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VKNG, l'échappée pop de Thomas de Pourquery et Maxime Delpierre

Thomas de Pourquery, jazzman, saxophoniste, chanteur, showman, s'est associé au guitariste Maxime Delpierre pour une nouvelle aventure musicale. Tous deux viennent du jazz mais n'ont jamais eu l'intention de s'y enfermer. Ils ont créé un groupe, VKNG, au son et aux rythmes gorgés de pop ensoleillée et d'électro. Ils sortent leur premier album, "Illumination", qu'ils défendent sur scène. Rencontre.
Article rédigé par Annie Yanbekian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 15min
VKNG : Maxime Delpierre et Thomas de Pourquery
 (Flavien Prioreau)

Saxophoniste de formation, Thomas de Pourquery, 38 ans, Victoire du jazz 2014 (catégorie meilleur album) avec le groupe Supersonic, n'hésite pas à chanter pour les projets artistiques qu'il lance ou soutient. Très présent sur la scène du jazz et des musiques actuelles, il a participé à différents disques sortis cette rentrée comme l'exaltant "Verlaine gisant" de John Greaves, dans lequel il chante.

Maxime Delpierre, 40 ans, guitariste natif de Nantes, membre ou cofondateur de nombreuses formations de jazz, s'est ilustré récemment au sein du groupe Limousine, ou en tant qu'arrangeur (Jeanne Added, Damon Albarn, Alice Lewis...).

Amis de longue date, Thomas de Pourquery et Maxime Delpierre ont souvent travaillé ensemble dans le passé, avec Médéric Collignon, mais aussi dans le quintet DPZ - cofondé par Pourquery et Daniel Zimmermann - ou Viva and the Diva, groupe de rock fondé par Delpierre. De nouveau réunis, ils s'immergent corps et âme dans la pop. Une pop entraînante et cosmique, croisée avec de l'électro, du disco, du psychédélisme... L'album renferme un beau duo avec Olivia Merilahti de The Dø. Nom de code du projet : VKNG. Si l'on a tendance à prononcer "Viking", les deux amis préfèrent épeler les quatre consonnes.


- Culturebox : Qui de vous deux a eu l'idée de créer ce groupe de pop un peu électro ?
- Thomas de Pourquery : Ça vient de nous deux. Depuis très longtemps, on avait l'idée de faire un groupe de rock. Quand on a trouvé un peu de temps, on l'a fait. Il y a deux ou trois ans, on s'est rendus à Quiberon, sur notre West Coast, pour enregistrer des maquettes pour se faire plaisir, sans voir plus loin. On s'est régalés, alors on a continué, et petit à petit, on a fabriqué des choses ensemble, de l'écriture de chansons, de la production. À ce moment, on a vraiment eu l'envie de jouer et de faire un album avec VKNG.
- Maxime Delpierre : On se connaît depuis plus de quinze ans et on a toujours fait de la musique ensemble, de près ou de loin...

- Comment vous êtes-vous rencontrés ?
- TP : On s'est connus rue des Lombards (à Paris, ndlr)...
- MD : Dans les clubs de jazz...
- TP : La première fois que j'ai vu Maxime, c'était pendant la pause d'une jam session au Baiser Salé, il devait être 3 heures du matin, au bar. J'ai vu ce visage angélique. Il avait déjà 12 ans, il a toujours 12 ans... (Maxime éclate de rire) Dès le départ, on a bien rigolé. On a très vite joué ensemble.
- MD : On formait une petite tribu de musiciens qui ne se sont pas trop quittés depuis. Il y avait (ils énumèrent ensemble) Laurent Bardainne, Médéric Collignon, Philippe Gleizes, David Aknin, Matthieu Jérôme, Sylvain Rifflet... (Maxime continue seul) On a fait différents groupes par la suite. En fin de soirée, survenait un moment où Thom prenait le micro. On entendait alors sa voix et on réalisait qu'il chantait super bien et que cela offrait pas mal de possibilités. Entre ce moment-là et celui où on s'est vraiment mis à travailler concrètement, il s'est passé pas loin de dix ans.


- Donc, l'idée a cheminé lentement...
- TP : C'est quelque chose qui a mûri de façon très épidermique chez moi. J'ai toujours fait les choses comme ça. Particulièrement le fait de me mettre à chanter. Au plus profond de moi, je savais qu'un jour, je chanterais mes chansons. J'écris des chansons depuis mon adolescence. Avec Maxime, les choses sont venues très naturellement. Alors qu'on était déjà très amis et faisait plein de musique ensemble, il y a eu une redécouverte l'un de l'autre, Maxime commençant à faire de la production, moi lui montrant mon travail de songwriting, squelettique car il n'y avait rien, juste des morceaux piano-voix. Il s'est emparé d'une de mes chansons. Je lui ai donné carte blanche. J'ai été subjugué, j'ai adoré ce qu'il en a fait. On a fonctionné comme ça sur deux, trois titres puis ça s'est mélangé, Maxime a amené ses propres morceaux et les rôles se sont parfois inversés.
- MD : On n'était pas forcément partis pour faire un groupe. Je réalisais mes toutes premières productions et parallèlement, je travaillais avec Jeanne (Added, ndlr) et Thomas. je ne savais pas si j'allais produire du Thomas de Pourquery ou si cela aboutirait à un duo.
- TP : Il s'est passé quelque chose de très particulier quand on a mélangé nos deux façons de faire, cela a créé une vraie identité. Du coup, on a eu envie de monter ce groupe qui nous appartient à tous les deux.

