Le batteur Charlie Watts, la mesure des Rolling Stones
Charlie Watts, l'élégant batteur des Rolling Stones décédé mardi 25 août, qui s'est toujours tenu à l'écart des folies de ses compères, est resté pendant plus d'un demi-siècle l'imperturbable métronome du groupe.
Le musicien est "décédé paisiblement dans un hôpital de Londres" mardi 25 août, "entouré de sa famille", a annoncé son agent Bernard Doherty. Il avait déjà averti début août qu'il manquerait la tournée américaine du groupe à l'automne après avoir subi "une intervention".
Charlie Watts était la "mesure" des Stones dans tous les sens du terme : reconnu unanimement pour son talent en matière de rythmique binaire, il offrait aussi sur scène, avec son visage impassible et son élégance légendaire, le parfait contrepoint aux déhanchements frénétiques de Mick Jagger et aux pitreries électriques des guitaristes Keith Richards et Ronnie Wood.
Un métronome venu du jazz
Né le 2 juin 1941 à Londres, Charlie Watts vient à la musique par le jazz. C'est son voisin Dave Green qui l'initie à 13 ans. Ils formeront trente ans plus tard le quartette The A, B, C & D of Boogie-Woogie. "Nous écoutions ensemble Duke Ellington, Chet Baker et Charlie Parker et c'était tout ce que nous rêvions de faire", raconte en 2011 cet amateur du swing.
Autodidacte en batterie, le musicien apprend à jouer à l'oreille, en regardant les joueurs dans les clubs de jazz londoniens. "Je ne suis jamais allé dans une école pour apprendre à jouer du jazz. Ce n'est pas ce que j'aime. Ce que j'aime dans le jazz, c'est l'émotion". Tout au long de sa carrière avec les Rolling Stones, celui qui tenait ses baguettes à l'envers en frappant avec le gros bout, continue en parallèle le jazz. Il enregistre plusieurs disques sous son nom avec un quintette (Charlie Watts Quintet) puis un dixtuor (Charlie and the tentet Watts).
Après des études d'art, il travaille comme graphiste dans une grosse agence de publicité et joue, sur cachet, avec une kyrielle de groupes de jazz à Copenhague, puis à Londres. Il finit par se laisser convaincre en 1963 de rejoindre les Rolling Stones, alors une petite formation balbutiante. "Je suis béni", disait Keith Richards. "Le premier batteur avec qui j'ai commencé il y a 40 ans est l'un des meilleurs au monde. Avec un bon batteur, on est libre de faire tout ce qu'on veut".
Modestie sans faille
Mais Charlie Watts a toujours affiché une modestie sans faille. Pour lui, "jouer dans un quartette de jazz intimiste et dans des stades avec les Rolling Stones n'est pas si différent". Avec le temps, il est devenu indifférent, en apparence du moins, aux perspectives de séparation du groupe. "Annoncer la tenue d'un dernier concert ne serait pas un moment particulièrement triste pour moi. Je continuerai à être ce que j'étais hier ou aujourd'hui", confiait-il en 2018 au magazine New Musical Express (NME), alors que la bande de septuagénaires préparait une nouvelle tournée.
Pendant que ses amis multipliaient "les divorces, les addictions, les arrestations et les folles engueulades", selon un inventaire dressé par le Mirror, Charlie Watts, le taiseux, passait une vie sereine aux côtés de Shirley Shepherd, sa femme depuis 50 ans, et leur fille Seraphina, dans leur haras pour pur-sangs arabes du Devon, en Angleterre. "Pendant cinquante années de chaos, le batteur Charlie Watts a représenté le calme au milieu de la tempête Rolling Stones, aussi bien sur la scène qu'en dehors", estimait le tabloïd britannique en 2012.
Une vie sereine et presque sans excès
Le musicien n'a toutefois pas été totalement imperméable aux dépendances du groupe : dans les années 80, il suit une cure de désintoxication à l'héroïne et à l'alcool. Mais il assure avoir totalement décroché. "Cela a été très court pour moi. J'ai juste arrêté, c'était pas quelque chose pour moi", confiait ce musicien taciturne qui a survécu à un cancer de la gorge en 2004.
Celui qui a été adoubé comme le douzième meilleur batteur de tous les temps par le magazine Rolling Stones reconnaissait en toute honnêteté avoir eu plusieurs fois envie de quitter le groupe. "A la fin de chaque tournée, je m'en allais. On travaillait pendant six mois aux États-Unis et je disais, c'est fini, je rentre à la maison. Puis, deux semaines plus tard, je me mettais à tourner en rond et ma femme me disait: 'Pourquoi ne retournes-tu pas travailler? Tu es un cauchemar'".
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.