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Reformation de FFF : Marco Prince "en route pour la joie !"

Dans les années 90, FFF (la Fédération Française de Fonck), qui mêlait rock et funk dans son chaudron bouillant, était un des groupes français les plus explosifs sur scène. Mais l'aventure s'était arrêtée brusquement en 2001, par usure. Aujourd'hui culte, FFF se reforme pour une tournée qui passe par Paris mercredi et jeudi (26 et 27 mars). Nous avons interviewé son chanteur-leader Marco Prince.
Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 10min
Marco Prince en 2013.
 (Marlene Awaad / Max PPP)
Un retour dans la bonne humeur, sans pression
FFF, qui s'était séparé en pleine gloire sans animosité, par fatigue, revient 13 ans plus tard avec un appétit et une joie manifestes. Ils n'ont pas de maison de disques et ne sont pas pressés d'en avoir, tout à leur bonheur d'entamer ce retour dans la plus totale liberté, sans pression, comme plongés dans une "ré-adolescence". Si l'idée d'un nouvel album de FFF n'est pas écartée, la nécessité de renflouer les comptes en banque, que l'on renifle souvent à plein nez chez les reformations de ce genre, n'est visiblement pas à l'œuvre derrière cette réunion.
 
Les membres du groupe n'ont pas chômé depuis 2001. Marco Prince a composé des musiques de films ("Total Western" d'Eric Rochant), de séries ("Mafiosa"), de publicités, d'évènements (JO asiatiques de Doha en 2006), il a joué dans des films et a fait partie du jury de la Nouvelle Star. Entre autres. De leur côté, le bassiste Nicolas Baby a composé pour le théâtre et le cinéma, le batteur Krichou Montieux s'est installé à Barcelone et le guitariste Yarol Poupaud est depuis 2012 le directeur musical de Johnny Hallyday. Pas exactement des crève-la-faim donc.
Alors que FFF s'apprête à mettre le feu à la Cigale (mercredi 26 mars) et au Bataclan (jeudi 27 mars), complets tous les deux, Marco Prince a répondu à la rafale de questions qui nous brûlait les lèvres.

Qu'est ce qui t'as le plus manqué durant toutes ces années par rapport à FFF ?
Marco Prince : C'est l'intense sentiment de liberté, je pense. Quand on est en tournée comme en ce moment, avec le retour du public, force est de constater que ça met un peu sur un tapis volant. Et puis il y a ce coté irréel d'être en tour bus. C'est délirant, j'avais un peu oublié et je me rends compte que c'est primordial pour moi. On s'arrange de ce qu'on n'a pas.
 
Pourquoi revenez vous maintenant après plus de 10 ans d'absence ?
C'est le résultat du hasard mais aussi parce que nous avions arrêté mais pas fini. C'est comme une histoire d'amour pas terminée. Il n'y a pas eu de rupture.
Mais alors pourquoi avez-vous arrêté ?
Parce qu'on était épuisés. Nous avions tourné sans arrêt. On comptait l'autre jour, on avait fait 230 concerts dans l'année, c'est énorme. Nous avions d'autres désirs de vie.

Vous aviez George Clinton comme parrain, Bill Laswell vous produisait, Spike Lee faisait votre clip. Avec toutes ces pointures penchées sur votre berceau, vous aviez tout pour décoller au plan international. Que s'est-il passé ? As-tu une explication ?
A l'époque c'était très compliqué pour un groupe français de décoller aux Etats-Unis. C'était impossible d'avoir du succès internationalement sans avoir une maison de disques anglo-saxonne. C'est encore le cas aujourd'hui d'ailleurs, Daft Punk et Phoenix n'y ont pas dérogé. A l'époque nous étions sur le point de signer avec Atlantic Record, mais ils se sont fait racheter par EMI à ce moment là et EMI a viré tous les contrats qui n'étaient pas américains. Cet album avorté, ça a été comme une mort dans l'œuf. Mais on a quand même sorti un dernier album, et on aurait jamais dû le faire celui là. On aurait dû faire un break court et revenir un peu plus tard avec un album.

Depuis 2001, tu as fait des musiques de films, des musiques pour la pub, tu as travaillé avec des grands orchestres, tu as été juré de la Nouvelle star: toutes ces expériences ont-elles changé ton point de vue sur la musique ?
Un petit peu. J'ai découvert notamment que tu peux presque tout faire quand on te fait confiance. Franchement, je ne pensais pas que je pouvais faire de la musique de film avant qu'Eric Rochant ne me demande de le faire. De là je me suis mis à y croire. On croit aux ailes qu'on nous donne, en fait. Et puis chaque activité est le repos d'une autre, c'est amusant. J'ai joué la comédie aussi. On est capable de faire beaucoup plus de choses qu'on ne le croit. Et avec une grande joie tout en le faisant sérieusement. Si je peux donner un conseil à toutes les mamans c'est dites à vos enfants que vous croyez en eux, et ils pourront peut-être devenir des Obama!

Marco Prince : "Aujourd'hui, on est à l'heure, on est dans l'air du temps"
Marco Prince sur scène avec FFF lors de la reformation d'un soir à Solidays en 2007.
 (PhotoPQR / Le Parisien / Max PPP)
FFF sont les fils de George Clinton, de Living Colour, des Red Hot Chili Peppers et même des Bad Brains. Aujourd'hui, qu'écoutez-vous et vous sentez-vous proches de certains groupes ?
On aime beaucoup Arcade Fire et leur approche de la musique. Trombone Shorty aussi on adore. Beaucoup de trucs new-yorkais, par exemple les Yeah Yeah Yeahs. LCD Soundsystem?  Oui on adore, on écoute dans le bus. J'ai failli faire un morceau avec un des gars de LCD, j'étais fier, on est de la même famille.

