"Flying Bach" aux Folies Bergère : quand la breakdance virtuose rencontre les partitions de Jean-Sébastien Bach
Breakdance et Jean-Sébastien Bach ont plus en commun qu'on ne l'imagine. Le show exceptionnel "Flying Bach", présenté pour la première fois en France le 29 novembre aux Folies Bergère, le démontre avec éclat. Vartan Bassil, fondateur et directeur artistique de la compagnie Flying Steps, nous éclaire sur la genèse et l'objectif de ce spectacle qui triomphe en tournée.
Dans ses différentes expressions artistiques, le hip-hop est une culture d’une remarquable plasticité : un bon rappeur est capable de rimer sur n’importe quelle partition. Musicalement, le hip-hop peut intégrer et digérer tous les styles, notamment via les samples. La breakdance ne fait pas exception : les danseurs hip-hop, qu'on appelle des B-Boys et B-Girls, savent eux aussi s’adapter à toute forme musicale : la preuve avec Flying Bach, un spectacle qui acclimate adroitement la breakdance au clavier bien tempéré de Jean-Sébastien Bach.
Pour ce show audacieux né à Berlin en 2010, la compagnie de breakdance Flying Steps, emmenée par Vartan Bassil, s’est associée a Christoph Hagel, célèbre chef d’orchestre allemand, pianiste et metteur en scène. Déjà applaudi dans plus de 35 pays, Flying Bach fait halte en France pour la première fois, mardi 29 novembre pour une date unique aux Folies Bergère.
"Montrer au monde que la breakdance est une forme d'art"
Les danseurs de Flying Steps, une troupe d'une dizaine de virtuoses bardés de prix et plusieurs fois champions du monde de breakdance, ont commencé par écumer les compétitions internationales. "Nous étions respectés par nos pairs car nous nous efforcions toujours de proposer quelque chose de neuf et de créatif. Mais à l’extérieur, nous n’étions pas considérés comme des artistes", se souvient Vartan Bassil, co-fondateur et directeur artistique de la compagnie, joint par téléphone depuis Berlin. "Nous nous sommes alors demandé comment faire pour montrer au monde que la breakdance est une forme d’art, tout en gagnant le respect des amateurs de musique classique et de ballet académique", continue-t-il.
Enfant, sa belle-mère l’emmenait souvent à l'opéra voir des concerts et des ballets classiques, où il s’ennuyait ferme, avoue-t-il. En voyant les danseuses tourner sur les pointes, il se disait qu’un danseur de breakdance tournant sur la tête serait tout aussi approprié. C’est cette idée qui lui est alors revenue. Sa rencontre avec le chef d’orchestre Christoph Hagel, sollicité pour trouver une musique classique adéquate, a permis de concrétiser le projet.
Invité à assister aux entraînements des danseurs, ce dernier dit avoir été "impressionné" par leur "énergie et leur précision". Deux semaines plus tard, il leur proposait la musique selon lui idéale : celle des préludes et des fugues de Bach. Avec un objectif en tête : "Sortir la breakdance de la rue et amener Bach dans la rue".
Qu'ont en commun la musique de Bach et les B-Boys ?
"Quand je vous regarde en répétition, nous a dit Christoph Hagel, je constate que vous êtes souvent en conflit, ou bien vous cherchez la compétition, la confrontation, cet esprit de battle les uns contre les autres. Mais malgré tout, vous êtes en harmonie, raconte Vartan Bassil. Or, a ajouté le chef d'orchestre, c’est quelque chose que je vois aussi dans la musique de Bach et son clavier bien tempéré. Les notes se battent entre elles, mais au final elles sont en harmonie. Il y a également différentes voix dans sa musique, comme vos danseurs qui déploient différents styles, et c’est pourquoi je fais le parallèle."
Le spectacle Flying Bach est articulé en trois parties : l’ère Bach est dominée par le clavecin, le 19e siècle par un grand piano de concert tandis que le 21e siècle convoque les sons électroniques, avec des rythmes hip-hop, house et R&B. Le show met en scène six danseurs, augmentés d'une danseuse venue du ballet contemporain, recrutée pour faire le lien avec la danse académique.
Ces cracks de la breakdance - une discipline très codifiée - multiplient les prouesses et déploient chacun leur propre style, "tout en cultivant les connexions". Elaborée "en rapport étroit avec le climat et le sens des morceaux", la chorégraphie les voit en quelque sorte incarner la musique classique dans certaines séquences. Quant au "Flying" du titre, il a l'air approprié tant les danseurs semblent, sur les vidéos, voler littéralement sur scène avec une énergie folle.
Changer le regard sur la discipline
À lui-seul, ce show a déjà fait tomber bien des préjugés sur la breakdance. Mais cette discipline en constante évolution aborde actuellement un tournant vers une reconnaissance plus large, puisqu’elle deviendra discipline olympique aux prochains JO prévus en France en 2024. "Rien que cette annonce a permis de changer le regard sur la breakdance, en la faisant apparaître comme une véritable discipline athlétique, qui exige une grande rigueur physique et mentale et demande beaucoup de travail, se félicite Vartan Bassil. Mais un vrai B-Boy est aussi un artiste et doit donc également démontrer son style et sa musicalité s'il ne veut pas ressembler à un sportif faisant des acrobaties."
Aux Folies Bergère où ils sont attendus le 29 novembre, les danseurs de Flying Bach espèrent convertir encore de nouveaux adeptes. "Depuis toujours, notre but est que les parents viennent voir le show avec leurs enfants et découvrent soit la breakdance soit la musique classique", souligne le fondateur de la compagnie Flying Steps. "Quand quelqu’un vient nous voir à la fin du spectacle et nous dit 'vous m’avez ouvert les yeux, je ne regarderai plus la breakdance de la même façon ou je n’écouterai plus la musique classique comme avant', c’est le plus beau compliment qu’on puisse nous faire."
Flying Bach aux Folies Bergère
Mardi 29 novembre 2022
Places de 39,90 € à 99,30 €
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