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Osiris et ses mystères sauvés des eaux à l'Institut du monde arabe

Osiris, un des dieux les plus importants du panthéon égyptien, est la vedette d'une grande exposition à l'Institut du monde arabe, qui dévoile pour l'occasion des pièces magnifiques récemment remontées au jour près d'Alexandrie (du 8 septembre 2015 au 31 janvier 2016).
Article rédigé par Valérie Oddos
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 6 min
Statues d'Isis et Osiris du musée du Caire, à l'Institut du monde arabe dans le cadre de l'exposition "Osiris, mystères engloutis d'Egypte" (7 septembre 2015)
 (Annie Viannet / MAXPPP)

Osiris, maître de l'au-delà dans l'Egypte ancienne, était célébré tous les ans dans tout le pays. Et le culte d'Osiris était omniprésent dans les objets et statues qui ont été sorties de l'eau par la mission sous-marine de Franck Goddio et de son Institut européen d'archéologie sous-marine dans la baie d'Aboukir, près d'Alexandrie, sur le site de deux villes antiques englouties. C'est donc autour de cette figure qu'il a choisi, à l'Institut du monde arabe, de montrer les trouvailles fabuleuses de ses équipes.
 
"C'est le résultat de vingt ans de fouilles en Egypte en collaboration avec le ministère des Antiquités égyptiennes", explique-t-il. "C'est une mission qui travaille depuis 15 ans sur la ville de Thonis-Heracléion et depuis 18 ans sur celle de Canope. En fouillant ces villes, l'idée s'est imposée, parce que tous les jours nous découvrions des objets en lien avec les Mystères d'Osiris", le culte qui lui est dédié.
 
Ces célébrations avaient pour objectif "d'assurer la continuité dynastique, l'ordre du cosmos et la fertilité du royaume", précise-t-il.

Osiris sur sa couche funèbre, avec Isis en oiselle, exposé à l'Institut du monde arabe dans le cadre de l'exposition "Osiris, mystères engloutis d'Egypte" (7 septembre 2015)
 (Annie Viannet / MAXPPP)


Osiris, tué par son frère et ramené à la vie par Isis

Les visiteurs vont "voir des objets que seuls les prêtres voyaient", souligne Franck Goddio. Les 250 pièces sélectionnées sont présentées à côté d'une quarantaine d'œuvres des musées du Caire et d'Alexandrie.
 
Le mythe d'Osiris raconte qu'il est le fils aîné de Nout, la déesse du ciel, et de Geb, le dieu de la terre. Son frère Seth le tue, le démembre et disperse ses morceaux aux quatre coins de l'Egypte. Sa sœur et épouse Isis parvient à les rassembler et à le ramener à la vie. De leur union posthume naît Horus, divinité à tête de faucon, pharaon idéal auquel chaque souverain s'identifiera et dont la légende dit qu'il serait le premier d'entre eux.
 
Osiris a hérité de la royauté terrestre, il est une sorte de trait d'union entre les dieux et les hommes. Serge Sauneron, égyptologue français (1927-1976) cité dans l'exposition, voyait en lui le plus humain des dieux et remarquait une proximité de ce mythe avec la religion chrétienne. Du Christ avec Osiris, être bienfaisant qui subit l'épreuve de la mort, en triomphe et apporte le salut aux hommes. De Marie avec Isis, mère allaitante universelle.
Statue monumentale de Hâpy, père des dieux, trouvée dans la baie d'Aboukir par la mission archéologique sous-marine de Franck Goddio
 (Giniès / SIPA)


Hâpy, 5 mètres de granite

L'exposition s'ouvre sur une salle consacrée à ce mythe, avec deux statues célèbres d'Osiris et Isis du musée du Caire. Un calendrier égyptien est inscrit sur un naos (petite chapelle en pierre) : douze mois de trois fois dix jours auxquels on ajoutait les cinq jours restant. Au-dessus de tout, une fabuleuse statue monumentale en granite rose de plus de cinq mètres de haut qui a été remontée du fond des eaux. Elle représente Hâpy, père des dieux, qui incarne l'abondance et la crue du Nil et vient rappeler l'importance du fleuve dans la vie de l'Egypte. Cassée en plusieurs morceaux et réassemblée, elle avait déjà été restaurée pendant l'antiquité.
 
Les deux villes de Thônis-Héracléion et Canope ont été englouties en raison d'une activité sismique intense. On compte cinq tremblements de terre et raz-de-marée entre le IIIe siècle avant notre ère et 746, juste après la conquête arabe. Les deux cités auraient définitivement disparu lors de cette dernière catastrophe.
 
