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Hollande : "la seule dette" à régler pour l'esclavage est "de faire avancer l'humanité"
A l'entrée de la baie de Pointe-à-Pitre est sortie de terre une oeuvre architecturale singulière, le Mémorial ACTe. Ce lieu d'expression sur l'esclavage veut apaiser cette mémoire douloureuse en Guadeloupe et au-delà. François Hollande l'a inauguré dimanche, journée nationale de commémoration de la traite et des abolitions, en présence de dirigeants africains et caribéens.
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La "seule dette qui doit être réglée" aux descendants d'esclaves est de "faire avancer l'humanité", a déclaré François Hollande à Pointe-à-Pitre, restant ferme sur son refus d'une indemnisation financière. Le centre ne sera ouvert au public que le 7 juillet.
"La France toute entière est engagée dans cette reconnaissance au-delà des sensibilités, des philosophies. La France est capable de regarder son histoire, parce que la France est un grand pays qui n'a peur de rien et surtout pas d'elle même", a affirmé François Hollande.
La ministre de la Justice Christiane Taubira, qui accompagnait le président, a critiqué la confusion entre "l'esclavage historique" et l'esclavage moderne faisant notamment valoir que le premier était "codifié régulé" alors que le second n'est "pas un système autorisé".
Ce Mémorial veut rappeler que "l'esclavage est un phénomène partagé par l'humanité depuis des millénaires", souligne Thierry L'Etang, responsable du projet scientifique, qui a travaillé avec le scénographe François Confino. Le centre - "pas un musée", insiste l'anthropologue - met en lumière des parcours moins connus de nègres marrons, flibustiers, rebelles qui ont jalonné l'histoire passée, et donne la parole à des artistes contemporains.
Sur plus de trois hectares, le Mémorial ACTe, surnommé "MACTe", déploie ses 7.800 m2 de bâti dont 2.500 m2 d'exposition. Cette "boîte" de granit noir est coiffée d'une résille d'aluminium argenté symbolisant les racines du figuier maudit, capables de se frayer un chemin en tous lieux. Une passerelle relie cet ensemble tourné vers la mer à une colline en retrait, le Morne Mémoire où sera cultivé un jardin comme le faisaient les esclaves des plantations sucrières lors de leurs rares moments de liberté.
De l'exposition permanente à l'exposition temporaire, en passant par le centre de généalogie et la médiathèque, la salle de colloque ou de spectacle vivant, le MACTe veut "tricoter" les différentes disciplines, selon les termes de Bruno Airaud, concepteur du Mémorial. "On met en action la mémoire pour qu'elle soit le moteur d'un regard contemporain qui dépasse la traite négrière et s'interroge sur ce que veut dire aujourd'hui la lutte contre le racisme, l'exclusion, l'exploitation", ajoute-t-il.
Le MACTe, partant des Amérindiens qui peuplaient les Antilles pour finir sur les formes modernes d'esclavage, du travail des enfants au trafic d'êtres humains, veut "construire un discours apaisé, réconcilier les mémoires" alors que cette mémoire "s'est peu dite ouvertement dans les outre-mer mais a irrigué souterrainement nos sociétés antillaises", pense l'historienne Myriam Cottias, présidente du Comité national pour la mémoire et l'histoire de l'esclavage.
"Les Antilles sont françaises depuis 380 ans dont 213 ans avec l'esclavage et 167 sans : ce sont des réalités pesantes", souligne Serge Romana, président du Comité de la marche de 98.
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