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Le Boléro de Ravel par Béjart : un ballet au succès planétaire

Du 23 février au 24 mars 2018, l'Opéra de Paris célèbre Ravel, l’amour et la séduction avec le fameux Boléro de Béjart. Une partition obsédante, une chorégraphie hypnotique, le premier ballet unisexe sera interprété en alternance par trois solistes. Marie-Agnès Gillot, choisie par Béjart lui-même avant sa mort et deux nouveaux élus, Amandine Albisson et Mathias Heymann.
Article rédigé par franceinfo - O. Morain / V. Gaget
France Télévisions
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
Le Boléro de Béjart dans le cadre d'un programme Millepied / Béjart à l'opéra Bastille jusqu'au 24 mars 2018
 (France 2/Frédéric Bazille / Culturebox)
Le célèbre Boléro de Ravel chorégraphié par Béjart est de retour à l’Opéra Bastille dans le cadre d’un programme Benjamin Millepied/Maurice Béjart. À cette occasion, France 2 revient sur les origines de cette chorégraphie envoûtante.

Reportage : Valérie Gaget / F. Bazille / N. Berthier / L. Calvy / A. Gordon-Gentil

La danse pure et puissante

Seul sur une grande table rouge, un soliste répète inlassablement le même balancement lascif. Autour de lui, une quarantaine de danseurs l'observe puis le rejoint peu à peu.
B comme Boléro. B comme Béjart. Plus de 50 ans après sa création, ce ballet fascinant reste un tube planétaire. Aurélie Dupont, directrice de la danse de l'Opéra de Paris se dit fière que les héritiers de Béjart, décédé en 2007, l'aient autorisée à le présenter à nouveau au public français. L'ancienne étoile a elle-même dansé ce ballet et parle d'une "expérience unique qui vous transforme". 
Aurélie Dupont en 2012
 (TIMOTHY A. CLARY / AFP)

La partition de Ravel

On l'ignore souvent mais la musique du Boléro a bien été écrite pour la danse en 1928. La ballerine russe Ida Rubinstein, directrice d'une compagnie de ballet, souhaite organiser une soirée espagnole et passe commande à son ami Maurice Ravel. Il pense à cette danse à trois temps venue de l'Espagne du XVIIIe siècle, le Boléro. Homme de gauche, proche des idées de Léon Blum, le musicien imagine une métaphore des effets de la propagande. Mais le premier ballet né de sa célèbre partition aura une connotation plus sensuelle que politique: l'action se situe dans une taverne andalouse. Une tzigane danse sur une table parmi une foule d'hommes.  C'est la soeur du grand Nijinski, Bronislava Nijinska, qui signe la chorégraphie. 
 Ida Rubinstein
 (France 2 / Culturebox)

Tant que la danse sera considérée comme un rite, rite à la fois sacré et humain, elle remplira sa fonction.

Issue des Mémoires de Maurice Béjart,

La révolution Béjart

Trente ans plus tard, Béjart imagine une version contemporaine de ce ballet en revisitant l'histoire d'origine. Il place la danseuse grecque Duska Sifnios au centre d'un cercle et l'entoure de quarante hommes torses nus. La femme incarne la mélodie qui s'enroule inlassablement sur elle-même. Les hommes, "un rythme mâle qui tout en restant le même, va en augmentant de volume et d'intensité, dévorant l'espace sonore et engloutissant à la fin la mélodie". Béjart s’inspire de nombreuses sources notamment des danses traditionnelles grecques. Aux répétitions, il faisait travailler sa soliste sur le sirtaki. La première du ballet se déroule le 10 janvier 1961 au Théâtre Royal de la Monnaie de Bruxelles. Cette petite révolution marque un tournant dans l'histoire de la danse. 

Le premier ballet unisexe

En 1979, nouveau coup de génie. Béjart décide de retourner son ballet comme un gant. "Je voulais en faire un ballet réversible" explique-t-il dans une interview télévisée. Il inverse les rôles, remplace les hommes par des femmes et la soliste par un soliste: Jorge Donn. L'image du danseur fétiche de Béjart sera immortalisée en 1981 par Claude Lelouch dans le film "Les uns et les autres". 
Amandine Albisson
 (OnP)

Un rôle mythique pour soliste

Peu d’interprètes ont eu la chance de danser sur la fameuse table rouge. "Ca a un côté magique et ensorcelant qui prend tout le monde, ça monte, ça monte, on contient tout en continuant à avancer jusqu'à la fin", raconte Elisabet Ros, danseuse du Ballet Béjart Lausanne.

A l'Opéra de Paris, le ballet est entré au répertoire en 1970. La première interprète fut Claude Bessy. Le 24 février 2018, Marie-Agnès Gillot reprendra ce rôle mythique que lui avait confié Béjart en personne. "Un cadeau" dit-elle. Ce sera d'autant plus fort que la danseuse étoile prépare ses adieux le 31 mars prochain.

Elle partagera ce Boléro avec deux autres étoiles, Amandine Albisson et Mathias Heymann qui le danseront eux pour la première fois.

Le danseur Mathias Heymann en pleine répétition studio du Boléro de Béjart
 (OnP)

J’ai le sentiment qu’une force presque guerrière et animale se dégage des interprétations masculines en raison de leur résistance physique. Pour les femmes, il y a toujours une force, mais plutôt magnétique

Mathias Heymann

Un rôle exigeant

Le Boléro dure 17 minutes. Pour le soliste, c'est une performance physique. Les mouvements répétitifs en appui sur un mollet et une cuisse finissent par être douloureux. Les muscles se tétanisent. Marie-Agnès Gillot nous confie qu'il fallait parfois qu'on la porte jusqu'à sa loge après la représentation. C'est aussi un rôle difficile à mémoriser. Mathias Heymann nous révèle que le soliste dispose d'un prompteur invisible. S'y affichent des mots clés pour chacune des dix-huit phrases musicales du Boléro. "Ca permet de savoir où on en est" explique-t-il. 


Si on commence mal, on est sûr de terminer dans une grande douleur

Marie-Agnès Gillot - Danseuse étoile


Béjart pensait que le Boléro agissait comme le fameux test de Roschach en révélant la personnalité profonde de ses interprètes. 

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