"Mental", saison 2 : que nous apprend la série sur le quotidien des ados en pédopsychiatrie ?
Primée pour sa saison 1 au festival de La Rochelle, "Mental", qui déstigmatise les troubles psychiatriques chez les jeunes, livre un nouvel opus tout en finesse et en sensibilité. Nous avons décrypté cette série disponible sur Francetv.slash avec les scénaristes et une psychologue clinicienne.
Alors que depuis le début de la crise sanitaire, les hospitalisations en pédopsychiatrie ont augmenté de 80%, la saison 2 de la série Mental, sur France.tv Slash, résonne avec l’actualité. Pourtant ici, pas question de parler de Covid-19 ou de dresser un sombre tableau de l’état mental des jeunes. On y suit une bande d’ados en séjour à la clinique psychiatrique des Primevères dans leur quotidien, rythmé par des rendez-vous et des activités thérapeutiques propres à leur maladie, mais surtout par des préoccupations universelles à leur âge. Et c’est toute la force de la série, dans laquelle les scénaristes Marine Maugrain-Legagneur et Victor Lockwood souhaitaient avant tout parler d’adolescence et des bouleversements qui lui sont propres. La place dans le groupe, le rapport au corps ou encore l’amour et la sexualité sont des grands thèmes de Mental, en faisant ainsi une œuvre au fort pouvoir d’identification. Avec une visée pédagogique : déstigmatiser les questions de santé mentale. “Un des objectifs de la série et de casser l’idée qu’il y a les gens normaux d’un côté et les gens fous de l’autre, explique Victor Lockwood. On voulait sortir des représentations sulfureuses des services psychiatriques et montrer une réalité plus chaleureuse”, poursuit-il.
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La saison 2 de MENTAL est dispo... En in-té-gra-li-té #MENTALS2 https://t.co/ig0MEOzc8j pic.twitter.com/4DZP2RHEps
Grâce à un travail de documentation de longue haleine et à la collaboration de deux soignantes, la psychologue et psychanalyste Amélie de Cazanove et le Dr Catherine Joubert, pédopsychiatre, Mental s’approche au plus près de la réalité des services de pédopsychiatrie. Vie en clinique, manifestations des pathologies mentales, soins... Que nous apprend la série sur la prise en charge des ados touchés par des troubles psychiatriques ? Franceinfo a passé l’œuvre en revue avec les scénaristes et Amélie de Cazanove.
(Attention, cet article dévoile des informations sur l'intrigue de la série)
Être un ado avec des troubles mentaux, ça veut dire quoi ?
Tous les ados de la clinique des Primevères présentent des troubles mentaux. Pourtant, cela ne se voit pas forcément au premier abord. Leur quotidien en ressemblerait presque, à certains moments, à une colonie de vacances. Mais que l'on s'y trompe pas : les difficultés dues à leurs pathologies les rattrapent vite. Une représentation qui tape juste. “Tous les symptômes ne sont pas évidents à déceler, en tout cas pour ceux qui ne connaissent pas la maladie”, souligne Marine Maugrain-Legagneur. Ainsi, le personnage de Marvin se plaint souvent que “ça pue”. Des paroles anodines pour la plupart des spectateurs, mais qui relèvent en fait d’hallucinations olfactives causées par la schizophrénie du jeune homme. L’ex-pensionnaire Mélodie, elle, semble juste avoir beaucoup d’énergie, mais est en fait bipolaire. “Au fur et à mesure que son enthousiasme monte en puissance, elle rentre en fait en phase maniaque”, précise la scénariste.
Ateliers d’art, sport... Comment se déroule le quotidien en clinique ?
Loin de l'ambiance noire de Vol au-dessus d'un nid de coucou, le quotidien des ados des Primevères est rythmé par de nombreuses activités et rendez-vous avec l’équipe bienveillante des soignants, composée de psychiatres, psychologues ou encore infirmiers. Art, cinéma, sport, sorties en forêt... des activités qui peuvent paraître loin du soin, mais qui sont “réellement mises en œuvre dans les structures pédopsychiatriques” et ont toujours “une visée thérapeutique”, selon Amélie de Cazanove. Ainsi, Marvin fait un travail sur lui à travers l’escalade qui lui permet, de façon métaphorique, de “se dépasser, de sortir de sa pathologie”, selon la psychologue.
