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Spoliations : en Limousin, des œuvres orphelines, témoins du pillage de l’art par les nazis

Plus de deux cents objets d’art ont été spoliés par les nazis en Limousin durant la Seconde Guerre mondiale. Les musées conservent les oeuvres qui n'ont pas encore retrouvé leurs propriétaires.

Article rédigé par franceinfo Culture - Gaël Simon
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
Ces deux tableaux de Renoir font partie des oeuvres volées par les nazis. (FRANCE 3)

Vingt pour cent de l’art en Europe aurait été pillé par le régime nazi entre 1933 et 1945. Rien qu'en France, les forces d'Adolf Hitler auraient transféré vers l'Allemagne près de 100 000 oeuvres. Le Limousin, terre de Résistance et de refuge durant la Seconde Guerre mondiale, n’a pas été épargné par cette entreprise de spoliation. 

Dans le Limousin, des œuvres orphelines et témoins du pillage de l’art par les nazis

À l’été 1940, de nombreuses familles s'enfuient pour échapper à l’avancée allemande en France et à la collaboration qui se met en place. Huit millions de Français choisissent l’exode en zone libre. Le Limousin devient une région où se cacher. "Il y a eu en Limousin beaucoup de familles juives réfugiées. Des familles juives qui venaient d’Alsace par exemple. Il y a eu aussi des familles qui sont venues de Paris avec une partie de leurs meubles quelquefois, et il y a eu aussi des objets d’art ou des objets plus simples qui ont été mis en sécurité", détaille Pascal Pla, historien spécialiste de la Seconde Guerre mondiale.

204 objets volés 

Mais les nazis parviennent à investir les villes et villages de la région. S’en suit un pillage du patrimoine culturel, surtout auprès des Français de confession juive. En Limousin, sur les 204 objets volés, 166 n'ont pas été restitués. Des peintures, des sculptures, des biens personnels, qui racontent des pans de vie oubliés depuis 70 ans.

"Ce sont des objets qui ont été aimés, vus, admirés par leurs propriétaires, pas nécessairement des grands collectionneurs mais des gens qui avaient fait un choix précis. Et en miroir, ils nous renvoient l’image et le souvenir de leurs propriétaires persécutés", rappelle David Zivie, chargé de mission recherche et restitution des biens culturels spoliés entre 1933 et 1945.

Une commission fondée en 1999

La question de la restitution des œuvres n’a réellement émergée que dans les années 1990. En décembre 1998, 44 pays s’engagent à retrouver et rendre les objets volés. En 1999, une commission pour indemniser les victimes est créée. "On s’est aperçu qu’il y avait énormément de demandes et que ce que l’on pensait être une commission qui devait durer quelques années simplement allait devoir s’inscrire dans le temps", confie Pascal Pla.

La Circée de Giovanni Domenico est gardée le musée Labenche. (FRANCE 3)

Aujourd'hui en France, 2000 œuvres n’ont toujours pas retrouvé leurs propriétaires ou leurs ayants droit. Elles font partie des MNR (Musées Nationaux Récupération). Cinq d'entre elles ont été confiées au musée Labenche de Brive-la-Gaillarde (Corrèze), comme la Circée de Giovanni Domenico, dont le devenir entre 1933 et 1945 est un mystère.

Ces œuvres, qui peuvent être exposées, ne font pas partie des collections publiques et sont soumises à une règlementation précise. "On ne peut pas prendre l’initiative de restaurer ces œuvres-là qui ne nous appartiennent pas. Et surtout, dans le cadre d’un prêt, les œuvres ne sont pas censées partir, quitter leur port d’attache", précise Vincent Rigau-Jourjon, directeur du musée Labenche.

En 2020, seuls 24 œuvres ont été restitués à leurs propriétaires. Les pièces orphelines sont visibles sur les archives Rose Valland, du nom de cette résistance qui a œuvré à leur sauvetage durant la guerre.

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