Etes-vous toujours membres de la Black Rock Coalition ?
(rires) Ah mais quand on est membre de la Black Rock Coalition, c'est à vie ! Ce qui est drôle c'est que l'idée était utopiste à l'époque alors qu'aujourd'hui tout le monde fait ce qu'il veut  : allez dire à Pharrell Williams ou Kanye West qu'il n'ont pas le droit de faire du rock ! C'est un discours qui n'a plus lieu d'être, et c'est sans doute ce qu'il y a de plus excitant dans la musique actuelle : il n'y a plus de chapelles et tout est possible. Je trouve que c'est une super période pour jouer de la musique.
 
FFF a contribué et ouvert la voie à cet anéantissement des chapelles...
Oui, aujourd'hui on est à l'heure, on est dans l'air du temps, alors qu'à l'époque on était critiqués dans le rock parce qu'on était trop funk, dans le funk parce qu'on était trop rock, on était toujours trop quelque chose pour quelqu'un. Alors qu'on vivait la musique exactement comme les gamins aujourd'hui avec leurs playlists, tout ce qui était bon était bon, quel que soit le genre. Maintenant, j'ai l'impression que les gens sont prêts pour nous.
 
Il n'y a plus de chapelles, mais il y a un vrai retour du funk mâtiné de disco. Est-ce que ça te rappelle ton époque Palace-Privilège ?
Mais grave , mais grave ! La première fois de ma vie où j'ai eu accès à une liberté complètement dingue c'était le Palace. Et je crois que je passe ma vie à essayer de rechercher ça. Le dernier album de Daft Punk, la première fois que je l'ai entendu ça m'a plu mais ça m'a aussi fait rigoler. Je trouve qu'ils ont créé l'un des plus beaux cadeaux qu'on puisse faire à tous les musiciens de Bar Mitzvah et de fêtes de village car du coup les musiciens de bal deviennent à la mode, "hype". Avant c'était plus compliqué de jouer du Daft Punk, maintenant c'est très sympa, ça met tout le monde d'accord.
Tu n'as pas l'air à genoux quand même…
Et pourquoi la musique ne serait-elle pas dans le plaisir et la facilité ? Quand c'est bon, c'est bon.
Et l'album de Pharrell Williams ?
Ah Pharrell j'adore ! Le premier nouveau morceau qu'on a créé tous ensemble c'est un grand écart entre Pharrell Williams et les Yeah Yeah Yeahs. C'est ça qui nous amuse en ce moment, cette espèce de fraîcheur, candeur et légèreté. Après, avec tout ce qui s'est passé hier (premier tour des élections municipales marqué par une poussée du FN) c'est moins funky mais c'est bien que les gens expriment ce qu'ils pensent. Donc je dirais candeur et légèreté mais en toute conscience…

Marco Prince : "avec leur dernier album, les Daft Punk ont fait un super cadeau aux musiciens de fêtes de village"
Marco Prince de FFF porté par la foule lors d'un concert le 8 décembre 2000 à Perpignan.
 (BEP/ L'indépendant/Max PPP )
 
Pour l'album futur, ça vient bien ? Vous avez d'autres morceaux ?
Oui on a plein de trucs. On est extrêmement prolixes quand on est ensemble mais on a juste du mal à conclure les morceaux. Chaque fois qu'on se voit en ce moment, il y a quelque chose qui vient. Dès que cette petite tournée sera terminée, on va se concentrer et récupérer tous les petits truc épars qui ressemblent à un morceau pour composer.
Ce nouvel album, tu l'imagines à peu près pour quand ?
(Rires). Ah ah ! Pour quand on voudra. Pas de raison de se mettre la pression.

Comment avez-vous préparé ce retour live ?
On a repris au moment du concert pour le Secours Populaire en octobre dernier. On n'avait pas joué ensemble depuis 20 ans, sauf pour Solidays en 2007. On s'est remis au boulot direct, on ne se pose pas la question. On est contents de travailler sans maison de disques et le nom du groupe permet de monter des tournées, c'est assez extraordinaire. On avait besoin de faire des photos, on a appelé nos potes et Mondino s'est proposé.  Il y a un élan d'amour envers le groupe qui est super beau et pour les concerts on gagne trois balles mais c'est une ré-adolescence.

Les concerts de FFF sont super physiques, tu es prêt à replonger en tournée avec autant d'intensité ?
Je m'entraîne comme un sportif de haut niveau. Vraiment. C'est du funk extrême ce qu'on fait. Sur scène, on prend qui on veut, parce que déjà quand on était petits on avait peur de personne, alors maintenant c'est même pas la peine !
 
Qu'est ce qui te réjouis le plus dans la perspective de la tournée des festivals cet été ?
On s'aime tous beaucoup, alors tout nous plaît dans cette tournée. C'est en route pour la joie !

FFF est en concert à Paris (Cigale) le 26 mars, Paris (Bataclan) le 27 mars, Paris la Défense (Chorus des Hauts de Seine) le 28 mars et dans de nombreux festivals cet été dont Garorock (28 juin), Solidays (29 juin), les Déferlantes (8 juillet), Musilac (12 juillet), festival de Poupet (18 juillet).

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