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Comment Woodstock est entré dans la légende

Trois journées de musique marquées au départ par les caprices de la météo se sont muées au fil du temps en moment suspendu, emblématique de l'histoire de la musique et de la contre-culture aux États-Unis alors en pleine tourmente.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
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Woodstock, août 1969. Un plan du documentaire de Michael Wadleigh consacré au festival et sorti en 1970. Ce documentaire a été récompensé par un Oscar. (WADLEIGH MAURICE / AFP)

Trois jours passés dans la gadoue, érigés en symbole de la génération "Peace and love"... Organisé entre le 15 et le 18 août 1969, le festival de Woodstock a marqué l'histoire de la musique et est entré dans la légende, les mythes qui l'entourent se confondant dorénavant avec la réalité.

En 1969, la société américaine est déchirée par les manifestations contre la guerre du Vietnam, le mouvement des droits civiques et les assassinats de Martin Luther King Jr et Robert Kennedy, un an plus tôt. Comme remède à la colère, Woodstock promet "trois jours de paix et de musique".

Quelques artistes mis à l'affiche par le festival se sont engagés auprès de ces luttes qui secouent le pays, comme Country Joe and The Fish et son hymne à la paix au Vietnam Un, deux, trois, pourquoi nous battons-nous ?.

Mais pour certains, il est difficile de qualifier pour autant le festival de "politique".
"Pour les militants black power et anti-guerre, Woodstock c'était une blague", indique Martha Bayles, spécialiste culture et musique à l'université de Boston, à l'AFP. Dans l'esprit de ces activistes "ce n'était rien qu'une bande de hippies drogués qui n'étaient pas sérieux, qui ne comprenaient pas l'ampleur de la situation", analyse-t-elle.

Pour Joan Baez, c'était une "fête de joie, pas une révolution"

L'artiste probablement la plus engagée du festival, Joan Baez se rappelle de Woodstock comme d'une "fête de joie". "Ces trois jours de vacarme étaient importants, mais ce n'était pas une révolution", détaille la chanteuse de folk au New York Times. "Une révolution ou même un changement social n'arrive pas sans la volonté de prendre des risques", affirme-t-elle, "et le seul risque à Woodstock, c'était de ne pas être invité."

Certains moments qui ont contribué à rendre le festival mythique n'ont été connus qu'après-coup. À l'image de l'hymne national américain déconstruit et magnifiquement réinterprété à la guitare par Jimi Hendrix, hissé comme le symbole de tout un mouvement mais... manqué par beaucoup de festivaliers, dont la plupart n'entendait que très mal ce qui se passait sur scène.

Heureusement que le moment avait été capté par les caméras pour le documentaire oscarisé Woodstock, sorti en 1970.

Soudain, "la notion de ce qu'était le patriotisme a été élargie", se souvient Danny Goldberg, journaliste musical de 19 ans à l'époque du festival, "certains éléments du mythe de Woodstock ont été rattachés au mouvement de paix de l'époque".

Une musique issue de la contre-culture devient culture dominante

Organisé deux ans après un autre festival mythique, celui de Monterey en ouverture du fameux "Summer of Love", en 1967 - et qui lui a ouvert la voie -, Woodstock est aussi entré dans la légende pour avoir définitivement propulsé au-devant de la scène une musique qui a - un instant - rassemblé des américains de tous horizons, un style de rock puisant ses racines dans du folk, du blues et du gospel. "La musique a fédéré toute cette génération, les travailleurs, les étudiants, les soldats", estime Martha Bayles.

Et longtemps perçue comme une contre-culture, cette musique est devenue par la suite la culture dominante. "Cela a certainement montré aux grands promoteurs de concerts, aux grandes maisons de disques et aux grands diffuseurs que le public de ce qu'on appelait à l'époque la +musique underground+ (...) était beaucoup plus large que ce qui avait été perçu jusque-là", souligne de son côté Danny Goldberg.

L'âme de Woodstock est aussi encore perceptible dans de nombreux festivals et l'événement peut être considéré comme pionnier de la culture des "rave parties", ces soirées electro clandestines qui ont pullulé dans les années 1990, selon Martha Bayles. "La puissance de tout ça était vraiment liée à la musique et à la foule, cette illusion que tous avaient étaient traînés dans une sorte d'expérience collective transcendante."

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