Cet article date de plus de six ans.

Rencontrez Brockhampton, les rappeurs qui réinventent le concept du "boys band"

En moins d'un an, le super-groupe californien aux influences rap, pop et R'n'B a connu un succès météorique. Ses trois premiers albums, sobrement intitulés SATURATION I, II et III ont conquis un public friand d'un hip-hop à la production complexe et marqué par les thèmes du racisme, de l'exclusion et de l'acceptation de soi. Brockhampton est en concert le 24 août à la U Arena de Nanterre.
Article rédigé par franceinfo
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Les rappeurs du "boy band" Brockhampton, vêtus d'une combinaise de prisonnier orange, lors de leur prestation à Coachella en novembre 2017
 (KEVIN WINTER / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

"Best boy band after One Direction", chante Kevin Abstract dans la chanson "BOOGIE" qui ouvre le dernier volet de la trilogie "SATURATION". Son groupe, Brockhampton, ne correspond pourtant pas à l'image traditionnelle d'un "boys band". On est bien loin d'Alliage ou des 2Be3. Pas de chemise ouverte sur des muscles saillants, de pointes blondes ni de marketing orienté vers les adolescents.

Nébuleuse de talents

Brockhampton est un collectif musical qui compte tous types de talents. Il est d'ailleurs parfois facile de s'y perdre tant le groupe s'est élargi depuis ses débuts. Il y a des rappeurs en la figure de Matt Champion et Dom McLennon, des vocalistes comme JOBA ou Bearface et des musiciens comme Roberto. Le groupe est lui même en charge de la production, gérée par Romil Hemnani et Jabari Manwa.
Il est parfois difficile de s'y retrouver tant le groupe offre une diversité de talents.
 (Ashlan Grey / Brockhampton)
Une nébuleuse de talents qui permet aux artistes californiens d'atteindre une diversité musicale qui s'étend des "bangers" ("HEAT", "STAR"), aux odyssées électroniques, à l'image de "SISTER/NATION". Le groupe est tout aussi capable de proposer des ballades langoureuses comme "SUMMER", où la voix suave de Bearface conduit à un solo de guitare cathartique.
Au milieu de ce vivier exceptionnel, un individu se détache tout particulièrement. À seulement 20 ans, Kevin Abstract est le fondateur de ce "boys band" moderne au sein duquel il écrit, rappe et chante ses textes très personnels.

Esthétique unique

En dépit de leur statut de "boys band", le talent des membres de Brockhampton ne se limite pas à leur expertise musicale. La sortie de leurs singles s'accompagne toujours d'un clip vidéo réalisé par le leader du groupe, Kevin Abstract. Chaque vidéo suit un schéma similaire. La scène commence par une phrase en espagnol d'un dénommé Roberto avant de suivre le groupe dans ses pérégrinations les plus insensées.

La patte de Kevin Abstract se manifeste par des couleurs saturées à l'extrême et une caméra en perpétuel mouvement pour capter le dynamisme de la performance. Qu'ils soient affublés de costumes fantasques ou peints en bleu de la tête aux pieds, les membres du collectif ont réussi le pari de s'approprier une identité visuelle extravagante et unique.

Un rap politique et vecteur de tolérance

"Why you always rap about being gay. Because not enough n****s rap and be gay", scande Kevin Abstract dans la première partie de "JUNKY". Depuis ses premiers projets en solitaire ("American Boyfriend"), le jeune artiste a fièrement revendiqué son homosexualité dans ses textes. Une situation beaucoup trop rare dans un milieu où l'image de gangster hyper viril reste la norme.

Le rappeur et leader du groupe BROCKHAMPTON, Kevin Abstract, a pour habitude de porter des costumes de scènes provoquants pour interpeller son public.
 (Matt Cowan / GETTY IMAGES NORTH AMERICA / AFP)

Au delà de ses paroles crues, Kevin Abstract n'hésite pas à s'adonner à des mises en scènes provocantes lors des concerts du groupe. Ainsi au Festival de Coachella, il est entré sur scène vêtu d'un gilet pare-balles sur lequel était inscrit le mot "Faggot" (équivalent de "Pédé" en anglais). 

Dans un climat politique explosif, les membres de Brockhampton couchent leur indignation face aux inégalités raciales sur le papier. "I could get shot in the back and they'd tell the world that I fought them" s'exclame dom Mc Lennon dans "GUMMY", en référence au décès de Michael Brown, jeune diplômé afro-américain abattu par un policier de Ferguson alors qu'il n'était pas armé.  Dans "FIGHT", Ameer Vann s'insurge contre les failles du système éducatif américain.

 

Nouveau départ

Le succès soudain du groupe n'est pas venu sans désillusions. En mai dernier, l'un des rappeurs les plus charismatiques du groupe, Ameer Vann, a été évincé suite à plusieurs accusations de harcèlement moral et physique. Un temps solidaire envers Ameer, le "boys band" s'est éloigné de lui après de nouvelles révélations, jusqu'à effacer toute trace de sa contribution dans leur futur album.

Intitulé "The Best Years Of Our Lives", ce nouveau projet marque la première collaboration de Brockhampton avec la maison de disque RCA Records. Parmi les premiers extraits dévoilés, le brutal "1998 TRUMAN" et le single "1999 WILDFIRE", inspiré par les refrains d'Outkast.

Brockhampton a également révélé  la chanson "I, TONYA" dans l'émission "The Tonight Show" de Jimmy Fallon. Sur une instrumentation posée, les membres du groupe y reviennent sur leur expérience négative de cette soudaine notoriété. Ce morceau laisse transparaitre la fragilité d'un groupe qui tente de se reconstruire en transformant ses déchirures en une oeuvre déjà monumentale.

Brockhampton est en concert le 24 août à la U Arena de La Défense (Paris Nanterre) dans le cadre de la Paris Summer Jam avec Kendrick Lamar, IAM et N.E.R.D. de Pharrell Williams.

Commentaires

Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.