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We Love Green 2022 : entretien avec le danseur Léo Walk, sur scène samedi avec sa compagnie La Marche Bleue puis avec Laylow

Le jeune danseur et chorégraphe Léo Walk met les bouchées doubles au festival We Love Green cette année. Il s'y produit samedi à deux reprises : une fois avec sa compagnie de neuf danseurs La Marche Bleue, puis avec le rappeur Laylow dont il signe la chorégraphie. Nous lui avons parlé.

Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Le danseur et chorégraphe Léo Walk en novembre 2019. (LEMPIRE ROBIN)

Magnétique, libre et talentueux, Léo Walk, 27 ans, est le jeune danseur qui n’en finit plus de monter. Multi-facettes, lui qui a déjà sa propre marque de street-wear (Walk in Paris), est aussi un mannequin très prisé de la mode et des marques, qui en pincent pour ce beau gosse sensible adulé des jeunes.

En tant que chorégraphe, Léo Walk mélange le hip-hop, la discipline dans laquelle il s’est d’abord illustré et qui l’a aguerri, avec la danse contemporaine, le jazz et l’électro. A la tête de sa compagnie d’une dizaine de danseurs fondée fin 2018, La Marche Bleue, il a monté un premier spectacle Première ride, qui, en une succession de tableaux, raconte les hauts et les bas d’une bande de jeunes, une traversée symbolique entre l'enfance et l'âge adulte. Ce ballet devait partir en tournée au printemps 2020 et affichait complet partout où il était programmé. Reporté et reprogrammé en raison de la pandémie, il a depuis été acclamé dans les salles où il a pu être montré, de l’Olympia au Théâtre du Châtelet et en régions.

Samedi 4 juin en fin d’après-midi au festival We Love Green, une version ramassée de ce ballet sera proposée aux festivaliers sur la scène LaLaland, habituellement dévolue aux DJ’s et au dancefloor, donc dénuée de sièges. La directrice du festival Marie Sabot, qui propose pour la première fois de la danse à We Love Green, espère que le public debout se mettra à danser à l’unisson de La Marche Bleue. Léo Walk, inquiet de nature, en est moins sûr… Un peu plus tard le même jour, peu avant minuit, le danseur viendra embraser une autre scène, celle du nouveau chapiteau de La Clairière qui peut accueillir 15 000 personnes : il y assurera la chorégraphie du show très attendu du rappeur Laylow. 

Un tableau de "Première ride" du danseur et chorégraphe Léo Walk avec sa compagnie La Marche Bleue. (PIERRE MOUTON)


Présenter un ballet dans un festival de musique : d’où est venue cette idée ?
Léo Walk : Ce n’est pas une idée à moi, ce sont mes producteurs qui me l’ont proposée. Mais j'ai pensé que ça pouvait être adaptable. J’ai assisté à pas mal de concerts avec de la danse et les gens regardaient le spectacle. Je me suis dit : est-ce que ça change vraiment quelque chose si on enlève le chanteur et qu’on met l’œil uniquement sur les chorégraphies ? C’est un challenge, ça peut être intéressant. On va voir si ça passe, je me demande comment ça va être reçu...

Qu’allez vous proposer ? Une adaptation raccourcie à une quarantaine de minutes de votre chorégraphie Première ride ?
Oui exactement. Faute de temps, je n’ai pas pu offrir quelque chose d'inédit. J’ai juste créé un tableau en plus. Il y aura donc une exclu sur 10 mn. J’ai enlevé ce qui est moins dynamique dans la chorégraphie. Normalement les gens sont posés dans leur siège et peuvent partir dans leur petit monde, mais là, étant donné que le public est debout avec une bière à la main, le but est davantage de les stimuler. J’ai condensé ce qui était plus énergique tout en essayant de garder aussi des tranches de calme pour qu’il y ait un mélange des deux énergies. 

La bande originale de Première ride est très variée, avec Flavien Berger, The Animals, Daft Punk, Gainsbourg ... Quelle place tient la musique dans votre vie ?
La BO du spectacle est le reflet de mon iPod : j’écoute vraiment de tout. La musique tient une place énorme dans ma vie. C’est ce qui me sauve, c’est ce qui me stimule, ce qui m’aide à avancer et à ressentir. C’est comme si je me plongeais dans un imaginaire avec la musique. Dès que je suis trop dans la réalité je ne me sens pas forcément très bien, du coup, je préfère écouter du son et repartir. Avec les voyages, la musique est ce qui m’inspire le plus dans mon travail.


