La restauration du retable d'Issenheim à Colmar révèle la peinture de Mathias Grünewald
Ils œuvrent en silence, parfaitement concentrés. Armés d’un coton tige, les restaurateurs des trois tableaux de Mathias Grünewald appliquent soigneusement des solvants "maison" pour dissoudre les couches de vernis accumulées au fil des siècles. Leur travail requiert une extrême précaution. "Il faut régler le geste, étudier le temps d'application et le temps d'enlèvement et être bien sûr d'avoir rincé comme il faut, explique la restauratrice Emmanuelle Bonaccini. Ce sont des interventions irréversibles, il faut une prudence particulière."
Redécouvrir l'œuvre de Mathias Grünewald
L'erreur n'est pas permise. Les solvants ont été testés en novembre, leur dosage validé par un conseil scientifique. Très vite, resurgissent les couleurs originelles apposées par Mathias Grünewald il y a cinq siècles. L'expertise opère comme par magie sous les yeux ébahis de la directrice du musée Unterlinden de Colmar. La restauration vient à peine de débuter et déjà le contraste est saisissant.
On voit l'avancée millimètre par millimètre, c'est extraordinaire. Ce qu'il y a de fou c'est que l'on redécouvre le tableau. La chevelure de Marie lui descendait jusqu'aux hanches, je ne l'avais pas vu. C'est génial de voir ça !
Pantxika De Paepe, directrice du musée Unterlinden de Colmar
Une redécouverte totale de l'oeuvre, des couleurs mais aussi de nombreux élèments de composition. Avec le temps, certains détails ont disparu. "La succession de vernis mis les uns sur les autres pendant des siècles fait qu'ils se sont oxydés, commente Antony Pontabry, restaurateur lui aussi. Ils sont devenus très résistants et ils cachent certaines parties."
La plus grande surprise pourrait venir du ciel de la crucifixion. Derrière le noir opaque, se cacherait un dégradé de bleus que seuls les comtemporains de Grünewald ont pu admirer.
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