Les archéologues ont pu cartographier la zone et la fouiller. Un petit film projeté dans l'exposition montre des plongeurs remonter des objets oubliés depuis des centaines d'années.
Le réveil d'Osiris après le retour à la vie, sculpture exposée à l'Institut du monde arabe dans le cadre de l'exposition "Osiris, mystères engloutis d'Egypte"
 (Annie Viannet / MAXPPP)


Les Mystères d'Osiris, un culte vivace 

La mer a livré des trésors, comme une stèle de granite noir, aux inscriptions incroyablement bien conservées car elle était restée face contre terre au fond de l'eau. Cette pièce a permis aux chercheurs d'être certains que la Thônis des Egyptiens et l'Héracléion dont les Grecs parlaient dans leurs textes étaient une seule et même ville.

De nombreuses pièces, de grandes statues, de petites figures en bronze ou des amulettes attestent de la vivacité du culte d'Osiris.
 
Tous les ans pendant des siècles, dans la cité commerciale prospère de Thônis, des prêtres s'affairaient au temple d'Amon à des cérémonies complexes. Le rituel des Mystères d'Osiris s'est poursuivi sous les Grecs et les Romains.
Petite barque processionnelle votive en plomb trouvée au fond de l'eau près du temple d'Amon, à Thônis-Héracléion. Ici à l'Institut du monde arabe dans le cadre de l'exposition "Osiris, mystères engloutis d'Egypte"
 (Giniès / SIPA)


Des effigies qui germent pour symboliser la fertilité 

Les prêtres confectionnaient deux effigies d'Osiris. La première était modelée dans de la terre ensemencée d'orge et de blé. On a retrouvé la "cuve-jardin", une sorte de baignoire en granite où on la posait et où on la gorgeait d'eau du Nil jusqu'à la germination de cet Osiris "végétant", qui symbolisait la vie renouvelée. La deuxième effigie était faite de terre mêlée à des aromates et des minéraux précieux avant qu'on la fasse sécher au soleil. Ointe puis emmaillotée, elle était inhumée dans un tombeau provisoire.

Ces préparations demandaient beaucoup de soin et on a trouvé sur les lieux du temple une quantité d'instruments, louches, flacons, vases en bronze, lampes à huiles, brûle-encens qui servaient à purifier l'air autour de l'effigie.
 
Une statue d'Osiris allongé sur sa couche funèbre évoque la fécondation d'Isis, transformée en oiseau posé sur le dieu.
Le dieu-taureau Apis, à l'Institut du monde arabe, dans le cadre de l'exposition "Osiris, mystères engloutis d'Egypte", 7 septembre 2015
 (François Guillot / AFP)


La postérité du mythe d'Osiris 

Les cérémonies se concluaient par des navigations. Lors de la première, l'Osiris végétant voyageait sur un lac sacré. Le fond des canaux jouxtant le temple d'Amon était jonché de petites barques votives en plomb rappelant la forme des vraies barques en papyrus.

Un peu plus tard, Osiris parcourait 3,5 km sur un grand canal, jusqu'à Canope et son lieu de sépulture. Une barque en bois de 10 mètres datant du 4e siècle avant notre ère a été trouvée près du temple d'Amon. Elle pourrait être celle dans laquelle Osiris était transporté. On peut la voir sur une grande photo qui tapisse un mur de l'exposition.

Avec la domination grecque et romaine, les divinités égyptiennes vont évoluer. Osiris et le taureau sacré Apis vont fusionner pour donner naissance à Sérapis. C'est sur la postérité d'Osiris que l'exposition se conclut, avec par exemple un grand taureau en basalte incarnant Apis, trouvé à Alexandrie.

Osiris, Mystères engloutis d'Egypte, Institut du monde arabe, 1 rue des Fossés-Saint-Bernard, 75005 Paris
Tous les jours sauf lundi
Mardi, mercredi, jeudi : 10h-19h
Vendredi : 10h-21h30
Samedi et dimanche : 10h-20h
Tarifs : 15,50 € / 12,50 € / 10,50 €
Du 8 septembre 2015 au 31 janvier 2016
Un plongeur remonte une tête de prêtre de l'époque ptolémaïque en granite noir dans le port oriental d'Alexandrie
 (Christoph Gerigk © Franck Goddio / Hilti Foundation)

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