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"Je m'accroche en attendant un miracle" : confronté à une saison entière sans spectateurs, le monde du spectacle se débat aux Etats-Unis

Officiellement, la plupart des grands orchestres et opéras américains ont laissé la porte ouverte à un retour des spectateurs en janvier. Mais dans les faits, beaucoup, comme l'opéra de Seattle, ont déjà budgété une saison entière sans public. 

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
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Le Metropolitan Opera de New York en 2018.  (ANGELA WEISS / AFP)

Broadway, le Metropolitan Opera ou le philharmonique de New York dans le noir jusqu'en juin 2021 : le monde du spectacle américain se résigne à l'idée d'une saison entière sans spectateurs, se creusant les méninges pour montrer ses talents au public et rester à flot financièrement. "J'ai toujours l'espoir, mais je pense que c'est très improbable que nous fassions quoi que ce soit devant un public avant un moment", pour cause de pandémie, reconnaît Matias Tarnopolsky, PDG du Philadelphia Orchestra.

Officiellement, la plupart des grands orchestres et opéras américains ont laissé la porte ouverte à un retour des spectateurs en janvier, à l'exception du Metropolitan Opera et du philharmonique de New York, qui ont annulé toute la saison 2020-21. Mais dans les faits, beaucoup, comme l'opéra de Seattle, ont déjà budgété une saison entière sans public, dans un pays qui, depuis des mois, reste autour de plus de 40 000 nouveaux cas de coronavirus par jour.

Un casse-tête financier

D'un coup, ce sont 6 millions de dollars de recettes qui s'envolent pour Seattle, 20 millions pour le "Phil" de New York et plus de 25 pour le Philadelphia Orchestra. Chômage technique, licenciements, les orchestres taillent dans le vif et nombreux sont ceux, comme le philharmonique de New York, qui renégocient avec leurs musiciens une convention collective plus adaptée aux contraintes financières du moment. Certains orchestres situés dans des Etats aux protocoles sanitaires moins stricts, dans le sud notamment, ainsi que de plus petits ensembles, accueillent, eux, des spectateurs, mais en nombre très restreint, ce qui ampute aussi sensiblement leurs recettes.

En temps ordinaire, les ventes de billets ne sont déjà pas, loin s'en faut, la première source de revenus des grands orchestres classiques et opéras américains qui, ne bénéficiant souvent d'aucune subvention publique et n'ayant reçu aucun soutien du Congrès, comptent avant tout sur les dons et le mécénat. "Si la collecte de fonds se passe correctement, on devrait pouvoir tenir jusqu'à l'été", explique Kristina Murti, directrice marketing et communication de l'opéra de Seattle. "Mais notre objectif de collecte est très ambitieux", a fortiori dans un contexte économique dégradé.

Des contenus virtuels et inventifs

Privés de spectateurs, dans l'impossibilité sanitaire de se réunir au complet, les orchestres n'ont pas renoncé pour autant à proposer du contenu à leurs abonnés, au contraire, et rivalisent de créativité pour mettre sur pied un calendrier réinventé, entièrement virtuel le plus souvent, agrémenté de trouvailles malicieuses. Chanteurs de l'opéra de Los Angeles qui entonnent des berceuses depuis chez eux pour endormir leurs propres enfants, ou trompettiste du Philadelphia Orchestra qui se fend d'un rap pour expliquer comment suivre l'orchestre en streaming... Ce foisonnement est l'un des rayons de soleil de cette période sombre.

Matias Tarnopolsky y voit "des changements qui vont durer bien au-delà de la pandémie et s'inscrire dans l'offre de l'orchestre", en complément des spectacles en salles, lorsqu'ils seront redevenus possibles. Dans quelques jours, l'opéra d'Atlanta se prépare même à une représentation sous un chapiteau installé sur un terrain de base-ball, devant un peu plus de 200 personnes. Outre les contenus réservés aux abonnés ou payants, beaucoup d'orchestres proposent gratuitement certaines prestations.

Nous pensons que c'est le moment d'amener les gens à l'opéra.

Kristina Murti

Reste qu'avec moins de prestations, quand il y en a, et des formations réduites, beaucoup de musiciens n'ont plus accès à la scène et, souvent, aux revenus associés. "Je suis très inquiet de voir des musiciens quitter la profession parce que leur situation est devenue trop difficile", concède Simon Woods, PDG de la League of American Orchestras, organisation qui représente environ 700 orchestres. "Les gens n'ont pas les moyens de payer des loyers new-yorkais en attendant d'être de nouveau sûrs de pouvoir exercer leur métier", s'inquiète Maxim Moston, violoniste habitué de Broadway, qui jouait récemment dans la comédie musicale Moulin Rouge. Bien que propriétaire de son appartement, il surveille ses dépenses, mais n'envisage pas de renoncer : "J'ai trop investi pour ça. Donc je m'accroche en attendant un miracle."

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