Venise échappe de justesse à l'inscription sur la liste du Patrimoine mondial en péril proposée par l'Unesco
L'Italie a annoncé l'interdiction aux grands navires de croisière de pénétrer dans le cœur de la ville, pour tenter de préserver son écosystème et son patrimoine
Venise a échappé in extremis jeudi 22 juillet à son inscription sur la liste du Patrimoine mondial en péril, proposée par l'Unesco, peu avant l'annonce par l'Italie de l'interdiction faite aux grands navires de croisière de pénétrer au coeur de la lagune.
Le Comité du patrimoine mondial réuni à Fuzhou, en Chine, a pris acte de cette interdiction qui entrera en vigueur le 1er août 2021. Il donne jusqu'au 1er décembre 2022 aux autorités italiennes pour rendre de nouveau compte des efforts réalisés afin de préserver l'écosystème et le patrimoine historique exceptionnels de la Sérénissime.
La fin des "mastodontes de mer" dans le centre
Le ministre italien de la Culture et du patrimoine, Dario Franceschini, s'est félicité de la décision du comité. Mais "l'attention du monde sur Venise doit rester forte", a-t-il prévenu dans un communiqué, appelant au "développement durable de ce bien unique".
Le comité de l'Unesco a justifié sa décision, entérinée malgré des réserves de la Norvège, après avoir reçu "une information de dernière minute" faisant état d'un décret pris en conseil des ministres à Rome le 13 juillet, en vertu duquel le transit des "mastodontes de mer" dans le centre historique de Venise appartient au passé.
A partir du 1er août seront interdits d'entrer dans le bassin de Saint-Marc, le canal de Saint-Marc et le canal de la Giudecca les bateaux de plus de 25.000 tonnes de jauge brute, de plus de 180 mètres de long, de 35 mètres de tirant d'air, ou dont les émissions contiennent plus de 0,1% de soufre.
Un "pas dans la bonne direction"
Ils devront s'amarrer dans le port industriel de Marghera, où des aménagements seront réalisés, tandis que les navires de croisière plus petits (environ 200 passagers) pourront continuer à accoster au cœur de la ville.
L'ONG Europa Nostra a salué un "pas dans la bonne direction" jeudi 22 juillet lors de la réunion du comité en visioconférence. "Mais les grands navires devraient complètement quitter la lagune", a regretté sa porte-parole, Sneska Quaedvlieg-Mihailovic.
L'Unesco n'a pas signé un chèque en blanc à l'Italie : Rome devra "élaborer une proposition et un ensemble de mesures correctives, avec un calendrier de mise en oeuvre" avant la 46e réunion du comité en 2023, met en garde le texte final. L'Italie devra par ailleurs présenter "un rapport actualisé sur l'état de conservation du bien avant le 1er décembre 2022".
L'érosion causée par les grosses vagues des navires ?
Les défenseurs de l'environnement et du patrimoine culturel accusent les grosses vagues engendrées par les plus grands navires, longs de plusieurs centaines de mètres et hauts de plusieurs étages, d'éroder les fondations de la Sérénissime, et de menacer le fragile écosystème de sa lagune.
Le débat avait été relancé le mois dernier, avec le retour des croisières, après des mois de pandémie qui avaient rendu aux Vénitiens calme et air pur, tout en les privant d'importants revenus.
La perspective d'un classement au nombre de sites menacés a clairement précipité le calendrier politique. L'inscription sur la liste du patrimoine en péril n'est pas "une punition", assure l'Unesco, même si elle peut être perçue "comme un déshonneur". Si rien n'est fait à terme, le site peut être retiré de la liste du patrimoine mondial, sur laquelle figure Venise depuis 1987.
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