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"Notre volonté est de partir à chaque fois sur des terres inconnues" : le duo français AaRON électrise la rentrée avec son nouvel album "Anatomy of Light"

Franceinfo Culture a rencontré Olivier Coursier et Simon Buret pour la sortie de leur quatrième album studio. 

Article rédigé par Manon Botticelli
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 8min
 Olivier Coursier (à droite) et Simon Buret (à gauche).  (Sylvie Castioni)

C'était il y a trois ans. Le groupe AaRON prenait une pause après We Cut The Night, un album électro nocturne joué pendant deux ans dans le monde entier. Propulsé sur le devant de la scène en 2006 avec le tube U-Turn (Lili), bande-son du film Je vais bien, ne t'en fais pas de Philippe Lioret, le duo français a depuis conquis son public avec ses chansons lyriques et mélancoliques, sans jamais oublier de se réinventer.

Malgré une tournée repoussée à 2021, le groupe est revenu dans les bacs (et les playlists) ce 18 septembre avec un nouveau disque très attendu, prévu à l'origine pour mai 2020, puis repoussé à cause du confinement. Le groupe a profité de ce contretemps pour faire du teasing : après le clip coloré de The Flame en décembre, puis celui d'Odyssée en février, les fans ont pu cet été savourer Les Rivières ainsi que le réjouissant Ultrarêve avec Jean-Claude Van Damme en guest-star. Une vidéo qui annonçait déjà la couleur d'un album électrisant et poétique, parsemé de symboles. 

franceinfo Culture : Quel est le point de départ de ce nouvel album ?

Olivier Coursier : C'était en 2017. On venait de terminer une tournée et en général on aime bien faire une pause pour vivre d’autres choses. Mais la composition est revenue rapidement, au bout de deux mois. On voyageait chacun dans des endroits différents et d’un seul coup j’ai eu une inspiration. J'étais dans le Nevada [aux États-Unis], il y avait ce soleil brûlant, rien autour, juste ce désert et ce soleil qui peut t’écraser. J’étais dans une énergie assez intense car il y avait des chamboulements dans ma vie à ce moment-là. Ce morceau m’a traversé. J'ai transmis mon travail à Simon et lui m’a renvoyé une mélodie et un texte. C’était la première étincelle, le premier pas dans l’album.

Simon Buret : L’énergie de ce morceau, The Flame, nous a donné la couleur du reste de l'album. Tout d’un coup, on avait assez de puissance pour nous donner envie de partir. On s’est demandé comment on allait développer ce morceau pour en faire d'autres. Le reste est arrivé par vagues, c'est un journal quotidien de nos vies. Cet album est le reflet d’une époque, de ce qu’on traverse en tant qu’être humain. Le grand changement, c'est qu’on s'autorise un tour par la langue française. Cela nous a permis d’envisager cet album comme un premier, pour ne pas s’assoir sur nos lauriers. C’est intéressant de psychiquement partir ailleurs pour voir ce qu'on en rapporte, comme un explorateur. On construit nos chansons comme des paysages : des montages, des vallées, des lacs dans lesquels tu plonges, des soleils sous lesquels tu sèches. Notre volonté est de partir à chaque fois sur des terres inconnues.

Anatomy of Light est donc un album solaire…

Simon Buret : À la fin, on s’est dit que c’était la face inverse de We Cut the Night.

D'ailleurs, que signifie Anatomy of Light ?

Simon Buret : "L’anatomie de la lumière", on trouvait ça très beau, ça raconte plein de choses. La lumière est un symbole très utilisé en littérature et c'est une métaphore très intéressante : c'est la première chose qui habille tout, qui définit les formes. On voulait faire une collection de chansons comme si on décomposait le prisme de la lumière.

Que symbolise le clip de The Flame, où on vous voit danser dans une boîte de nuit déserte ?

Simon Buret : The Flame était la première prise de parole sur ce nouvel album. On avait envie de se poser au centre d’un code social qu’est la boîte de nuit et qui raconte toute cette liberté codifiée qu’on s’autorise : quand tu es en boîte tu peux être saoul, danser, te rouler par terre. Tout est fait dans le décor pour t’autoriser une forme de liberté qui est complètement fausse. Si tu fais ça dix mètres plus loin dans la rue tout le monde te regarde comme un taré. On autorise des choses par biais, par case, et la boîte de nuit symbolise cela. The Flame c’était le scratch de l’allumette, puis la flamme qui grandit quand tu dis "fais ce que tu veux, lâche-toi !" À la fin du clip, on fait un haka, une danse maori, pour chasser le mauvais œil sur le nouvel album.

Olivier Coursier : On voulait s’appliquer ce dont on parle dans l’album : oser, repousser ses limites. Je n'avais jamais vraiment fait ce pari de danser ainsi, d’habiter une salle vide. 

Quelles émotions voulez-vous transmettre ?

Simon Buret : N’importe lesquelles. Le rôle d’une chanson, comme de n’importe quelle œuvre d’art, est de déclencher une émotion. Mais c'est l'auditeur qui fait le travail. Nous, on est là pour poser les pierres d’une maison puis on vous laisse vous promener dedans. C’est très important de ne pas imposer un sentiment. Un bon morceau, c’est celui à la fin duquel une personne va dire "qu’est-ce que c’est triste !" et une autre "mais non, moi je trouve ça super joyeux".

Vous avez fait participer Jean-Claude Van Damme (dans le clip d'Ultrarêve) et Sylvain Tesson (auteur d'un texte qui accompagne l'album). Pourquoi ces collaborations?

Simon Buret : Sylvain Tesson est venu avant Jean-Claude Van Damme. On avait formulé cette idée que l’album est comme un paysage, une petite planète que tu construis. Sylvain Tesson étant un des plus grands explorateurs de notre époque et une très belle plume, on se disait que ce serait fascinant qu’il arpente ces terres inconnues. On est allés le voir et on lui a demandé : "Est-ce que ça te dirait de traverser tout cela et d’en ramener la cartographie ?".

On est ensuite allés chercher Jean-Claude Van Damme pour porter le message d’Ultrarêve. Nous étions en contact avec lui car il avait utilisé nos morceaux pour son film. Il nous fallait quelqu'un qui, dans toute sa force et sa fragilité, soit capable de faire accepter à l’auditeur le message "N’aie pas peur / Y a pas d’erreur". Quand on a ce statut d’icône, on porte en soi cette liberté qui permet de transmettre un message aussi radical que : "Accepte tes fêlures, la perfection c'est peut-être le fait d’accepter qu’on n'est pas parfait." C’est difficile de s’accepter, avec ses démons, ses angoisses. Et c’est souvent balayé au nom de la perfection du filtre instagram, de la bonne robe, du bon mot. C’est fou les codes sociaux qu’on a mis en place par peur du vide. Ce message était là et Jean-Claude Van Damme en était l’ambassadeur.

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L'album était prévu pour mai 2019, puis a été repoussé à cause du confinement. Pourquoi le sortir maintenant ?

Olivier Coursier : L’album devait sortir fin mai mais on n’avait pas envie de juste remplir des cases. Tant pis, c’était un moment de pause, qui appelait au silence. Sortir les choses à tout prix, cela ne nous intéressait pas. Tout est différent de toute façon aujourd’hui. Cela peut aussi amener une autre écoute. Peut-être que les gens vont prendre plus le temps de le découvrir.

Simon Buret : Il y a un même un côté excitant dans le fait de sortir pour la première fois un album sans le rattacher à une tournée, qu'il soit écouté en tant que tel. Même si on a lancé la tournée pour l’année prochaine.

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