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L'Opéra de Lyon lance en mars un très politique "Festival pour l'Humanité"

Le festival de mi-saison à l'Opéra de Lyon a pour thème cette année "l'Humanité", un choix en forme de "manifeste politique" pour son directeur qui se fait un "devoir" de placer l'art lyrique au coeur des enjeux actuels.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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L'Opéra de Lyon. 
 (MONTICO Lionel / hemis.fr / Hemis)

Le festival de mi-saison de l'Opéra de Lyon, du 15 mars au 3 avril, est donc consacré cette année à "l'Humanité", thème politique s'il en est. Serge Dorny, son directeur revendique cette dimension : "On a souvent réduit l'art et la culture à du divertissement, on a voulu les neutraliser, en faire quelque chose d'anodin, alors que beaucoup d'opéras et de pièces de théâtre sont des manifestes politiques", explique-t-il à l'AFP. "Prenez "MacBeth" de Verdi, par exemple. C'est une oeuvre qui parle de  tyrans, d'hommes de pouvoir qui veulent s'y maintenir à n'importe quel prix. La  tragédie de Shakespeare qui l'inspire remonte à 400 ans, mais on trouve là des  résonances avec des révolutions récentes - les printemps arabes - ou avec la  Russie dont Poutine contourne la Constitution pour rester en place", poursuit-il.

Quatre oeuvres politiques

Quatre oeuvres seront jouées dans le cadre de ce festival : "L'Empereur d'Atlantis" de Viktor Ullmann, "Brundibar", opéra pour enfants de Hans Krasa, "Benjamin, dernière nuit", une création de Michel Tabachnik sur un livret de Régis Debray et "La Juive" de Jacques Fromental Halévy dans une mise en scène d'Olivier Py.

Les deux premières sont des courtes oeuvres qui ont en commun leurs liens avec le camp nazi de Terezin dans les Sudètes : la  première y fut composée, la seconde y fut jouée.

"Benjamin, dernière nuit" : en quatorze scènes, ce drame lyrique met en scène les derniers instants du  penseur allemand Walter Benjamin avant son suicide à Portbou (Espagne), le 26 septembre 1940, en faisant défiler les grandes rencontres qui ont jalonné sa vie : Hanna Arendt, Arthur Koestler, Bertolt Brecht, Theodor Adorno ou André Gide.

La figure du juif comme fil rouge du festival

Enfin, "La Juive" de Jacques Fromental Halévy : "S'il y a une oeuvre engagée c'est bien "La Juive". Scribe, qui a signé le livret, était obsédé par la question de l'intolérance religieuse", commente en amont du festival Olivier Py, qui avait déjà monté "Les Huguenots" du même librettiste. Cet opéra en cinq actes, créé en 1835 et adulé par Wagner, fut un des plus gros succès du 19e siècle, joué à 600 reprises jusqu'en 1934, avant d'être mis au banc car taxé d'antisémitisme. Il ne ressortit des cartons qu'en 2007, à l'Opéra de Paris.

La figure du juif est le fil rouge de ce "Festival pour l'Humanité", initialement intitulé "L'Autre" avant que les attentats de janvier 2015 ne conduisent Serge Dorny à choisir une formulation plus "universelle". Mais ce n'est ici qu'un symbole : le stigmatisé, le persécuté pourrait être arménien, albanais, musulman, ce pourrait être aussi l'homophobie, souligne Serge Dorny.

Deux jours de rencontres en préambule le week-end prochain

Ce week-end, l'Opéra de Lyon accueille, en préambule au festival, deux jours de conférences, de débats, de concerts et de projections, qui le placeront "au coeur de la cité et de la réflexion sur demain", une chose "essentielle" aux yeux de son directeur. 

Parmi nombre de rendez-vous, Régis Debray y racontera samedi la vie de Walter Benjamin et Olivier Py évoquera dimanche la question de "l'engagement en  musique". "L'opéra a été au centre du Risorgimento en Italie. "Aïda" de Verdi est considéré comme un péplum alors que c'est l'oeuvre politique par excellence... "Madame Butterfly" de Puccini, on le monte comme un mélodrame exotique, comme une bluette, alors qu'il y est question de la destruction de la culture par les Américains... Et "Tosca", c'est la seule pièce sur la torture que je  connaisse", souligne le directeur du Festival d'Avignon. "Il y a eu une dépolitisation de l'art lyrique, c'est certain, et il y a aujourd'hui une vraie nécessité de mise en scène sinon les oeuvres sont privées de leur parole", conclut Olivier Py.

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