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Un bateau en roseau comme ceux des Egyptiens va tenter la traversée de la Méditerranée

Un chercheur a fait fabriquer un bateau en roseau, pour prouver que les Egyptiens avaient traversé la Méditerranée. Il sera bientôt mis à l'eau.

Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
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L'assemblage d'une embarcation de 14 mètres de long en roseau qui va tenter la traversée de la Méditerranée (Beloslav, Bulgarie, 26 juillet 2019) (NIKOLAY DOYCHINOV / AFP)

Les Égyptiens ont-il pu traverser la Méditerranée sur des bateaux en papyrus il y a plus de 4 000 ans jusqu'à la mer Noire ? Pour le vérifier, des chercheurs s'apprêtent à tenter l'odyssée sur une embarcation qu'ils ont reconstituée en Bulgarie.

Patiemment assemblée par une équipe internationale à Beloslav près de Varna, sur la côte bulgare, l''Arbora IV", une nef à la forme de drakkar, est sur le point d'être mise à l'eau avant un départ prévu mi-août.

Selon le chercheur allemand Dominique Goerlitz, à l'origine du projet, les Égyptiens ont traversé la Méditerranée jusqu'à la mer Noire pour s'y procurer du métal nécessaire à la construction de leurs monumentales pyramides. L'hypothèse est loin de faire consensus parmi les scientifiques mais est, selon Dominique Goerlitz, accréditée par des écrits de l'historien grec Hérodote. A ce stade, "avec l'Arbora IV, nous voulons prouver qu'un tel commerce était possible dès la fin du Néolithique", explique-t-il à l'AFP.

L'Abora IV, un bateau en roseau, va tenter la traversée de la Méditerranée (Beloslav, Bulgarie, le 26 juillet 2019) (NIKOLAY DOYCHINOV / AFP)

Une précédent projet sur l'Atlantique avait échoué

Restait à réaliser l'embarcation. Quasi une routine pour cet expérimentateur allemand déjà à l'origine de trois projets similaires, dont une tentative de traversée de l'Atlantique en 2007. Parti de New York, l'Arbora III avait presque atteint les Açores avant d'être victime d'une tempête après 56 jours de mer.

Comme pour son précédent projet, le chercheur s'est appuyé sur la maîtrise d'oeuvre d'Indiens aymaras du lac Titicaca, dans les Andes boliviennes, Fermin Limachi et son fils Yuri, dont la tribu a cultivé jusqu'à aujourd'hui l'art de confectionner des embarcations - et même des îles artificielles - en roseau.

Le résultat est assez impressionnant : long de 14 mètres, l'Arbora IV dégage une impression de robustesse voire même de relatif confort, avec ses deux larges cabines. Doté d'un mât en bois, il dispose de deux voiles en lin de 62 et 40 mètres carrés. Au total, deux kilomètres de corde ont été nécessaires pour lier en faisceaux les 12 tonnes de roseaux utilisés, précise Fermin Limachi, dont le père José avait été associé en 1970 à l'aventure du Râ II du Norvégien Thor Heyerdahl, une des premières tentatives d'archéologie expérimentale maritime.

Des roseaux du Pérou à la place des papyrus égyptiens

Les papyrus utilisés par les anciens Égyptiens ne poussant plus en quantité suffisante, l'Arbora IV a été construit avec des roseaux totora du lac Titicaca.

L'objectif est désormais de voir si l'esquif parviendra à échapper aux périls durant les quelque 700 milles nautiques (1 300 km) de sa future traversée jusqu'à la Crète, son objectif. "La principale question est de savoir si ce bateau en 'papyrus' est en mesure de résister aux vents qui se déchaînent dans les Cyclades et en mer Egée", reconnaît Dominique Goerlitz.

Au cours de journées suivant la mise à l'eau, les roseaux constituant l'embarcation auront absorbé plus de 5 tonnes d'eau, ce qui assurera son lest et sa future stabilité en mer, souligne le chercheur. Selon lui, malgré une technologie d'apparence rudimentaire, le bateau présente une flottabilité incomparable car les roseaux lui offrent "des milliards de mini-chambres à air et il ne peut pas se briser et couler d'un coup".

Un bateau rudimentaire

Modernité oblige, l'équipage composé de volontaires de huit pays disposera durant sa traversée de moyens de communication satellitaire et radio, indispensables pour éviter une collision avec d'autres vaisseaux. "Il serait totalement arrogant et stupide de s'en passer", estime Dominique Goerlitz, selon qui "un cargo est plus dangereux qu'une tempête en pleine mer".

Mark Pales, un électricien néerlandais de 42 ans travaillant bénévolement sur le projet, assure n'avoir aucun doute quant à la sécurité offerte par l'Arbora IV. "Je suis sûr à 100% qu'il ne sombrera jamais", affirme-t-il. Dans le pire des cas, "aussi longtemps qu'il flottera, il fera office de radeau de secours". Heike Vogel, une volontaire allemande âgée de 35 ans, ne cache pas non plus son impatience à l'idée d'embarquer. "Ça va être une expérience très excitante et inédite pour moi", souligne-t-elle.

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