Booba, Youssoupha, SCH... Pourquoi les clips de rap français se ressemblent autant ?
Avant même d'apercevoir les artistes dans leur propre clip, leur nom apparaît sur l'écran. Chris Macari, Syrine Boulanouar et William Thomas, ces trois réalisateurs reviennent constamment au crédit des clips de rap français, précédés de la mention "un film de". Ces clippeurs, autrefois hommes de l'ombre, sont devenus des noms à part entière dans le milieu du rap français. Au fil de leurs vidéos, chacun de ces réalisateurs duplique son style pour modeler l'image des artistes.
Chris Macari, le fidèle de l'écurie Booba
A presque 40 ans, Chris Macari revendique plus de 220 clips : Kery James, Seth Gueko, La Fouine, Rohff... Après s'être fait connaître avec la vidéo "9.3 tu peux pas test" de Mac Tyer (2006), le réalisateur s'est fait un nom en signant presque tous les clips de Booba. Pour le dernier album du Duc de Boulogne, "Nero Nemesis" (2015), Chris Macari a clippé pas moins de dix titres sur treize.Ses préférences : les clips tournés en extérieur truffés de plans larges et aériens. Il les multiplie dans de grands espaces, des montagnes de "Comme les autres" à la plage réunionnaise de "Billets violets" (2015). Pour "Salside", sorti la semaine dernière, le réalisateur a filmé Booba dans une fôret style bayou. Avec le maquillage tribal des figurants, la vidéo est plongée dans une ambiance vaudou. Un scénario qui rappelle fortement celui utilisé en 2014 pour "Une Vie".
Chris Macari s'occupe logiquement des talents révélés par Booba. Kaaris, Kalash ou encore les jeunes pousses belges Shay et Damso ont fait appel à sa patte. Pour "1200" de Shay, il ouvre la vidéo par un panorama de Paris réalisé au petit matin en timelapse, donnant l'impression que les nuages accélèrent. Comme celui réalisé à Los Angeles en ouverture de "92i Veyron" du mentor de la rappeuse.
Celui qui aime jouer avec les verticales a développé un univers sombre, en jouant régulièrement avec des néons et des barreaux comme pour "Mannschaft" de Youssoupha (2015) ou "Dix-Neuf" de SCH, sorti il y a un mois.
Syrine Boulanouar, dans la galaxie Nekfeu
Les codes de la pop et de la pub, c'est le crédo de Syrine Boulanouar. Le jeune réalisateur est derrière de nombreux clips de 1995, l'Entourage et le S-crew, les collectifs dont Nekfeu fait parti. En 2012, il faisait sauter les membres de 1995 sous des confettis dans "La Suite"... loin des clichés bling-bling qui collent à la peau des clips de rap. Il récidive quatre ans plus tard avec "J'aurais pas dû", le dernier clip réalisé pour le S-crew en juin. Syrine Boulanouar reste fidèle à ses couleurs de prédilection : bleu ciel, rose pale, jaune crème... Des nuances qu'il utilise aussi bien pour faire rejouer La Cène de Léonard de Vinci à 1995 dans "Réel" (2013) que pour la pub Blossom de la marque de bijoux haut de gamme Les Néréides.Pour leurs échappées en solo, les rappeurs de ces collectifs lui restent fidèle. Nekfeu a fait appel à lui pour son récent clip "Princesse", encore filmé avec une lumière rose et bleue. De son côté, Sneazzy lui a fait confiance pour la vidéo de "Super", digne des campagnes publicitaires d'American Apparel. Dans tous ces clips, comme pour "Lunettes noires" d'Alpha Wann, Syrine Boulanouar use des ralentis.
William Thomas, clippeur de trap pour MHD et Kalash
En trois ans d'activité, William Thomas aussi estime son nombre de clips à plus de 200, à seulement 18 ans. Et le nombre de vues réalisées sur YouTube est impressionnant : plus de 56 millions en un an pour "Freestyle PSG" de Niska, près de 26 millions en quatre mois pour "Roger Milla" de MHD...Il a fait des plans tournés au drone sa spécialité. A tel point que "Roger Milla" du prince de la trap, et "Plein les poches" de Pso Thug, débutent de la même façon : des plans aériens quasi-identiques de la Cité rouge, dans le XIXe arrondissement de Paris.
Ce qu'il affectionne particulièrement, ce sont les scénarios musclés et les montages cadensés. Avec quelques variantes, il mêle souvent perquisitions, armes, voitures de luxe, femmes en petite tenue et drogues... comme pour "Captain Cook" de Pso Thug, "Los Santos" de Gradur ou encore "Free Me" de Kalash. A l'instar de Chris Macari, à qui William Thomas est déjà comparé, il multiplie les néons dans la plupart de ses clips. La relève est assurée.
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