a failli ne pas participer à "Arab Idol" : il n’était pas arrivé à temps à la première étape du concours, n’ayant pas pu franchir à temps la frontière égyptienne à Rafah pour rejoindre le Liban. Il a finalement pu concourir grâce au désistement d’un autre Palestinien.

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