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Une incisive humaine de 560 000 ans découverte à Tautavel
Une dent d'un adulte qui vivait il y a 560 000 ans, a été découverte par des bénévoles à Tautavel (Pyrénées-Orientales), ce qui constitue une "découverte majeure" pouvant contribuer à éclairer l'origine de l'Homme. La trouvaille a été faite dans la grotte ou "caune" de l'Arago, à 34 km de Perpignan, considérée comme un poste d'observation idéal pour les chasseurs de la Préhistoire.
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L'incisive, dont on ne sait si elle appartenait à un homme ou une femme, date de 560 000 ans. Soit 100.000 ans environ avant le célèbre Homme de Tautavel, âgé de 450 000 ans et retrouvé sur le même site, a expliqué à l'AFP la paléoanthropologue Amélie Viallet.
Une présence humaine 100 000 ans avant l'homme de Tautavel
"C'est une découverte majeure parce qu'on a très peu de fossiles humains à cette période-là en Europe", a-t-elle souligné, hormis la mandibule de Mauer, découverte en 1907 en Allemagne et datée autour de 600 000 ans. "Cela signe et confirme la présence humaine 100 000 ans avant l'Homme de Tautavel", explique sur place Marie-Antoinette de Lumley, épouse d'Henry de Lumley, le découvreur de l'Homme de Tautavel en 1971.Aujourd'hui âgée de 80 ans, Antoinette de Lumley passe tous ses étés depuis plus de 50 ans à fouiller la "caune de l'Arago", comme on appelle la grotte de Tautavel. "C'est important pour tous ceux qui veulent comprendre à quel moment est situé le plus ancien peuplement de l'Eurasie", ajoute la paléoanthropologue au campement de base en contrebas de la grotte.
Des découvertes plus importantes à venir ?
Une incisive datée de la même période avait déjà été retrouvée en juin dernier mais cette découverte, passée inaperçue, n'enlève rien à la trouvaille de la semaine dernière, souligne Mme de Lumley, qui vient de comparer les deux dents. "Cela pourrait être les dents d'un même individu adulte", dit-elle, relançant les espoirs d'une découverte encore plus importante. "L'an dernier, on pouvait penser que la dent était un reste isolé mais là, c'est prometteur, on attend la mandibule", ajoute Christian Perrenoud, le responsable des fouilles où s'affairent une trentaine d'étudiants et passionnés.La dent a ainsi été découverte jeudi par deux jeunes bénévoles français, Camille, 16 ans, et Valentin, une vingtaine d'années, qui travaillent au pinceau sur un carré de fouilles de la caune, près du village de Tautavel, à 34 km au nord-ouest de Perpignan. Il s'agit de l'un des plus importants gisements préhistoriques du monde.
600 000 découvertes en 50 ans
La dent est le 149e reste d'hominidé parmi les 600 000 objets extraits depuis plus d'un demi-siècle dans la grotte et datés de 80 000 à 560 000 ans. "C'est une pièce du puzzle qui nous manquait, pour contribuer à répondre à la question cruciale : est-ce que l'Homme de Néandertal, à 120 000 ans, provient d'une lignée unique ?", explique Amélie Viallet, qui travaille au Centre de recherches de Tautavel.Cette dent et celle découverte l'an dernier sont "des éléments extrêmement importants car on se rapproche de l'origine de l'espèce", déclare à l'AFP Tony Chevalier, autre paléoanthropologue au Centre. Elles vont "contribuer à éclaircir un peu le débat" qui fait actuellement rage sur l'Homo Heidelbergensis, l'ancêtre de l'Homme de Néandertal, explique cet expert de l'Université de Perpignan.
Les origines de l'espèce
"L'Homo Heidelbergensis est-il simplement européen ou également africain ? C'est un débat très important", ajoute-t-il. La dent retrouvée la semaine dernière, qui date de 560.000 ans, "rappelle ce qu'on a déjà sur l'espèce et qui date de 450 000 ans". "Donc, on peut dire que cette espèce se prolonge dans le temps. Si on trouve une mandibule entière, on pourra dire s'il y a eu une évolution ou non", explique-t-il. "A Tautavel, on a une présence humaine qui va probablement jusqu'à 690 000 ans, ce qui dépasse l'origine de l'espèce", l'Homo Heidelbergensis remontant entre 600 et 650.000 ans, selon M. Chevalier."Pour être franc, je suis très curieux de savoir ce qu'ils entendent par 'découverte majeure'. Cela mérite une explication", confie pour sa part à l'AFP Matthew Skinner, paléoanthropologue à l'Université du Kent (Grande-Bretagne). "Si c'est simplement parce qu'il n'y a que très peu de fossiles humains de cette période en Europe, c'est vrai, mais je ne dirais pas que retrouver une seule dent constitue une découverte majeure, malheureusement", ajoute-t-il.
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