- Thomas, écrivez-vous tous les textes ?
- TP : Oui, je les propose à Maxime et je prends bien sûr en compte ses idées. De son côté, il a le final cut sur la production. Sur la musique, toutes les configurations sont possibles. On a un droit de véto comme à l'Onu ! Si l'un des deux est moins convaincu par un morceau, on le le fait pas.
MD : On aura beaucoup essayé avant de décider de ne pas le faire... (ils rient) Des acharnés !

- Les textes sont-ils écrits directement en anglais ?
- TP : Oui. Les images me viennent en anglais, beaucoup plus qu'en français. J'ai beaucoup plus de facilité à écrire dans cette langue.


- Pourquoi le nom "VKNG" ?
- TP : Parce que Viking, tout simplement...
- MD : Quand Thomas a cherché un nom, il a pensé à Victor King. "Victor", car c'était le prénom de son grand-père. "King", parce qu'on considérait qu'il y avait une forme de noblesse dans cette musique, dans la façon de l'écrire. De fil en aiguille, c'est devenu V. King... Thomas avait déjà cette barbe alors que moi, j'avais de longs cheveux, on a rigolé avec tout ça ! Une copine nous a regardé et a dit : "Viking ! C'est évident !" Ensuite, "VKNG", c'est le logo que notre graphiste Gala Collette a trouvé.
- TP : C'est elle qui a enlevé les "i". Et on trouve que ça sonne bien, "V-K-N-G". C'est comme des initiales, on peut y mettre ce qu'on veut. Mais vous pouvez prononcer comme vous voulez ! Bien sûr, l'idée du viking nous inspire : les océans, les conquêtes, les découvertes, les voyages... Pour nous, c'est une musique très aquatique, remplie d'eau et d'air, de feu aussi, en arrivant de nuit sur la plage...

- Dans VKNG, on retrouve certainement nombre de vos influences musicales communes. Quelles sont-elles ?
- TP : Forcément, on a beaucoup de goûts en commun. C'est très vaste mais on peut dire que Marvin Gaye, LCD Sound System et les Flaming Lips sont nos trois plus grosses influences.
- MD : Et à l'époque, les projets de ces gens résultaient déjà d'immenses brassages...

- Y a-t-il des thèmes de prédilection dans vos chansons ?
- TP : Aujourd'hui, notre fil conducteur, c'est de faire des chansons d'amour pour pouvoir danser et s'aimer. Toutes nos chansons parlent d'amour, clairement, sans chemin sinueux, on le revendique haut et fort. Une grande écrivaine africaine dont je ne me souviens plus du nom disait : "Je suis là pour allumer des torches partout où il y a les ténèbres." Aujourd'hui, comme en tout temps, les ténèbres sont là. On croit en les forces de la physique, tout simplement. Il ne s'agit pas de montrer le bon chemin mais d'être plus actif à essayer de se faire du bien, de s'accepter, de réussir à s'aimer en ayant conscience de notre passage éphémère sur Terre. On croit vraiment en une révolution où chacun ferait sa propre révolution en faisant le plus de bien possible.

- VKNG en concert
Jeudi 15 octobre à Bron, au Jack Jack
Vendredi 16 octobre à Paris, au festival Mama
Mercredi 21 octobre à Pantin, à la Dynamo (concert après projection d'un film)
Mardi 10 novembre à Paris, à la Maroquinerie
Vendredi 11 décembre à la Rochelle, à la Sirène
> Tout l'agenda-concert de VKNG ici

VKNG sur scène
Thomas de Pourquery, Maxime Delpierre, Guillaume Rossel (batterie), Louis Sommer (basse, claviers)


L'album "Illumination", chanson par chanson


- "Illumination" : "Toute la chanson tient dans le titre. Pour le reste, à vous d'y mettre ce que vous voulez." (TP)

- "Girls don't cry", dont le titre fait un clin d'œil assumé à The Cure : "Olivia Merilahti nous a fait un grand honneur de venir et c'était un grand bonheur d'enregistrer cette chanson ensemble. C'est une chanson très naïve qui s'attaque aux plus grands clichés sur les garçons et des filles" (TP)

