"Face B comme bossa" : Henri Salvador revisité sur France Ô
"Sans vous, la bossa nova aurait existé sans aucun doute, mais elle n'aurait jamais été ce qu'elle est aujourd'hui". C'est en ces mots que Roberto Menescal, un des précurseurs du genre, s'adressait à un Henri Salvador ému aux larmes lors de leur rencontre dans les années 2000 à Rio de Janeiro. Voilà une phrase qui alimentera les débats incessants sur le rôle du célèbre crooner français dans l'apparition de la bossa nova il y a 60 ans.
Un influenceur à son insu
En 1958, le réalisateur italien Alessandro Blasetti présente "Europa di notte", un film qui présente un aperçu de la vie nocturne en Europe à travers des performances de plusieurs artistes. Parmi eux, Henri Salvador qui chante "Dans mon île" entouré de danseuses du Moulin Rouge. Ce film, exporté dans le monde entier, se retrouvera dans une salle de cinéma du quartier de Copacabana, à Rio, devant les yeux ébahis de Nara Leão et Roberto Menescal. Ces deux musiciens faisaient partie, avec notamment João Gilberto et Tom Jobim, de ces jeunes Brésiliens qui œuvraient à la création d'une nouvelle vague musicale qui deviendra la bossa nova."Dans mon île" deviendra, du mot même des grands artistes du genre, un inspiration fondamentale dans la conception des grands tubes comme "Chega de saudade" ou "Garota de Ipanema". Une influence que le chanteur français ignorera jusqu'à son voyage au Brésil dans les années 2000. Cette terre sur laquelle il n'avait pas mis les pieds depuis la Seconde Guerre Mondiale l'accueille avec une reconnaissance et une ferveur qui le surprent et l'émeut. Il sera d'ailleurs invité à poser ses mains sur le trottoir devant la célèbre "Toca do Vinicius", magasin de disques symbole de la bossa nova, aux côtés d'autres grands noms du genre.
"Une épopée hors du commun"
Autre facette du documentaire, la vie malheureuse d'un musicien de génie passionné de jazz et condamné à laisser ce genre musical sur la face B de ses 45 tours. Car Henri Salvador, aux côtés de son meilleur ami Boris Vian, restera toute sa vie un jazzman dans l'âme, un excellent guitariste élève de Django Reinhardt et un amoureux de Louis Armstrong. Mais le contexte musical de l'époque, associé à son humour et son rire légendaire, le pousse à se lancer dans la variété française et plus particulièrement la "chanson fantaisiste", qu'il marquera avec des tubes comme "Une chanson douce", "Zorro est arrivé" ou encore "Le Lion est mort ce soir". Cette célébrité en complet décalage avec ses vraies aspirations musicales le tortura jusqu'à la mort de sa première épouse et manager, Jacqueline Garabédian, coup de grâce qui précipitera son retrait de la scène musicale.Ce n'est qu'en 2000 que Salvador réapparait, et de surcroît grâce à un album de jazz et bossa nova qui rencontrera, contre toute attente, un succès retentissant. "Chambre avec vue", conçu grâce aux jeunes compositeurs Benjamin Biolay et Keren Ann, permettra à un Henri Salvador presque oublié de renaître. Le style et le succès de cet album considéré comme un parfait OVNI sur la scène musicale du nouveau millénaire fera remonter le chanteur sur scène en France et dans le monde. Il enchaînera jusqu'à sa mort en 2008 les voyages et les tournées, présentant cette fois son amour du jazz et de la bossa nova sur la face A.
"Face B comme bossa, l'autre histoire d'Henri Salvador" est à voir en replay sur France Ô et sera rediffusé samedi 29 décembre.
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