"Solidays est un formidable terrain d’engagement" : Florent Maréchal de Solidarité Sida revient sur les missions de ce festival pas comme les autres
Gazo, Pomme, SDM, Sam Smith, Laurent Garnier, Mika, TIF, Louise Attaque, Santa, Flavien Berger : la 26e édition de Solidays accueille quatre-vingts concerts sur trois jours, du 28 au 30 juin 2024, sur la pelouse de l'Hippodrome de Longchamp. Mais Solidays, qui a battu l'an dernier son record de fréquentation avec 260 000 personnes, n'est pas un festival comme les autres. Organisé par l'association Solidarité Sida, il sert depuis toujours à sensibiliser et à récolter des fonds pour les malades. Il s'est aussi donné pour mission de mettre en relation les associations défendant d'autres causes avec les festivaliers, afin d'éveiller leur engagement.
En 2024, les jeunes se sentent-ils encore concernés par le sida ? Combien Solidays permet-il de récolter et où vont les fonds ? On fait le point avec Florent Maréchal, directeur des programmes de prévention de Solidarité Sida.
Franceinfo Culture. On a un peu tendance à l'oublier mais Solidays est organisé par l'association Solidarité Sida, ce qui en fait un festival différent. Selon vous, les jeunes de 2024 se sentent-ils concernés par le sida ? Faut-il encore éveiller les consciences ?
Florent Maréchal : Je pense qu'il faut toujours, toujours, éveiller les consciences, aussi bien dans la lutte contre le sida qu’en matière d’IST (infections sexuellement transmissibles). Les jeunes sont peut-être un peu moins au fait aujourd’hui de ce qu'est la réalité du sida à travers le monde, parce qu'en France on n’en meurt pratiquement plus, contrairement à l’époque de la première édition de Solidays en 1999. Pour autant, je dirais que les jeunes n'en restent pas moins solidaires à partir du moment où on aiguise leur curiosité, où on leur parle combat du quotidien et réalité vécue par les personnes vivant avec le VIH. Et puis parler de santé sexuelle, c’est parler aussi de rapport à l'autre, de consentement, de relations, de vie affective, d'orientation sexuelle, bref, tous ces sujets qui pour le coup préoccupent les jeunes parce que ça fait partie de leur construction.
Cette année, il y a même un "talk" que vous animez sur le plaisir, pour redonner du peps à la libido en berne des jeunes – il est écrit sur le site de Solidays qu’un jeune sur trois n’a pas eu de rapport sexuel en 2023…
Effectivement. On fait de la prévention, mais de manière positive. Ça se traduit notamment au Social Club, notre espace de conférence où l’on fait venir des personnalités inspirantes. Une table ronde y sera consacrée au plaisir et à la libido chez les jeunes. Nous avons aussi un espace Sex in the city, une exposition de 400 mètres carrés avec un parcours ludique de prévention en santé sexuelle entièrement créé par nos équipes, où tous les sujets sont abordés sans tabou, et de manière fun et ludique. C'est tout le savoir-faire et la force de Solidarité Sida, de monter à la fois une programmation riche de 80 artistes capable de capter le public jeune, tout en sachant lui parler et en lui donnant le pouvoir d'agir.
Solidays a d’ailleurs élargi la cause au handicap en général, de la surdité à la santé mentale.
Dans le village associatif, le Village Solidarité, une centaine d’associations sont présentes, qui défendent bien sûr la santé sexuelle mais aussi d'autres causes. On a des associations dédiées aux jeunes PMR (Personne à mobilité réduite), d’autres qui luttent contre l'exclusion, qui luttent contre les violences sexistes et sexuelles, d’autres dans le champ du développement durable. Cela représente 1200 militants et militantes, toutes causes confondues, présents pendant 3 jours et qui tous ensemble, essayent de sensibiliser les plus jeunes. À Solidays, où la majorité du public à moins de 25 ans, on est convaincus d’être un formidable terrain d’engagement, une passerelle entre d’un côté de jeunes festivaliers et festivalières en quête de sens et de l’autre des associations en recherche de forces vives. L’an passé, on s’était lancé le défi de créer 25 000 vocations solidaires, on le relance cette année.
