Calendriers de l'avent, catalogues de jouets, marchés... Les produits de Noël arrivent-ils vraiment plus tôt chaque année dans les magasins ?
Des catalogues de jouets aux chocolats, en passant par les vitrines illuminées… On a l'impression chaque année de se faire surprendre par l'arrivée de tout ce qui touche à Noël. Mais est-ce vrai ? Comment se décide le calendrier commercial lié aux fêtes de fin d'année ?
"Quoi, ils vendent déjà les calendriers de l'Avent ?" "Mais, on a déjà reçu les catalogues de jouets ?" "Dans les vitrines, sur internet, Noël est déjà partout alors qu'on passe à peine la Toussaint !" Vous aussi vous trouvez que les produits liés à Noël arrivent de plus en plus tôt chaque année ? C'est un sentiment partagé par beaucoup… mais est-ce réellement le cas ? Franceinfo démêle les guirlandes à ce sujet.
Les mêmes dates de démarrage des magasins
Autant casser le suspense tout de suite : non, Noël n'est pas mis en avant dans les magasins et sur les sites de commerce en ligne plus tôt qu'avant. "La réponse est non", affirme ainsi Franck Mathais, porte-parole de JouéClub. "Les gens oublient ! Mais en réalité, si on prend les 20 dernières années, la saison de Noël démarre toujours au mois d'octobre, avec comme premier temps de cette saison la distribution des catalogues de jouets en boîte aux lettres."
Cela fait 25 ans que je travaille dans ce secteur du jouet, ça fait 25 ans que j'ai toujours eu le mois d'octobre comme point de démarrage.
Franck Mathais, porte-parole de JouéClubà franceinfo
Même son de cloche, ou plutôt de clochette, à la Fédération française des industries jouet-puériculture. "On est sur un timing qui est bien avant Noël, mais on y est depuis longtemps", explique le directeur général Michel Moggio, qui lui aussi, travaille dans le domaine depuis de nombreuses années.
Même constance pour les marchés de Noël
Cela fait longtemps que la plupart des collectivités ne respectent plus scrupuleusement le calendrier traditionnel pour leur marché de Noël, à savoir une ouverture au début de l'Avent (la période liturgique qui comprend quatre dimanches avant la naissance de Jésus). L'une des "capitales" de Noël en France, Strasbourg, ouvre ses marchés "toujours un vendredi, sachant que la date étant définie en calculant quatre semaines pleines avant le 24 décembre", explique la mairie alsacienne. Et cela depuis… de nombreuses années. Pas d'évolution marquante donc, à quelques jours près. L'ouverture des marchés de Noël tombe ainsi le 22 novembre cette année, c'était le 25 novembre en 2016, le 24 novembre en 2012, le 30 novembre en 2002, le 28 novembre en 1987… L'installation du grand sapin, autre moment fort de cette fin d'année, se réalise elle quatre semaines avant l'ouverture des marchés, soit fin octobre.
Même constance à Metz, la voisine lorraine, qui mise elle aussi beaucoup sur la période de Noël. Les marchés ouvrent un peu plus tôt, histoire de se singulariser. "On veut être les premiers de France", explique ainsi Pascal Schons, directeur de la Fédération des commerçants de la ville. Les marchés ouvrent cette année le 20 novembre, c'était le 17 novembre en 2018, le 20 novembre en 2010, le 25 novembre en 2000… "Les consommateurs sont très paradoxaux, analyse le professionnel. À la fois ils râlent en disant que Noël c'est Noël, et qu'il ne faut pas faire trop tôt. Mais à la fois, ils se précipitent dès qu'on ouvre les marchés en novembre. On sait que notre plus gros week-end, c'est le premier !"
Pascal Schons ajoute que vue la lourdeur des dispositifs, notamment de sécurité depuis quelques années, les commerçants et les collectivités ont envie de faire durer les installations, histoire de ne pas avoir travaillé pour quelques jours seulement.
Mais alors… d'où vient cette impression d'un démarrage plus tôt chaque année ?
