La Magna Carta, texte fondateur de la démocratie, fête ses 800 ans
Anthony Clarke, juge à la Cour Suprême britannique, fait partie de ceux que pensent que le document revêt une importance toute particulière de nos jours. Au moment où les gouvernements occidentaux cherchent un équilibre entre la nécessité d'assurer la sécurité des citoyens et le respect des droits individuels, de la primauté du droit et de la justice.
La "Grande Charte", signée par le roi d'Angleterre Jean Sans Terre le 15 juin 1215 sous la pression de barons rebelles soucieux de limiter l'arbitraire royal, a inspiré de nombreux textes juridiques dont la Pétition des Droits de 1628 en Angleterre, la Constitution des États-Unis de 1789 ou encore la Déclaration universelle des droits de l'homme de 1948.
Aucun homme libre ne sera arrêté sans jugement
1215 chanceux ont été tirés au sort parmi 50.000 postulants de 20 pays pour voir de leurs propres yeux, entre lundi et mercredi, les quatre copies regroupées à la British Library.
Les quatre parchemins exposés sont les seuls rescapés des copies, au nombre de 13 au moins, faites juste après l'accord scellé entre Jean Sans Terre et les barons à Runnymede, en bordure de Tamise, à l'ouest de Londres. Ils seront transférés pour une journée d'exposition jeudi au Parlement de Westminster.
Les 63 clauses de la charte, écrites en latin, ont toujours une grande résonance huit siècles après leur rédaction. "Aucun homme libre ne sera arrêté ni emprisonné, ou dépossédé de ses biens, ou déclaré hors-la-loi, ou exilé, ou exécuté de quelque manière que ce soit, et nous n'agirons pas contre lui et nous n'enverrons personne contre lui, sans un jugement légal de ses pairs et conformément à la loi du pays", édicte la plus célèbre d'entre elles, la clause 39.
Un texte qui fait toujours référence
Le texte, annulé par le pape Innocent III quelques semaines après sa signature, avait été rétabli dans une version moins radicale en 1216 par le régent du jeune Henri III.
Il est ensuite plus ou moins tombé dans l'oubli jusqu'au 17e siècle, mais ses principes sont devenus "un puissant cri de ralliement international contre l'usage arbitraire du pouvoir", estime la British Library.
Anthony Clarke relève qu'en de nombreux endroits du monde, beaucoup continuent de se réclamer des principes de la Magna Carta, pour exiger un accès universel à la justice, l'égalité devant la loi et l'encadrement juridique du pouvoir politique.
De fait, l'association Magna Carta Trust, qui gère le mémorial de Runnymede, estime que l'importance du document médiéval est grandissante "800 ans après, les plus beaux jours de la Magna Carta sont encore devant elle".
Un héritage économique
"Symbole de la liberté, de la démocratie et de la règle de droit, elle se jette contre les rives du despotisme", brandit l'association, selon qui les "principes établis dans la Magna Carta ont inspiré le printemps Arabe".
L'avocat David Wootton, ancien lord-maire de la City de Londres, pointe un autre héritage : le droit anglais est devenu la "monnaie commune" du commerce mondial précisément grâce aux protections établies par cette charte. "Les investisseurs considèrent que leur argent est en sécurité ici (à Londres) en raison des protections prévue par le système juridique," a-t-il expliqué, rappelant la "relation très étroite entre le développement économique, le développement social et la qualité du système juridique d'un pays".
Des centaines d'événements (expositions, débats, conférences, dîners, spectacles, etc) sont prévus cette année à travers toute l'Angleterre pour fêter dignement les 800 ans de la vénérable charte, dont une journée de commémorations internationales le 15 juin à Runnymede.
Commentaires
Connectez-vous à votre compte franceinfo pour participer à la conversation.