On challenge beaucoup les associations qu'on invite au festival en fonction des missions de bénévolat qu'elles peuvent proposer aux jeunes pour leur donner envie de pousser ensuite la porte d'une association.
Florent Maréchal de Solidarité Sidaà Franceinfo Culture
À propos de bénévolat, les artistes ne se produisent pas vraiment bénévolement, mais font-ils un geste en baissant leur cachet ?
Si, si, certains le font vraiment bénévolement ! Mais on ne va pas se mentir, c'est de plus en plus difficile aussi pour les artistes dans ce contexte inflationniste, néanmoins tout le monde fait un gros effort. Solidays ne pourrait pas être ce qu'il est si tout le monde ne jouait pas le jeu. Dans cette grande chaîne de solidarité, les artistes sont un des maillons essentiels, mais ce n'est pas le seul. Il y a aussi tous les prestataires et surtout, nos 2 500 bénévoles. Sans eux, on ne pourrait pas faire Solidays, ou en tout cas on ne pourrait pas le concevoir comme un outil de récolte de fonds.
À quoi sert l'argent récolté par le festival ? À qui le redistribuez-vous ? Et cela représente combien d'argent ?
Ça représente plus de 2 millions d'euros qui sont reversés sous forme de subventions à 84 associations de lutte contre le sida en France, y compris en Guyane et à Mayotte, et dans 20 pays. Ces associations accueillent et prennent en charge tout au long de l'année des personnes vivant avec le VIH. Ça représente 118 projets grâce à l'édition 2023 et 200 000 personnes prises en charge au total, c'est considérable ! À Solidarité Sida, nous sommes aussi acteurs de prévention tout au long de l’année, et nos équipes arpentent les routes de France pour intervenir auprès des lycéens notamment. On sensibilise à peu près 20 000 jeunes en France chaque année.
La programmation musicale de Solidays est une fois encore très riche. On trouve aussi bien de jeunes rappeurs comme Gazo, PLK, Georgio, Zola ou Vacra, que Louise Attaque et Laurent Garnier. Quels sont vos coups de cœur ?
Je ne suis pas vraiment la cible, mais c’est vrai qu’il y en a pour tous les goûts parce qu’il y a aussi beaucoup de fidèles, attachés à l’esprit du festival. C’est sans doute pour eux, et j’en fais partie, que des artistes comme Louise Attaque et Laurent Garnier sont à l'affiche cette année. J’aime également bien Pomme, Mika et Sam Smith, une des stars de cette édition. J’ai découvert grâce à la programmation TIF, un rappeur algérien qui mélange son rap à la musique traditionnelle. Je ne suis pas connaisseur mais je suis un adepte des festivals. Or, trop souvent, entre les concerts qu’on est venus voir, il n’y a pas grand-chose à faire à part se restaurer. C'est toute la force de Solidays : si aucun concert ne nous intéresse pendant 2-3 heures, il y a plein d'espaces sur le festival où on peut aller s'amuser. On peut passer au Village Solidarité, écouter une conférence au Social Club, aller à l'Expo Sex in the City, il y a des manèges, il y a la Boombox aussi avec du Silent disco, plein de choses très variées. Où qu'on soit sur le site, on peut s'occuper, ne jamais s'ennuyer et en plus, on a l'impression d'être utile. Qui dit mieux ?
Solidays se déroule les 28, 29 et 30 juin 2024 sur l'Hippodrome de Longchamp > voir la programmation musicale complète.
Le vendredi et le samedi affichent complet mais il reste des pass pour le dimanche et des pass Nuit (de 23h à 5h du matin en mode clubbing).
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.