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Un rescapé du Bataclan : "Sortez, c'est un shoot de vie à l'état pur!"

Ismaël était au concert des Eagles of Death Metal au Bataclan vendredi 13. Comme d'autres, il a réussi à sortir rapidement du piège qu'a été ce bain de sang. Mais il a tenu à retourner très vite au concert pour conjurer la peur et les images qui le hantent. Mardi soir, il était au Trabendo où il a pris "un shoot de vie à l'état pur". Pour aller plus loin, nous avons interrogé le patron de la salle
Article rédigé par Laure Narlian
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Ismael El Iraki, rescapé du Bataclan, ici le mardi 17 novembre au Trabendo.
 (France 2)

"Il faut que je me débarrasse de cette appréhension parce que je refuse d'associer un concert et une tuerie", explique cet amateur de rock dans le reportage ci-dessous. "Je refuse d'avoir peur de la fosse et du noir et de la foule, parce que j'aime ça", ajoute Ismaël El Iraki à son arrivée au Trabendo, dans le Parc de la Villette (Paris).

A l'issue des deux heures de concert de Kadavar, il était en nage mais radieux. Il disait avoir évacué la pression pour la première fois depuis vendredi 13. "Il y a des images que je vois tout le temps depuis vendredi. Et depuis, c'est la première fois que je passe trois heures sans en voir. Donc sortez, parce que c'est ça que ça fait. C'est un shoot de vie à l'état pur !"

A la suite de ce reportage, nous avons voulu en savoir plus sur la réouverture de la salle du Trabendo, sur la volonté de sa direction et sur les conditions, notamment en terme de sécurité, de cette reprise. L'interview du directeur général de la salle, Alexis Bernier, est à lire ci-dessous, après le reportage.

Reportage France 2 : S.Brunn, J.Boulesteix, G.Orain, V.Castel

"Rester fermé c'est contribuer à alimenter la psychose"

Alors que les annulations de concerts se multiplient, de Prince à Foo Fighters en passant par The Shoes, certains artistes et certaines salles prennent l'exact contrepied. C'est le cas du Trabendo, qui a rouvert ses portes dès mardi soir. Pour quelle raison ? Et surtout dans quelles conditions ? Six questions à Alexis Bernier, le directeur général de la salle du parc de la Villette.

Le Trabendo a rouvert dès mardi soir. Pourquoi avez-vous voulu rouvrir si vite ?
Alexis Bernier : Parce que je pense que c'est notre travail. Les boulangers vendent du pain même si l'un d'eux est victime de la barbarie. Nous, notre boulot c'est de proposer des concerts.

Est-ce une façon de résister ?
Oui. Parce que la musique ne doit pas se coucher. Après, je comprends que le public n'ait pas le cœur à ça. Mais nous nous devons d'être ouverts. Etre fermé c'est contribuer à alimenter la psychose et le climat de peur. A partir de quand doit-on rouvrir ? Nous nous sommes posé la question, bien sûr. Il y a eu comme partout une période de stupéfaction et de deuil. Mais on ne veut pas laisser ces gens penser qu'ils peuvent nous terroriser. La vie doit continuer. En ce sens on a quand même été appuyés par les autorités au sein de la Villette. La consigne n'est pas de fermer les lieux. En revanche ils ne peuvent nous envoyer ni la police ni l'armée (comme toutes les salles privées).

Avez-vous renforcé les mesures de sécurité ?
Oui, nous avons triplé les effectifs de notre sécurité (une entreprise privée). Nos agents de sécurité effectuent une fouille plus poussée, avec palpation et ouverture des sacs. Nous avons aussi pris une femme dans les équipes de sécurité pour la palpation des femmes. En outre, nous avons avancé les postes de contrôles. On fait la fouille en amont et on informe tout le monde qu'ils doivent ouvrir leurs sacs rapidement. L'idée est d'effectuer ces fouilles sérieusement mais rapidement, de sorte qu'il n'y ait pas de queues ni de stations prolongées. Au Trabendo, nous disposons d'une terrasse, elle reste ouverte notamment pour les fumeurs, mais nous invitons le public à ne pas trop rester dehors : on le préfère à l'intérieur, plus protégé. Enfin, nous avons refléché toutes les issues de secours et placé un agent devant chacune chargé de fluidifier les sorties en cas de mouvement de panique.

Avez-vous essuyé des annulations ?
Une seule pour le moment, à la marge, l'Anglais Dave Angel qui devait venir dans le cadre de la soirée d'anniversaire des 8 ans du magazine de musique Tsugi ce soir, jeudi 19 novembre. En revanche, tous les artistes français programmés à cette soirée (Breakbot et Irfane, Superpoze, Boston Bun et Kub) ont décidé de répondre présent. Certains ont même affirmé une volonté très forte de jouer, comme Superpoze.

Comment cela se passe-t-il en cas d'annulation, faites-vous jouer les assurances ?
Sur une petite salle comme la nôtre, il n'y a pas d'assurance annulation. Des annulations en série, tout comme une fréquentation en berne, mettent des établissements comme nous en péril. Les pouvoirs publics ont bien compris que c'est un risque majeur pour les structures fragiles.

Qu'en est-il au niveau de la billetterie ?
Les ventes de billets ce sont arrêtées de façon très nette depuis vendredi. Elles reprennent lentement depuis lundi soir. Au début, nous avions des messages de personnes nous disant que bien qu'elles aient des billets de concert (notamment pour mardi soir), elles ne viendraient pas. Depuis mardi, la tendance s'est inversée: on nous demande surtout de confirmer que les concerts auront bien lieu.

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