Plusieurs choses peuvent expliquer ce sentiment. D'abord, les différentes opérations commerciales de l'automne. Black Friday, French Days, promotions diverses… "Cela a tendance effectivement à mettre les gens dans les cadeaux de Noël, à ce moment-là", explique Michel Moggio, de la Fédération française des industries du jouet.
Les occasions d'acheter les cadeaux de Noël se multiplient, acquiesce la sociologue Nathalie Damery, présidente de l'Obsoco, l’Observatoire société et consommation. "C'est la question du prix juste : comme les promotions se multiplient, on a l'impression que quand on achète au prix 'normal', on se fait avoir. Cela induit une course à la consommation."
L'organisation marchande autour d'internet a bouleversé la mise en rayon des magasins physiques.
Nathalie Damery, sociologueà franceinfo
Il y un autre changement : les consommateurs achètent de plus en plus tard. "Quand on regarde la courbe des achats de Noël, on a un glissement un peu plus tardif de la part de la masse des gens", analyse ainsi Franck Mathais, de JouéClub.
Mais les dates de lancement des commerces restent les mêmes. Résultat, la période entre les deux s'agrandit. "On a l'impression que trois mois avant Noël, c'est une éternité", conclut le professionnel. Les achats se font effectivement de plus en plus tard. Les trois semaines avant Noël sont les trois plus grosses semaines de l'année pour le secteur du jouet et le mois de décembre représente plus du double du mois de novembre.
Est-ce que les enseignes s'entendent pour sortir les produits au même moment ?
Les patrons des grandes enseignes ne se réunissent pas secrètement autour d'une table pour décider ensemble de LA date de sortie des offres de Noël. "Il n'y a pas vraiment d'échanges, parce que chaque enseigne est responsable de ses propres lancements. Ils s'observent, je dirais, explique le directeur général de la Fédération du jouet.
Personne n'a envie d'arriver après les autres. Donc, la tendance est plutôt de dire 'je suis prêt au 15 octobre', pour ne pas arriver après les autres et que le catalogue soit un peu le catalogue de référence, scruté dans les familles.
Michel Moggio, de la Fédération du jouetà franceinfo
"D'autant que les catalogues sont porteurs de promotions. Donc, l'enfant, lui, regarde les jouets. Mais on sait que les parents regardent les promotions et les prix, bien évidemment", affirme Michel Moggio.
Rappelons que l'entente entre sociétés commerciales sur les prix est interdite par le Code du commerce. "Il n'y a pas de concertation entre les enseignes, affirme également le porte-parole de JouéClub. Il n'y a pas de course, c'est vraiment chacun son rythme. On a déjà, dès le mois de septembre, des demandes de nos clients pour savoir à quel moment le catalogue de Noël va sortir. Vous avez notamment les grands-parents qui sont beaucoup dans l'anticipation. Ils veulent se positionner, notamment sur des gros jouets", raconte Franck Mathais.
Est-ce qu'on ne risque pas de voir arriver Noël de plus en plus tôt ?
Peut-on imaginer des décorations et des sorties de catalogues de Noël dès le mois de septembre, alors ? Eh bien… non, si l'on en croit les professionnels. "Il y a une contrainte, c'est la disponibilité des produits, explique ainsi Michel Moggio. Les jouets ne sont pas fabriqués six mois à l'avance, ils sont fabriqués au fil de l'eau, pour commencer à arriver dans les rayons en octobre. Les gens qui partiraient trop tôt prendraient le risque d'annoncer un produit au catalogue alors qu'il n'est pas dans les rayons."
Sortir le fameux catalogue de Noël est un engagement fort pour ces enseignes. D'autant que l'année n'est pas étirable à volonté. Avant octobre, c'est… septembre. "Et septembre, c'est le mois de la rentrée, donc l'argent des ménages va surtout dans les fournitures, rappelle Michel Moggio. Donc ce n'est pas un mois où il se vend beaucoup de jouets. Finalement, c'est assez conservateur comme calendrier", conclut le patron de la Fédération du jouet.
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