"Si je joue assez bien pour les Stray Cats, alors je peux faire n’importe quoi !", plaisante leur batteur Slim Jim Phantom
Un nouvel album, "40", et une tournée européenne en ce début d'été. Les Stray Cats ont montré qu'ils étaient toujours les maîtres du rockabilly. Une musique indispensable, selon Slim Jim Phantom, le batteur, rencontré lors de leur passage au festival Musilac d'Aix-les-Bains.
Après l'album 40 sorti au mois de mai, 26 ans après Original Cool (1993), on attendait avec impatience le retour des Stray Cats sur scène. Leur tournée européenne s'est arrêtée à quatre reprises en France. C'est lors de leur dernière date, au festival Musilac d'Aix-les-Bains, en Savoie, que nous les avons retrouvés.
Mais les matous ne se laissent pas approcher facilement. Pas de promotion en France, aucune photo autorisée... il aura fallu de la persévérance pour finalement décrocher une interview avec James McDonnell, alias Slim Jim Phantom. Le principe : des questions écrites sur un morceau de papier que le batteur lit. Le couac : il a tout mélangé avant. Il n'y a donc pas de logique dans l'ordre ci-dessous.
Slim Jim Phantom, l'interview
Franceinfo culture: Vous avez sorti un nouvel album, vous êtes en tournée... et après ?
Slim Jim Phantom : Nous avons encore quatre dates dans notre tournée européenne avant de retourner aux States et un mois de concerts là-bas. Nous avons planifié des concerts pour l’année prochaine également. Tout se passe bien, tout le monde est content donc on reprogramme des concerts l’année prochaine aux Etats-Unis et en Europe. Et dans l'immédiat, on joue ce soir !
Quel artiste récent recommanderiez-vous ?
Euh… j’aime The Living End. C’est un groupe de rockabilly qui a joué sur notre tournée anglaise. Et un groupe récent que j’adore, c’est le groupe de ma femme (la bassiste Jennie Vee ndlr), Eagles of Death Metal. C’est un groupe fantastique. Ils étaient au Bataclan à Paris lors de cet horrible attentat. Ce sont mes préférés.
Séquence nostalgie : quel est votre souvenir le plus marquant des années 80 ?
Je dirais qu'il y en a deux : un lors de l’US Festival en 1983. Il y avait Stray Cats et les Clash le même jour. Je me souviens avoir pensé que ce genre de musique qui était plutôt joué dans des clubs, une musique underground, éclatait enfin au grand jour et on a eu des titres dans le top 3 des charts… Je me souviens aussi de Stray Cats numéro 1 dans Billboard alors que Mickael Jacskon était numéro 2 ! C’était un grand moment pour nous !
Les histoires de filles et de voitures sont-elles toujours des thèmes récurrents maintenant que le rockabilly est devenu une musique "underground" (c'est ainsi que l'a qualifié Brian Stezer dans une interview, ndlr) ?
Les thèmes du rock'n roll sont un peu toujours les mêmes… Je pense qu’on pourrait trouver d’autres choses mais… oui, c’est toujours un peu comme ça aujourd’hui
La musique est-elle toujours au coeur de votre vie ?
Oh oui, bien sûr qu’elle l’est ! Tout tourne autour de la musique, c’est une façon de vivre. On se retrouve dans un endroit superbe comme celui où on est aujourd’hui et je me dis, je vais jouer de la batterie ici ce soir ! Tous les gens que je connais, les endroits où je vais, toutes mes expériences sont liés à la musique… donc oui, c’est vraiment profondément ancré en moi.
Etes-vous toujours des "chats errants" ou êtes vous devenus plus casaniers ?
Eh bien, je vis dans la même maison depuis plusieurs années maintenant… donc oui, nous sommes devenus plus sédentaires. Aujourd’hui on sort pour s’amuser et on essaye toujours de diffuser le rockabilly à travers le monde. Je crois que Stray Cats doit tourner et rappeler aux gens que c’est là que tout a commencé, que ce sont les racines de toutes les sortes de musiques. Il faut toujours remonter à Chuck Berry, Eddy Cochran, Buddy Holly, Carl Perkins et Elvis Presley.
Vous pensez que Brian Setzer et Lee Rocker auraient le même type de réponse ?
Je crois oui. Je crois qu’il faut remonter aux origines encore maintenant, si vous voulez faire de la musique.
"Trouble", "messed up" sont des mots qui reviennent à plusieurs reprises dans vos nouvelles chansons. Est-ce toujours le même esprit que celui de "Runaway boys" ?
Runaway Boys était notre situation exacte à l’époque. Nous n’avions nulle part où habiter, nous avons eu la chance de faire un disque et c’est la chose à laquelle on ne s’attendait pas. Maintenant c’est plus une métaphore, des mots qui sonnent bien ensemble avec les rimes et la musique. Mais ce n’est pas autobiographique !
