"Black legends" à Bobino : une comédie musicale euphorisante sur l’histoire des Afro-Américains
Le rideau s’ouvre sur un tableau relatant l’esclavage. Un homme titube sous l’effort alors qu’une voix égrène le Code noir qui fait de lui un "bien meuble ", propriété de l’homme blanc. La comédie musicale Black legends donnée à Bobino jusqu'au 28 avril, n’élude aucune page douloureuse : esclavage, ségrégation, racisme, lutte pour les droits civiques, jusqu’aux récents assassinats par la police des citoyens afro-américains.
Sur scène, une vingtaine d’artistes donnent vie à cette fresque poignante et euphorisante. Deux heures durant, les tubes (mais pas seulement) s’enchaînent. Toujours à propos, pertinents. Soul, gospel, blues, jazz, rock, disco, hip-hop… Deux heures durant, les artistes brûlent les planches de la salle de spectacle parisienne.
On connaît la chanson
Le public est en communion avec les artistes. Il reprend avec un plaisir non dissimulé les chansons emblématiques : Strange fruit de Billie Holiday, Tutti frutti de Little Richard, A change is gonna come de Sam Cooke, Think de Aretha Franklin, Say it loud, I’m Black and I’m proud de James Brown, What’s going on de Marvin Gaye… et bien sûr Michael Jackson ou encore la diva Beyoncé.
La fresque s’étale de 1865 à l’élection de Barack Obama. La musique, comme fil rouge, dit les joies et les peines, les combats et les rêves.
Elle est aussi un clin d’œil à des moments nostalgiques comme ce moment suspendu où les artistes se sont amusés à reproduire, avec beaucoup de bonheur, le Soul Train. Un programme télé devenu mythique qui a vu défiler toute la créativité et l’exubérance de danseurs et danseuses anonymes.
La musique est aussi un combat comme ce choix assumé des créateurs de ce spectacle de mettre en avant Sylvester dans la partie Disco et non seulement des chansons commerciales. Car le disco est aussi une lutte des minorités (noire et homosexuelle) pour leurs droits avant d’être une musique légère dansante avec strass et boule à facettes.
Autre moment fort artistiquement : les danses urbaines des années 1990 et 2000 pour dénoncer le racisme systémique. Les figures s’enchaînent avec une énergie débordante. La chorégraphie, signée Thomas Bimaï, laisse éclater toute la force et la puissance de la rue. Black legends n’est pas un juke-box, un enchaînement sans âme de tubes mais un spectacle intelligent et flamboyant.
"Si toutes les chansons sont très connues, il ne s’agit pas de mettre en scène une simple succession de tubes. Au contraire, on les sort de leur cadre pop pour servir un fil narratif historique, très riche en partition émotionnelle ", précise Valery Rodriguez, metteur en scène. Epoustouflant.
Black Legends à Bobino, 14-20, rue de la Gaîté – 75014 Paris, jusqu'au 28 avril 2024
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