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Rock en Seine 2022 : portrait de Yungblud, un jeune punk rockeur turbulent pour briser les cases et les barrières

Dans la musique comme dans le coeur, le Britannique de 25 ans n'a qu'une devise : s'extraire de toute catégorie. Parfois pop, parfois rap, mais toujours rock, Yungblud et sa communauté promettent une communion poignante et un show détonant pour l'ouverture du festival parisien Rock en Seine, ce 25 août. 

Article rédigé par franceinfo Culture - Pierre Kron
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 7min
Le chanteur Yungblud en concert au festival de Glastonbury (Angleterre), le 25 juin 2022.  (JIM DYSON / GETTY IMAGES EUROPE)

Des franges roses, des drapeaux arc-en-ciel, un ciel bleu éclatant… Et une foule en pleine déflagration de couleurs. Pourtant, dans la rue de Londres, la lumière la plus éblouissante provient du noir complet d’une silhouette en pleines convulsions. Un clip, un refrain : Don’t Feel Like Feeling Sad Today ! ("Pas envie de se sentir triste aujourd’hui"). Sur une scène improvisée, son sourire de Joker angélique grimpe jusqu'à son eyeliner coulant.

L’hyperactif britannique de 25 ans scande une joie pop en trémoussant sa crinière noire et violette. Comme à chaque performance, Yungblud devient l’hôte de cette vitalité punk s’échappant tout droit des années 70. Et il la transfuse en un éclair à son public survolté. Comme, sans doute, il l’insufflera aux festivaliers pour l’ouverture du festival Rock en Seine ce 25 août.  

"Honnêtement, c’est pour ça que je vis". Au début du clip, le chanteur se résume avec son accent acéré du Yorkshire. Et après bientôt cinq années depuis son premier EP, mission quasi impossible de lui donner tort. Garage rock à la Arctic Monkeys, rock alternatif teinté de rap à la Twenty-One Pilots, hip-hop aux accents pop-punk à la Post Malone… Yungblud a beau virevolter entre les genres musicaux, sa vigueur demeure contagieuse et inépuisable. "Je ne suis pas le meilleur guitariste, confiait-il à Spin en mai. [...] Mais ce qui va te couper le souffle [sur scène], c’est mon énergie". Car avant d’être la voix d’une génération libérée, Yungblud c’est d’abord le cri mélodieux d’un garçon trop longtemps incompris. 

Fils d'un marchand de guitare de Doncaster

5 août 1997. Dominic Richard Harrison voit le jour au sein d’une famille de la middle class, dans une ville moyenne du nord industriel de l’Angleterre. Pourtant, rapidement, la norme le rejette autant qu’il la rejette. Un père parfois violent avec sa mère. Une scolarité complexifiée par son TDAH (trouble du déficit de l’attention avec ou sans hyperactivité). Et un certain goût pour le maquillage, ainsi que la mode féminine et émo qui ne l’a jamais quitté. Il le raconte à ES Magazine en février 2020 : "Quand tu as grandi à Doncaster en portant des bas résille et des robes aux arrêts de bus, tu t'endurcis"

À l’âge de 15 ans, le jeune Dom’ s’enfuit pour Londres dans une quête introspective. Sexuellement (il affiche haut et fort sa liberté), mais aussi artistiquement en étudiant le théâtre à la renommée Arts Educational School. Cette fibre artistique donnera naissance à Yungblud. Mais ses racines s’ancrent bien plus profondément dans son ADN. Toute son enfance, il aide au magasin de guitare de son père après l’école. Il découvre Oasis, T-Rex (avec lesquels son grand-père a joué un moment), The Clash, les Sex Pistols… Mais, même là, sa curiosité l’empêche d’être captif d’une case “rock” et il s’ouvre au hip-hop des Beastie Boys, Run DMC… "Parce que [pour ces artistes], il est simplement question de foutre le bordel", résume-t-il à Fanzine début 2021

"Les barrières, c'est pour les poules"

Depuis, pas de cloisons dans sa musique, ni dans ses collaborations. Les labels veulent l’envoyer faire de la pop à The Voice ? Trop réducteur pour lui. Yungblud plonge dans le rap aux côtés de Machine Gun Kelly, dans le metal avec Bring Me The Horizon, dans la pop avec Imagine Dragons… Et il prend même l’habitude de reprendre les classiques de ses idoles. Comme en mars 2021 avec David Bowie. Costume rouge incandescent, cheveux gominés, les notes de Life on Mars s'échappent de ses cordes vocales dans un hommage touchant. "Comme Lady Gaga, il m’a appris que si je ne voulais pas appartenir au monde réel, je pouvais en créer un pour moi, raconte-t-il à People quelques mois auparavant. Et je l’ai fait."

Ce monde, Dom’ le bâtit sans cases, ni barrières. Dans la musique, comme dans les sentiments ou la sexualité. “Les barrières, c’est pour les poules”, sourie-t-il à l'émission Taratata en décembre 2019. Enfant, il se sentait comme un extraterrestre. Adulte, il veut rassembler par sa musique tous les jeunes (mais pas que) qui ont ressenti cette différence. "Pour mon premier album [21st Century Liability en 2018], j’étais comme une casserole qui a bouillonné toute ma vie parce que les gens ne me comprenaient pas, imageait-il à Virgin Radio en février 2021. Jusqu’à ce que le couvercle tombe." Une fois sa colère semée, le chanteur voit sa communauté fleurir. Comme il le chante dans son hymne pop-punk : "There’s hope for the underrated youth" ("Il y a de l’espoir pour la jeunesse sous-estimée"). 

Une famille : le Black Hearts Club

Yungblud, littéralement "sang neuf", s’écrit donc au pluriel. "Yungblud, c’est une communauté de gens qui vivent ensemble, et s’assument tels qu’ils sont", disserte Dominic Harrison dans la Boîte à Questions début 2021. Et surtout une communauté soudée contre toute discrimination sexuelle ou raciale. Ses jeunes fans, ou “sa famille” comme il aime à dire, se sont même baptisés en s’inspirant des deux coeurs tatoués sur ses deux majeurs : le "Black Hearts Club" (le "club des coeurs noirs"). Et cette affection, la rockstar leur rend bien. 

Avant de mettre leurs traumas en musique dans son second album Weird! fin 2020, Dom’ refuse de perdre sa deuxième famille pendant le premier confinement. Sa parade : présenter un show déjanté où il alterne concerts endiablés et interviews d’invités, The Yungblud Show. Blazer à clous, lunettes surdimensionnées, il s’ouvre dans le premier épisode en mars 2020 : "Je ne voulais pas être séparé de vous".

Et plus de deux années à chanter l’amour, le genre, la sexualité… plus tard, sa communauté attend toujours qu'il se dévoile davantage. Dans sa musique, comme dans sa vie. Leur patience va être récompensée avec son 3e album éponyme."Tous mes albums ont porté sur la société et les autres, annonçait-il pour Spin. Cet album est mon histoire." Rendez-vous le 2 septembre pour re-découvrir le Dom' derrière Yungblud. 

Yunglud est en concert jeudi 25 août sur la scène principale de Rock en Seine, au Domaine national de Saint-Cloud, avec une sélection de (re)diffusions de concerts sur la plateforme france.tv avec Culturebox à cette adresse.

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