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Paris 2024 : des bouquinistes consternés assistent à l'enlèvement de leurs "boîtes"

"Ce que les guerres n'ont pas réussi à faire, les JO vont y parvenir : nous faire disparaître", déplore Michel Bouetard, secrétaire général de l'Association des bouquinistes.
Article rédigé par franceinfo Culture avec AFP
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 3min
Une emblématique boîte à livres de la capitale sur laquelle on peut lire "Patrimoine en péril" le 2 octobre 2023,à Paris. Pour des raisons de sécurité, 600 des 900 boîtes seront déplacées avant la cérémonie d'ouverture des JO de 2024. (MAGALI COHEN / HANS LUCAS)

La mairie de Paris a déployé les grands moyens pour démonter quatre des antiques boîtes à livres des bouquinistes parisiens dans la soirée du vendredi 17 novembre, un test de faisabilité avant les Jeux olympiques.

Pour des raisons de sécurité, la préfecture de police de Paris réclame le démontage de près de 600 des 900 boîtes couleur vert wagon avant la cérémonie d'ouverture du 26 juillet 2024, qui se déroulera sur la Seine. Devant un petit groupe de bouquinistes consternés, une vingtaine d'agents de la ville, aidés d'une entreprise de déménagement, ont passé plusieurs heures à procéder à cet enlèvement, après avoir soigneusement vidé les centaines de livres qui y étaient entassés.

"C'est comme un arrachage de dent !"

Une grue a ensuite soulevé un par un ces gros rectangles de bois, souvent fragilisés par les ans et les intempéries. Les boîtes qui ont été enlevées étaient fixées au quai depuis cinquante ans, mais les plus vieilles ont 150 ans. "C'est comme un arrachage de dent ! Tout ça pour quatre heures de cérémonie !

Ce que les guerres n'ont pas réussi à faire, les JO vont y parvenir : nous faire disparaître", se désole auprès de l'AFP Michel Bouetard, secrétaire général de l'Association des bouquinistes. "Tout cela est démesuré. Si on les retire, on ne sait jamais quand elles reviendront", avertit Jérôme Callais, président de l'association. "Mais s'ils persistent à vouloir les enlever, on ira au contentieux." Beaucoup de bouquinistes – ils sont environ 230 – n'ont aucun autre revenu. "Que vont-ils faire en cas de plusieurs semaines d'inactivité ?", s'inquiète-t-il. 

Emmanuel Macron peut "nous faire rester"

Quelques élus parisiens étaient venus les soutenir. "Nous sommes contre, tout cela est décidé pour pouvoir faire de la publicité sur les quais", s'énerve Corine Faugeron, présidente du groupe Les Ecologistes au Conseil de Paris. D'autres en appellent à Emmanuel Macron. "Je l'ai rencontré quand il est passé quai des Grands Augustins mi-octobre. Il nous a dit 'Je suis au courant, je vous défends, vous faites partie de Paris'. Mais il est supérieur au préfet, il peut lui dire de nous faire rester", s'écrie Francis Robert, bouquiniste depuis 43 ans. "Pourquoi les enlever, puisque des barrières de sécurité seront posées à 1,50 mètre du quai ?" renchérit une de ses collègues.

Pendant ce temps, les agents de la mairie ont réussi à hisser les boîtes dans le camion, sans dégât apparent. "C'est un moment historique", balbutie une bouquiniste les larmes aux yeux. Un autre reste silencieux, le regard dur, rivé sur le parapet dénudé. Vers minuit et demi, les boîtes étaient remises sur le parapet et les livres replacés à l'intérieur, comme le prévoyait l'opération. La mairie de Paris a planifié samedi une conférence de bilan du test de démontage, qui aura pris trois heures. L'opération à grande échelle nécessitera de faire appel à un prestataire.

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