- "Killing in the name of God" : "On l'a écrit avant les attentats de janvier, mais des millions d'années après le premier assassinat au nom de Dieu. C'est une histoire d'amour qui dit que quelque part, chacun de nous a sa propre religion, sa morale, ses interdits. C'est un couple dont l'un dit à l'autre qu'il tue au nom de son propre Dieu, et finalement, au nom de lui-même ou d'elle-même. Cette chanson pose évidemment question." (TP)
"C'est la chanson de l'album pour laquelle on s'est dit que l'on ferait un peu de politique. C'est d'abord venu de la musique : on a eu l'impression qu'on avait fait un bond dans le temps avec un style un peu Manchester, rock, qui nous faisait penser à Joy Division, un groupe qu'on adore. Alors on s'est demandé ce que ça pouvait donner, avec VKNG, de parler un peu de politique, d'actualité." (MD)
"Cette chanson s'inscrit dans cette même veine dont on parlait plus tôt, de réussir à s'aimer, de poser des questions. Ne puis-je pas, moi aussi, oublier ma +religion+ ? Puisqu'il s'agit de morale plus que de religion. Est-ce que je peux oublier ma morale pour comprendre la tienne ? Quels sont nos nos intérêts, nos envies, nos interdits ? Comment aller rencontrer l'autre et débloquer des situations avec ceux qu'on aime. On a tous des murs entre nos pays respectifs, entre deux êtres, et à cette échelle, c'est toute l'humanité qui parle. On a souvent le choix d'aller vers la lumière ou les ténèbres. On est quand même responsable." (TP)

- "First pop" : "Notre première chanson pop ! Au début, on l'a appelée comme ça juste pour qu'elle ait un nom sur l'ordi. Ensuite, on a trouvé ça cool, très pop ! Ce titre fait partie des morceaux qui ont contribué à faire de nous un groupe." (MD)
"Un de nos tout premiers titres, on l'a fabriqué ensemble il y a deux ou trois ans." (TP)

- "Mary" : "C'est une fée du passé qui est partie trop tôt. C'est un hommage à un ange qui est toujours parmi nous." (TP)

- "Don't stop" : "C'est un des derniers morceaux qu'on ait faits pour cet album" (MD)
" Max avait toute la grille d'accords de cette chanson qui tourne en boucle. Le refrain, qui a abouti au titre de la chanson, m'est venu parce que je disais à Max +N'arrête pas, continue à jouer+. Dans les toutes premières démos, il y avait un truc qui montait, qui me prenait totalement." (TP)

- "We are the Ocean" : "C'est la chanson qui m'a donné envie de faire de la production. Un soir, on dînait chez Alice Lewis, une artiste incroyable qu'on connaît depuis très longtemps. Thomas s'installe au piano et commence à chanter cette chanson. J'ai fait une vidéo avec mon téléphone. J'ai écouté le morceau chez moi. Je l'ai trouvé génial. J'ai proposé à Thomas de faire un arrangement, une production autour du morceau." (MD)
"Pour moi, écrire des chansons, c'était un journal intime. J'ai bien sûr donné mon accord à Max. Il a fait un premier arrangement assez proche du résultat final sur le disque. J'ai écouté, j'ai été subjugué. C'est parti de là. Il a ralenti des passages, il en a accéléré d'autres. Il y avait un petit bout de texte, le reste est venu après que Max a mis le nez dedans. Cette chanson est la première qu'on ait fabriquée vraiment à deux." (TP)

- "More" : "C'est une chanson pour mon père (disparu en 2012, ndlr). Elle parle de notre amour éternel." (TP)

- "The Price" : "Cette chanson, comme les autres, parle d'amour. À chaque fois, on ne fait que poser des questions sans apporter de réponse. Pour nous, elles signifient quelque chose. On assemble des images et des couleurs, mais il n'y a pas vraiment d'histoire. On espère que ces chansons vous parleront." (TP)
"On doit en avoir quinze versions différentes dans notre ordinateur ! On a tout de suite joué ce morceau lors d'une résidence, sans passer par la phase arrangement, production, maquette... On ne sait pas pourquoi, mais cette chanson nous a tout de suite fait penser à James Bond. C'était aussi le cas pour les personnes qui l'ont écoutée au départ. On a trouvé quelque chose d'héroïque dans la grille d'accord, la mélodie, la construction. En fait, les quinze versions, c'était ça : à la recherche de James Bond ! Au bout d'un moment, on a fini par tout bazarder et on a trouvé la version de l'album dont on est 100.000 fois plus fiers. Elle est vraiment plus simple. C'est juste la chanson. Il nous arrive de la jouer en duo guitare-voix avec Thomas dans des showcases, sans le groupe." (MD)

- "Lonely golden boy" (titre-fantôme à la fin du disque) : "Cette chanson cachée est une démo en piano-voix, enregistrée sur mon piano." (TP)
"Thomas me l'a envoyée et je l'ai écoutée en boucle chez moi !" (MD)
"On a essayé de l'enregistrer avec le groupe, et finalement, on l'a mise de côté. On s'est dit que ça ferait un joli ghost-track, comme un petit bonbon." (TP)
"Peut-être que ça figurera dans le prochain album !" (MD)

VKNG sur le disque
Thomas de Pourquery, Maxime Delpierre, Mark Kerr (batterie), Vincent Taeger (batterie), Juan de Guillebon (basse), Arnaud Roulin (claviers), Olivier Merilahti (voix)

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