Vous travaillez aussi en tant que chorégraphe pour Laylow, vous serez sur scène avec lui samedi à We Love Green. Comment s’adapte-t-on à un autre artiste ?
Il faut connaître la personne. Laylow ne pourrait pas prendre un chorégraphe comme ça. Il faut le challenger et qu’il me challenge aussi. Il n’aime pas trop le côté dansé mélangé au rap, ce que je peux comprendre. En accord avec lui, je suis allé vers quelque chose d’assez cinématographique. Avec Laylow ce n’est que de la danse debout, (comprenez : il n’y a pas de danse hip-hop, au sol NDLR), c’est surtout un travail de mise en scène et de musicalité. Après, on fait avec les moyens du bord. On a très peu de temps de travail. Les danseurs je les ai une journée pour faire un show, or je ne suis pas magicien non plus. A Bercy j’avais pris 20 danseurs, et à We Love Green on sera une dizaine.

Comment avez-vous choisi les neuf danseurs de votre compagnie La Marche Bleue ?
J'ai cherché des diversités de danse. Certains viennent de l'électro, d'autres de la danse hip-hop, du contemporain ou du classique. Mais vu que c'est une aventure humaine, je m'entoure surtout de gens sains, avec lesquels je me sens bien. 

Qu'est-ce qu'un bon danseur à vos yeux ?
C’est un équilibre entre la personnalité et la technique. C’est quand on arrive à avoir l’âme et la technique, l’un de va pas sans l’autre. Je connais des techniciens dans tous les styles mais ils ne me font rien, j’oublie même qu’ils dansent alors qu’ils font des trucs complètement dingues. A d'autres, il suffit juste de marcher et tu les regardes. Un bon danseur, c’est être incarné.

Vous apparaissez dans le récent film En Corps de Cédric Klapisch, dont le succès confirme l’appétit du public pour la danse et pour une danse plus ouverte. Cet appétit, est-ce quelque chose que vous percevez, que vous confirmez ?
Ce que je peux dire c’est que les choses ont changé : quand je voulais ouvrir ces portes il y a six-sept ans ce n’était pas comme aujourd’hui. Je devais montrer que les danseurs hip-hop ne sont pas des cas sociaux, je devais montrer qu’on pouvait arriver à l’heure et s’exprimer correctement. Il y avait d’énormes préjugés et j’ai l’impression qu’aujourd’hui ça s’est un peu démocratisé. Je sens surtout que les danseuses classiques se mettent à kiffer les danseurs hip-hop, il y a ce genre de vibe, comme dans les films clichés (il rit) ... le film de Klapisch a fait un demi-cliché, qui est bien passé.



Pouvez-vous me parler de votre prochaine chorégraphie ?
J’ai écrit certains tableaux de Première ride j’avais 20 ans, il y a sept ans. Depuis, j’ai évolué. C’est pourquoi j’ai très envie d’enchaîner sur autre chose. La prochaine pièce s’appelle Maison d’en face, et elle sera plus intime. J’avais envie de véhiculer un message positif parce que pendant le confinement, j’étais enfermé avec mes amis et ils m’ont donné beaucoup d’espoir à travers leurs différences, à travers la beauté de l’humain. J‘observais comment l’humain se débattait dans toute cette merde et je trouvais quand même fou qu’il arrive à rire tous les jours et à garder espoir. Je voulais parler de ça et travailler cette matière en danse.

Quel message voulez-vous faire passer avec votre danse ?
Franchement, je sais que c’est un peu too much, mais je veux surtout faire passer un message d’espoir actuellement. Parce qu’on vit un moment très compliqué. A travers la parole, les médias et la politique, je trouve qu’on manque beaucoup de nuances, là où en danse on parle juste avec les corps et on revient à quelque chose de simple, comme quand on était enfant, quand on était tous amis, quelque chose de plus sain et de plus beau. Je ne te le cache pas : je suis en apnée. On vit une période de fous. On fait tous semblant mais on est tous en train de délirer à l’intérieur et c’est pour ça que j’ai envie de simplicité : se faire du bien, se sourire, comprendre qu’on a le droit d’être vraiment comme on est.

Léo Walk est samedi 4 juin au Festival We Love Green
A 18h45 sur la scène LaLaland avec sa compagnie La Marche Bleue
A 23h30 sur la scène La Clairière (chapiteau) avec le rappeur Laylow

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