À Cannes, une exposition sur l'histoire longtemps oubliée des déportés algériens sur l'île de Sainte-Marguerite au 19e siècle
À Cannes, l'exposition Prisonniers en terre d’exil revient sur les internés du Fort Royal sur l’île Sainte-Marguerite. Au plus fort de la conquête de l'Algérie par la France, plusieurs milliers d'hommes, de femmes et d'enfants, originaires de diverses régions du Maghreb, ont été exilés sans procès, ni jugement à l'île Sainte-Marguerite. Au total, près de 300 personnes y sont mortes.
Aujourd'hui, le musée du Masque de fer et du Fort Royal revient sur l'histoire de l'Île Sainte-Marguerite au temps de la conquête de l'Algérie (1841-1884). Un important travail de recherche a été effectué pour retrouver des archives, photos et dessins, et retracer ainsi la vie de ces prisonniers que l'histoire a longtemps oubliés.
Près du musée, la pinède de l'île abrite également un cimetière musulman où ont été enterrés les détenus du Fort Royal. Des pierres placées en forme de cercle ont été disposées en guise de tombes. "Elles sont anonymes. La tradition musulmane rejette l'ostentation après le décès. En revanche, on a des indices sur les pratiques cultuelles, funéraires. Parfois, une pierre plus importante va marquer l'emplacement de la tête et le mort regarde vers l’Est, vers la Mecque", explique Christophe Roustan Delatour, directeur adjoint des musées de Cannes.
Une histoire politique
La plupart des sépultures sont intactes, d’autres ont disparu, probablement ravinées. La ville de Cannes souhaite rénover ce lieu unique en France, où reposent d’anciens prisonniers, forcés à l’exil par l’armée française en pleine conquête de l’Algérie. Parmi eux, l’émir Abdel Kader, chef politique, militaire et spirituel, en lutte contre la colonisation. Au total, 500 membres de sa smala ont été déportés sur l'île de Sainte-Marguerite.
"C’étaient des otages politiques, on n'était pas dans le cadre d'un bagne ou de travaux forcés. Ce sont des détenus qui servaient de monnaie d'échange pour obtenir la capitulation des gens qui, en Algérie, se battaient pour l’indépendance de leur pays", raconte Christophe Roustan Delatour.
Superposition de deux époques
Le dessinateur et auteur de bande dessinée Jacques Ferrandez a reconstitué des scènes de vie de l’époque. Il s'est notamment penché sur les conditions de vie des femmes et des enfants, entassés dans des petites cellules, à l'instar de celle réservée à un illustre prisonnier, le masque de fer, retenu sur l'île Marguerite dans la seconde moitié du 17e siècle.
"On a une superposition de ces deux époques où évidemment dans une cellule de 30 m2, prévue pour un seul prisonnier, on se retrouve là avec une quantité de femmes, d'enfants et leurs serviteurs, qui s'installent tant bien que mal dans ces vieux locaux", raconte le directeur adjoint des musée de Cannes.
Cette exposition s'inscrit pour la ville de Cannes comme un devoir de mémoire. Prisonniers en terre d’exil retrace, l'histoire de ces hommes, de ces femmes et de ses enfants, dont certains n'auront connus que cette île durant leur existence.
"Prisonniers en terre d’exil". Musée du Masque de fer et du Fort Royal sur l'île Sainte-Marguerite (Cannes). Tarif plein : 6,50 euros ; tarif réduit : 3,50 euros. Jusqu'au 29 octobre 2023. Plus d'informations sur le site de la ville de Cannes.
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