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Thomas Dutronc fait de la prévention contre les dangers de la compression du son sous l'égide de l'Unesco

La compression du son est une technologie actuellement trĂšs rĂ©pandue qui nuit Ă  la nuance sonore et n'est pas sans danger. Thomas Dutronc en a fait la dĂ©monstration mardi soir sur scĂšne au ThĂ©Ăątre du ChĂątelet.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
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Le chanteur et musicien Thomas Dutronc sur scĂšne lors de la 43e Ă©dition de Jazz in Marciac (France), le 3 aoĂ»t 2021. (SEBASTIEN LAPEYRERE / HANS LUCAS / AFP)

Le chanteur et musicien Thomas Dutronc a fait mardi 1er février au Théùtre du Chùtelet la démonstration des méfaits du son compressé, celui qui rÚgne actuellement partout, des plateformes de streaming à la radio, lors d'une soirée organisée par l'association La Semaine du son (attachée aux enjeux sociétaux du sonore), sous l'égide de l'Unesco.

Thomas Dutronc entend prĂ©venir sur un procĂ©dĂ© sonore rĂ©pandu mais encore mĂ©connu qui s'avĂšre nĂ©faste Ă  long terme pour l'audition. AccompagnĂ© de sept musiciens il a donc alternĂ© morceau non compressĂ© et compressĂ©. "Vous entendez la diffĂ©rence ?", lance le guitariste. Un grand "oui" s'Ă©lĂšve du public, qui dĂ©couvre les dessous de la compression du son. Et prend conscience des risques en cas d'abus rĂ©pĂ©tĂ©s au cours d'un dĂ©bat oĂč sont prĂ©sentĂ©s les rĂ©sultats d'une Ă©tude scientifique.

Une technique de mixage née dans les années 60 et depuis dévoyée

Au départ, dans les années 60, cette technique de mixage partait d'une bonne idée : "rééquilibrer les instruments", comme mélanger harmonieusement une guitare et une batterie, expose Christian Hugonnet, ingénieur acousticien et fondateur de l'association La Semaine du son. Mais la compression a été dévoyée au fil du temps.

C'est un chausse-pied, on écrase un soufflé sonore en une galette, et on ramÚne toutes les galettes vers le niveau fort". Le résultat est "au-dessus de tout, du bruit de la ville, du métro, ça flatte l'oreille qui est paresseuse, qui n'a plus d'efforts à faire, ça rentre, sans nuance.

Christian Hugonnet, acousticien

Une prestation Ă©difiante de Thomas Dutronc

Thomas Dutronc en fait la démonstration au Chùtelet : il joue quatre extraits de titres en trois versions, non compressée, compressée et à nouveau non compressée. DerriÚre lui, la courbe sonore de la prestation est diffusée sur grand écran. En non compressé, on voit des pics et des creux sonores. En compressé, les reliefs s'estompent et la courbe se tasse dans la partie haute du volume sonore.

Ce que la musique a perdu en contrastes avec le compressé - on entend moins le souffle du chanteur ou les respirations entre les accords - elle le gagne en densité. On voit bien la tentation pour les musiques actuelles d'obtenir ainsi un effet de rouleau-compresseur, avec un son qui ne désemplit pas.

En l'absence totale de micro-silence, l'oreille ne se repose plus, ses systĂšmes de protection lĂąchent Ă  force d'ĂȘtre sur-sollicitĂ©s

Christian Hugonnet, acousticien

Les dangers de la compression sonore

DÚs lors, les problÚme auditifs guettent. C'est ce qu'établit une étude sur des cochons d'Inde, présentée par la faculté de Médecine de l'Université Clermont Auvergne (UCA). L'exposition "répétée - typique des auditeurs de musique - à la musique compressée est potentiellement dangereuse pour la sensibilité auditive", peut-on lire dans la synthÚse de cette expérimentation. Dans ce cadre, "des acouphÚnes sont possibles, ils font partie des signes de fatigue", souligne le Pr Paul Avan, l'un des co-auteurs de l'étude.

"Il faudrait Ă©viter cette fatigue sonore, il y a une Ă©ducation Ă  faire, un message Ă  faire passer", commente Thomas Dutronc. Pour l'artiste, l'Ă©poque se prĂȘte Ă  un changement des pratiques, sur le modĂšle "de ce qui s'est fait avec le bio". "Il faut gratter derriĂšre ce qu'on nous donne, maintenant qu'on sait, les gens qui font ce business vont ĂȘtre obligĂ©s de passer Ă  quelque chose de plus humain, de plus chaleureux".

Natacha Krantz, directrice de la communication de la maison de disque Universal France, va dans ce sens lors du débat. "On va travailler pendant un an autour d'un label qualité sonore avec des artistes comme Thomas, l'Ircam (Institut de recherche et coordination acoustique/musique), La semaine du son (dans le giron de l'Unesco) pour trouver une juste mesure, une ligne rouge à ne pas dépasser".

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