Musique : serpentwithfeet, morsures vocales

Josiah Wise a appris à dompter sa voix à l'école du gospel, et cela s'entend. Enfant à Baltimore, adulte à Brooklyn, il y est devenu un artiste sous le nom de serpentwithfeet. L'art de ce premier album justement : cultiver le mystère tout en se mettant à nu. "Moi, si j’ai un don c’est bien celui d’aller au plus profond de moi, dit-il. Ce qui m’intéresse c’est d’enlever des couches successives et sur cet album, Soil, je voulais aller encore plus loin".

Sa voix rappelle les plus belles heures du r'n'b, ses expérimentations sonores un certain Frank Ocean, son physique, énorme anneau dans le nez et front tatoué, ne peut qu'impressionner. Sa musique, elle, est pleine d'improvisations, le voir sur scène est une expérience étonnante, entre humour noir et sensibilité infinie. Lui affirme que ce personnage, c'est toujours lui : "Je ne crois pas m’être jamais réinventé, et cela ne m’arrivera jamais. C’est comme un arbre qui grandit : il ne devient pas moins séquoia ou peuplier, simplement il devient plus grand. Moi je suis juste plus vieux, avec diverses expériences derrière moi".

Selon moi c’est une preuve d’amour de laisser respirer ce que vous aimez, alors je dois laisser mes chansons respirer

serpentwithfeet

Dans ses textes, serpentwithfeet aborde notamment ses peines de coeur, sa sexualité, son ex-petit ami, lui qui n'hésite pas à interroger frontalement certains tabous, comme celui, dit-il, de l'homosexualité dans les clichés afro-américains. Même s'il insiste : "Je crois que c’est toujours dangereux de faire des choses pour essayer d’aider les gens. Moi, je fais des choses car je suis un créateur, point".

Icône de l'underground new-yorkais pour l'instant, serpentwithfeet est sur le point, avec ce premier album passionnant, de s'offrir une audience bien plus large.

serpentwithfeet, soil (Secretly Canadian). Album disponible le 8 juin.