LCD Soundsystem a mis l’Olympia KO debout mercredi
Une puissance phénoménale
Le concert démarre à l’heure et pied au plancher avec "Yr City ‘s a sucker" enchaîné à "Daft Punk Is Playing at My House" dans une version accélérée. La foule, plutôt mature (pas de moins de trente ans à l’horizon), et dans laquelle figurent quelques "people" (Jean-Michel Jarre, -M-, Pedro Winter) est déjà à bloc.
Il faut attendre 20 minutes pour entendre un extrait du nouvel excellent album de LCD Soundsystem sorti il y a moins de quinze jours avec l’explosif "Call the Police". Mais déjà, la question nous taraude: comment une telle puissance live peut-elle se déployer avec autant de flegme ?
Certes, quelque chose comme un studio entier, avec ses instruments, ses percussions et ses machines, encombre la scène de l'Olympia. Manipulée par le musicien transgenre Gavin Russom en robe blanche et turban, l'une des machines ressemble au poste d’une opératrice téléphonique des années 50 avec ses fils et ses clignotants. Serait-ce la botte secrète de la machine à danser rétro-futuriste ?
Claque sur claque
Comme à We Love Green en juin 2016, les six musiciens qui entourent James Murphy font corps, y compris dans les moments les plus expérimentaux (le maelström sonore qui termine "Movement"). Ils donnent l'impression d’être une entité organique très solide, hyper dense, à la fois réglée au millimètre (les accélérations fulgurantes, la chorégraphie des musiciens d’un instrument à l’autre) et totalement libre. La tuerie se poursuit sans temps mort avec une setlist bien dosée où se glissent "American Dream" et "Tonite", deux merveilleux titres du nouvel album qui vaut à LCD d'être pour la première fois numéro un des ventes aux Etats-Unis.
Dans la fosse, on se sent propulsés par l’énergie, écrasés de plaisir, extatiques autant que malmenés : c’est claque sur claque. Par contraste, sur scène, les musiciens sont ultra concentrés mais détendus. Nous sommes visiblement les marionnettes consentantes de l’Olympe musicale.
Avec sa bouille d’ours mal rasé, sa coupe de cheveux hérisson sur un T-shirt "tie and die" qui laisse poindre son bidon de bon vivant – on le verra plusieurs fois traverser la scène un verre de vin à la main, normal pour le propriétaire d’un bar à vins de Brooklyn - James Murphy, 47 ans, est le chef d’orchestre indiscutable de la troupe. Faute de baguette réglementaire, il s’empare régulièrement d’une baguette de batteur, dont il distribue quelques petits coups bien placés sur les cymbales.
"Tout le monde dans le groupe est meilleur musicien que moi", avoue-t-il dans le numéro de Tsugi magazine de septembre. Mais il leur impose néanmoins de jouer "à sa façon" et, ajoute-t-il sans fausse modestie, "ils sont très patients avec moi".
LCD Soundsystem à l'Olympia on ne s'en remet pas comme ça. #claque #pas sommeil pic.twitter.com/eqw2l6RmqR
— Laure Narlian (@Nijikid) 13 septembre 2017
Un bond en avant supersonique
On a toujours apprécié les concerts de LCD Soundsystem. Il y a sept, dix ou douze ans parce qu’on était fous des disques du groupe new-yorkais, parce qu’on adhérait à cette musique à danser autant qu’à penser, parce qu’on adorait ce punk rock new wave frotté au funk et à l’électronique, et parce que c’était le meilleur son du moment.
Aujourd’hui, on a le sentiment d'assister à plus qu'un bon concert. Clairement, un bond en avant significatif a été accompli par le groupe au plan scénique. L’avion stylé au fuselage design qui nous transportait alors, a laissé la place à un supersonique, un engin phénoménal de précision qui menace à chaque instant de crever le plafond. Tout se passe comme si une puissance prodigieuse était ici intelligemment contenue, retenue, puis lâchée sans freins à des instants clés, avec un effet démultiplicateur et ultra jouissif pour le public, qui s’envoyait en l’air mercredi sans modération, hurlant, dansant et transpirant comme s’il devait mourir demain.
Depuis l'an dernier James Murphy a également pris de l'assurance au chant. Il ose désormais affirmer son coffre tout en s'amusant régulièrement à titiller les aigus. Le choix de la setlist n’est peut être pas tout à fait innocent à cet égard . "I Can Change" , "Dance Yrself Clean" et "Home" sont comme par hasard les titres les plus chantés de "This Is Happening", le dernier album publié en 2010 avant l’auto-sabordage en grande pompe au Madison Square Garden.
Le plancher de l'Olympia pulse comme un trampoline
Après "Someone Great", James Murphy annonce : "on va jouer quatre titres, deux nouveaux et deux anciens et après on ira pisser et on reviendra jouer trois titres". Est-ce parce qu’il est le jeune père d’un petit garçon de 2 ans qu’il nous traite comme ses enfants ? Suivent "American Dream" et "Tonite", deux merveilles du nouvel album, puis "Home" et "New York I Love You" qui convoque les briquets.
La troupe revient au rappel après quatre petites minutes de break pour "I Used To" sur lequel James Murphy prend des accents à la Robert Smith, puis "Dance Yrself Clean" qui le voit s’arc-bouter sur le micro et aller au bout de son souffle et de sa voix. Il se laisse aussi aller à une danse épileptique et sautillante, tandis que le plancher de l’Olympia ploie et pulse comme un trampoline sous l’assaut des pogos et du chahut. Le show se termine, le guitariste s’est rapproché du batteur et cisaille sa six cordes à toute allure. Comme dans les paroles du final "All My Friends", nous sommes tous amis ce soir, à la vie à la mort.
Seul petit regret, que le groupe n’ait pas joué plus de titres du nouvel album (il en a joué quatre au total), en particulier "Oh Baby", "Change Yr Mind" et "Emotional Haircut". James Murphy a sans doute gardé des munitions pour nous envoyer en l’air encore plus loin la prochaine fois. Jeudi soir ?
La setlist de mercredi 13 septembre à L'Olympia
Yr City’s a Sucker
Daft Punk Is Playing At My House
I Can Change
Get Innocuous
Call The Police
You Wanted a Hit
Tribulations
Movement
Someone Great
American Dream
Tonite
Home
New York I Love You
Rappel
I Used To
Dance Yrself Clean
All My Friends
LCD Soundsystem est à nouveau en concert à l'Olympia jeudi soir
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