Alela Diane rend universelle la sphère de l’intime dans son album "Looking Glass"
La chanteuse folk américaine Alela Diane vient de sortir son sixième album "Looking Glass" le 14 octobre et sera en concert au Café de la Danse à Paris, ce mardi 18. Elle nous a raconté ses sources d’inspiration et comment la musique était une extension naturelle de sa vie.
Alela Diane s’est fait connaître par son premier album The Pirate's Gospel, auto-produit chez elle en 2004 et réédité par le label Holocene Music en 2006. Vendu à plus de 100 000 exemplaires et salué par la critique, il a propulsé sur le devant de la scène internationale cette native de Californie. Déjà sur ce premier opus, elle puisait dans son histoire personnelle pour écrire et composer. Ce premier album était en grande partie inspiré par ce qu’elle avait ressenti suite au divorce de ses parents et l’abandon de la demeure familiale emplie de souvenirs d’enfance.
Dans Looking Glass, sorti le 14 octobre, la chanteuse revient sur cet événement douloureux, notamment sur le morceau Dream a River, à la fois solaire et empreint de nostalgie. Tout en y évoquant la sensation de vide perçue à l’époque, elle exprime le désir de retrouver cet amour familial perdu.
Textes intimistes
La famille, c’est un sujet qui tient à cœur à la chanteuse. Ses vidéos mettent régulièrement en scène ses filles, son quotidien, chez elle, un peu comme des films Super 8 qui seraient dévoilés au grand public. "Ma musique est une partie très profonde de ce que je suis, et j’ai toujours trouvé naturel que la musique soit une extension de ma vie." explique Alela Diane. "Etant donné que j’écris et compose en même temps que ma vie de mère de famille, forcément j’observe ma vie qui défile". Elle ajoute : "Montrer ma maison, ma famille, ça fait partie de moi. J’ai toujours intégré des éléments de ma vie personnelle dans ma musique. Mes chansons sont un témoignage de qui je suis et d’où je viens."
Paloma qui ouvre l'album a été écrite à Mexico, lors d’un violent orage qui a laissé la famille sans courant pendant plusieurs jours. "La chanson parle des événements anormaux qui se produisent" précise Alela Diane. "Je veux dire les événements auxquels on ne s’attend pas naturellement dans sa vie, comme le fait qu’une tempête ravage tout, qu’il n y ait plus d’écoles, et que l’eau puisse tout détruire". Un texte où elle a pu canaliser son angoisse survenue durant cet événement, en se raccrochant aux plaisirs simples de la vie, comme se faire maquiller par ses filles.
Dans When we believed, elle évoque sa vie de jeune musicienne en tournée, et réfléchit sur "des versions passées d’elle-même". Avec son long plan fixe où Alela Diane balaie devant sa maison, le clip semble vouloir saisir la valeur du temps qui passe.
Thèmes universels
Mais l’écriture d’Alela Diane n’a rien de nombriliste, bien au contraire. Car si les paroles partent souvent du quotidien de la chanteuse, elles ouvrent toujours sur l’extérieur. Et quand on lui demande si elle pense que son intimité peut résonner dans le monde entier, elle répond : "Je ne sais pas. C’est une bonne question. Je pense que partager des histoires personnelles ou écrire sur ce qui se passe dans le monde peut trouver écho chez les gens. En écoutant des chansons, même si elles me sont personnelles, ils peuvent y entendre des résonances de leurs propres vies." Elle affirme sa foi en l'art : "La musique est un moyen de connecter les personnes entre elles. J’espère en tout cas que les gens qui écoutent ma musique peuvent s’y retrouver."
Howling Wind en est un parfait exemple : sous son apparence de douce berceuse accompagnant ses filles jouant dans le jardin, la chanson parle en fait de "ce vent violent qui souffle en ce moment sur notre monde : le changement climatique, la pandémie, les incendies, la soif de justice...", selon l'aveu même de son autrice.
Ce qui se passe actuellement dans le monde a énormément influencé l’écriture sur cet album
Alela Dianeà propos de son album "Looking Glass"
Cette façon dont la sphère de l'intime épouse des préoccupations plus globales, Alela Diane l’a pensée en rapport au temps : "Dans cet album, il y a du regard sur le passé, mais aussi tourné vers l’avenir, en se disant que la période que nous vivons actuellement est juste entre les deux, et qu’il faut saisir l’intensité du présent". Elle précise : "Mais il ne s’agit pas uniquement de l’intensité de la vie quotidienne. C’est un album d’observation sur l’état du monde".
Un titre aux significations multiples
Et cette notion de regard renvoie inévitablement vers le titre du disque et sa référence au miroir. "Le titre a beaucoup de significations différentes pour moi." explique Alela Diane. "En premier, c’est pour parler du miroir qui renvoie sa propre image. Faire le point sur soi-même".
L’expression Looking Glass évoque inévitablement Lewis Caroll et son roman De l'autre côté du miroir - Through the Looking-Glass en version originale. "Lewis Caroll en a donné une autre interprétation : à travers le miroir, tout est inversé, et c’est aussi un sens auquel j’ai pensé en choisissant le titre", confirme Alela Diane qui donne également une troisième signification : "Enfin, ça évoque aussi pour moi le lien par lequel on peut se connecter les uns les autres à travers Internet, le téléphone, les réseaux sociaux… comme j'en parle dans la chanson Strawberry Moon".
À l’écoute du disque, le verre cristallin du miroir s’entend aussi dans la voix pure de la chanteuse, mise en valeur par des arrangements épurés signés Heather Woods Broderick et la production sobre et élégante de Tucker Martine. Celle qu’on désigne comme l’héritière de Joan Baez - "J’ai énormément de respect pour elle", précise Alela Diane – nous offre un album empli de grâce, à savourer au présent, mais qui à n’en pas douter saura durer dans le temps.
L'album Looking Glass d'Alela Diane est sorti le 14 octobre (Naive). Alela Diane sera en concert ce 18 octobre au Café de la Danse (complet) et le 6 février 2023 au Trianon. Retrouvez toutes les infos sur le site officiel ou la page Facebook.
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