Qu'est-ce qui nourrit votre musique aujourd'hui ?
En ce qui me concerne, quand je joue avec Stray Cats, je fais en sorte d’être suffisamment bon pour les deux autres parce que ce sont d’excellents musiciens et si je joue assez bien pour les Stray Cats, alors je peux faire n’importe quoi. J’ai été très chanceux de pouvoir jouer avec des musiciens talentueux et en tant que batteur, tout particulièrement, ce qui doit te nourrir c'est le respect des autres musiciens, c'est une base pour le batteur, toujours.
Après toutes ces années, que pensez-vous des fans français ?
Les fans français sont les premiers à nous avoir fait ressentir l’impact que nous pouvions avoir. Les premières fois où on est venus en France c’était comme pour les Beatles, on était suivis dans la rue, c’était de la folie. Des concerts ont été arrêtés pour faire descendre les gens de la scène. La France est un lieu particulier pour nous, c’était toujours un peu plus qu’ailleurs. Ça c’était dans les années 80. On faisait tout le tour de France, on donnait 30 concerts… et je reviens avec plaisir. Là on a déjà fait trois concerts et c’était fantastique, c’est de grands souvenirs pour moi
Que ressentez-vous à repartir en tournée tous les trois ensemble ?
Ca me semble complètement naturel. Chaque fois que je regarde les deux autres et que je joue de la batterie avec Stray Cats, j'ai le sentiment que tout est à sa place, à la bonne place. Pendant une heure et demie, je fais ce qui est prévu de façon très naturelle.
Qu’avez-vous fait pendant ces 20 dernières années ?
Oh j’ai fait plein de choses. J’ai fait des albums avec Lemmy (The Head Cat avec Lemmy Kilmister, ndlr) et surtout j’ai beaucoup tourné, dans des boites de nuit, de retour à LA, un album avec Captain Sensible (The Jack Tars, ndlr) et d’autres en solo. J’ai le sentiment d’avoir été bien occupé !
De faux adieux
On croyait le trio définitivement relégué au rayon des souvenirs heureux d'une jeunesse envoutée par leur rockabilly endiablé. On s'était trompé. La tournée d'adieux des Stray Cats en 2008 n'en était finalement pas une. Comme tant d'autres avant eux, les musiciens, qui vaquaient chacun à leurs occupations avec plus ou moins de succès ces dernières années, ont décidé de reprendre du service au sein de la formation née en 1979.
Première surprise: 40, célébration des 40 ans du groupe qui était resté des semaines au sommet des charts avec leur premier album Stray Cats, est de très bonne facture. On y retrouve avec plaisir l'esprit des morceaux qui avaient fait leur succès à l'époque : du rythme, une voix, des musiciens experts.
Pour ce grand retour amorcé avec quelques dates "sold out" aux Etats-Unis, le trio s'est bien entouré. Dans les studios Blackbird de Nashville, le producteur Peter Collins (Rush, Bon Jovi, The Brian Setzer Orchestra) et l'ingénieur du son multi- "grammy awardisé" Vance Powell (Jack White, Chris Stapleton, Arctic Monkeys) ont mis la main à la pâte.
A la sortie de l'album a logiquement succédé une tournée, ce fut la seconde bonne surprise. Après des haltes à Retro C Trop de Tilloloy, à l’American Tours Festival de Tours puis aux Eurockéennes de Belfort, Brian Setzer, Lee Rocker et Slim Jim Phantom ont donc posé guitare, contrebasse et batterie sur la scène de Musilac, au bord du lac du Bourget.
"Stray Cats I love you forever"
Séquence nostalgie pour une bonne partie du public, quadras et quinquas, fans de la première heure. "Je ne les ai jamais vus mais je veux les voir avant de mourir", s'exclame même un rocker voisin. Auteur d'une banderole clamant un amour éternel aux Chats Errants, un couple venu de l'Isère voisine aurait aimé "que ça dure toute la nuit".
Sur scène, l'alchimie fonctionne, même si les corps n'ont plus 20 ans et que les bananes ont perdu de leur superbe. Lee Rocker s'amuse toujours avec sa contrebasse qu'il fait tournoyer quand il ne prend pas le micro, Slim Jim Phantom ne trépigne plus autant qu'autrefois mais reste sans doute une exception à jouer de la batterie debout. Et si Brian Setzer n'est plus le beau jeune homme qui faisait chavirer les groupies, il demeure un leader charismatique avec une voix toujours puissante et un jeu de guitare à faire des envieux.
A lire aussi : "A Stray Cats Struts : my life as a rockabilly rebel" de Slim Jim Phantom, Thomas Dunne Books, août 2016
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