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"Brokeback Mountain" adapté à l'Opéra de Madrid

Les amours tragiques de Ennis et Jack, les deux cowboys de "Brokeback Mountain", débarquent à l'opéra. Ce drame, déjà porté à l'écran en 2005 par Ang Lee, a été adapté pour l'Opéra de Madrid par le compositeur américain Charles Wuorinen. La première mondiale a lieu le 28 janvier.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Daniel Okulitch (Ennis) et Tom Randle (Jack) interprètent l'opéra "Brokeback Mountain" au Teatro Real de Madrid
 (Teatro Real)
"Une histoire tragique, typique à l'opéra"
Auteur de plus de 260 compositions pour orchestres, choeurs, claviers, percussions, ainsi que des musiques électroniques et des ballets, le New-Yorkais Charles Wuorinen, âgé de 75 ans, a travaillé en étroite collaboration avec Annie Proulx, l'auteur de la nouvelle "Brokeback  Mountain" publiée en 1997 dans l'hebdomadaire américain The New Yorker.
La nouvelle d'Annie Proulx retrace l'histoire d'amour tourmentée de deux jeunes cow-boys américains, Jack et Ennis, qui se rencontrent en 1963 dans une région montagneuse, splendide mais hostile, du Wyoming. Pendant vingt ans, construisant chacun une famille sur un mensonge, les deux hommes s'aimeront en se cachant.  "Le secret de Brokeback Mountain", le film qu'en a tiré Ang Lee en 2005, a été récompensé de trois Oscars.
"C'est une histoire impossible, tragique, typique à l'opéra: deux personnes qui veulent une relation interdite dans leur société, l'un d'eux étant en outre  incapable de s'accepter tel qu'il est", explique Charles Wuorinen, venu à Madrid pour assister aux répétitions.  "La tragédie au coeur de cette pièce est qu'Ennis ne devient capable de s'exprimer et de s'accepter qu'une fois que Jack est mort, quand il est trop tard: il a tout perdu", souligne-t-il.
Charles Wuorinen rejette tout sentimentalisme
Sur scène lors de la répétition générale samedi, l'inquiétude transmise par la projection d'un paysage baigné d'une lumière crépusculaire alliée à la terreur d'Ennis d'être découvert était soulignée par la musique de Charles Wuorinen, menaçante parfois comme un grondement ou explosant dans des sons frénétiques.
 
Amateur de dissonances, le compositeur rejette les émotions faciles : "La musique, le texte, la mise en scène ; tout cela est anti-sentimental. Il n'y a simplement pas de place pour le sentimentalisme, c'est une façon trop commode et trop malhonnête d'obtenir une réaction du public", dit-il.
"Un grand amour reste un grand amour, même si les conventions sociales y sont opposées", remarque de son côté le Belge Gérard Mortier, directeur artistique du Teatro Real, qui a commandé en 2008 cette adaptation au compositeur et à Annie Proulx. "C'est pour cela que j'ai programmé sa première mondiale juste après les représentations de 'Tristan et Isolde'. Tristan, Isolde, Jack, Ennis : aucun d'entre eux ne comprend ce qui lui arrive mais tous sont préparés à mourir pour l'amour qu'ils ressentent", observe-t-il.

Des scènes explicites mais pas de militantisme gay
Conçu en deux actes durant deux heures, le livret de "Brokeback Mountain" est fait de dialogues en anglais au langage simple, ponctués de jurons. Sur scène, les deux hommes s'embrassent, s'enlacent et apparaîssent en sous-vêtements dans un lit dans des situations plus explicites que celles du film d'Ang Lee.

Charles Wuorinen se défend d'avoir voulu créer une oeuvre militante en faveur des droits des homosexuels. "Il ne s'agit pas de parler d'un amour gay. Il s'agit d'une relation, qui, dans ce cas, s'exprime à travers la passion entre deux hommes", dit-il.

Le compositeur se moque de choquer les oreilles les plus orthodoxes, "qui voient l'opéra comme une forme artistique où tout vient du 19e siècle, avec des femmes enrobées qui crient sur scène". "Ce n'est pas mon problème, c'est le leur."
 
"Brokeback Mountain"
de Charles Wuorinen
Teatro Real de Madrid
Du 28 janvier au 11 février 2014

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