La soignante a beaucoup aimé la représentation du personnel dans cette nouvelle saison : “Cet opus illustre bien leur rôle dit de “contenant”, qui consiste en de nombreuses discussions informelles, en la “réassurance” des jeunes”, explique-t-elle. Le recours à des “pères aidants”, des anciens pensionnaires d’institutions psychiatriques, comme Harmattan, est également une réalité. Bien sûr, les activités thérapeutiques ne se substituent pas aux médicaments et, parfois, à des traitements plus lourds, comme celui d’Hippolyte qui suit des séances d’électrothérapie.
Amélie de Cazanove nuance tout de même : “toutes les expériences en soins psychiatriques sont différentes, et il y a une grosse disparité de moyens selon les établissements. Tous ne peuvent pas organiser autant d’activités que dans la série”.
Elle, c’est Max.
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Lui, c’est M. Bourdon, le nouveau directeur des Primevères.
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Les ados en structures psychiatriques font-ils autant de bêtises que dans "Mental"?
Planque de bouteilles d’alcool, vol de voitures, fuite pendant les sorties thérapeutiques... Les ados de Mental ne sont pas en reste pour défier les règles. Un peu trop ? “Pour que la fiction marche, les scénaristes vont peut-être un peu loin par rapport à ce qui se passe dans le quotidien d’une clinique, mais rien n’est dans l’absolu invraisemblable”, juge Amélie de Cazanove. Les personnages ont certes des troubles psychiatriques, mais restent des ados... faisant des conneries d’ados. La psychologue considère néanmoins que dans la réalité, les soignants devraient s’apercevoir plus vite de certains actes qui mettent les jeunes en danger. Par exemple, Marvin jette pendant longtemps ses cachets dans un renfoncement de sa chambre sans que l’équipe ne le remarque.
Mental est néanmoins très juste sur la posture des psychologues, médecins et infirmiers qui, contrairement à des professeurs de lycée par exemple, ne punissent pas les pensionnaires. “Beaucoup de gens en ont été étonnés. Mais c’est vrai, les soignants en pédopsychiatrie ne sont pas dans une posture d’autorité et de moralisation, qui s’avèrent contre-productives", atteste Amélie de Cazanove.
Les ados reçoivent-ils le même genre de soins que les adultes ?
Dans cette saison, Marvin, qui ne va pas bien et se montre violent, est menacé par un transfert en service adulte. Une éventualité qui inquiète l'équipe des Primevères. Et pour cause, les soins chez les enfants et les adultes ne sont pas les mêmes. “À l’adolescence, on essaye de ne pas trop fixer la pathologie, explique Amélie de Cazanove. Par exemple, on va parler de troubles schizoïdes ou bipolaires plutôt que de schizophrénie ou de bipolarité”, poursuit la psychologue. Ces manifestations peuvent encore être transitoires à un jeune âge, d’où la nécessité de ne pas poser un diagnostic trop ferme. Une particularité de la pédopsychiatrie qui se reflète dans la série : Mental s’attache à ne pas “poser des étiquettes qui enferment” sur ses personnages, selon Marine Maugrain-Legagneur. Ainsi, le diagnostic de Marvin n’arrive que dans le dernier épisode de la saison 2. De même, dans la saison 1, le jeune homme discute souvent avec son ami Idriss... avant que l’on ne comprenne vers la fin que celui-ci est décédé, et qu’il s’agit d’hallucinations dues à son trouble schizoïde.
Avec cette nouvelle saison, les scénaristes espèrent que Mental pourra libérer certains jeunes en situation de mal-être de la honte, et leur montrer qu’un accompagnement existe. Des services d’écoute et de ressources comme le Fil santé jeune et Psycom peuvent apporter une première aide. Amélie de Cazanove espère aussi que la série sera l’occasion de faire prendre conscience au grand public de l’importance de la pédopsychiatrie, un secteur qui “manque cruellement de moyens depuis des années”, selon elle.
Mental, une série de Francetv.slash à découvrir gratuitement sur France.tv
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