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Vingt ans après, inoubliable Rudolf Noureev

Pour le 20e anniversaire de la disparition du célèbre danseur russe, Paris, Londres, Vienne, San Francisco, mais aussi Moscou, ont prévu de rendre hommage à Rudolf Noureev, mort le 6 janvier 1993.
Article rédigé par franceinfo - franceinfo Culture (avec AFP)
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Rudolf Noureev le 11 juin 1974 à Paris, sur la scène du Palais des Sports
 (Lido / Sipa)

Vingt ans après sa mort, Rudolf Noureev demeure un personnage de légende, danseur flamboyant, caractère impossible, dont les ballets virtuoses sont donnés chaque année à Londres, Vienne et surtout à l'Opéra de Paris, "sa" maison.

Directeur de la danse de l'Opéra de Paris de 1983 à 1989, Noureev a légué à l'opéra ses versions des ballets du chorégraphe Marius Petipa (1818-1910) "qui avaient été créés en Russie et qu'il a modernisés en intégrant les techniques des chorégraphes modernes", souligne auprès de l'AFP Hélène Ciolkovitch, historienne. "Il disait : tant qu'on danse mes ballets, je serai vivant", rappelle Brigitte Lefèvre, directrice de la danse à l'Opéra de Paris.

"Don Quichotte" en décembre, "La Belle au bois dormant" en 2013, "Casse-Noisette" en 2014 : pas une saison ne passe sans que le corps de ballet brille - et souffre - dans un grand spectacle revisité par Noureev. "C'est dur, les danseurs en bavent", concède Brigitte Lefèvre, évoquant ces figures dansées non pas seulement à droite, comme c'est la tradition, mais "à droite, à gauche, les petits pas étaient très rapides".

"Il a redoré le blason du danseur, qui était souvent réduit à un rôle de porteur, rééquilibré le couple danseur-ballerine", rappelle Hélène Ciolkovitch. "Si on était à ses côtés, il fallait vraiment se surpasser pour exister, parce que sinon c'était vraiment impossible d'être à sa mesure", témoigne Noëlla Pontois, qui dansa pour la première fois en duo avec Noureev en 1968, toute jeune étoile. "C'était énorme de danser avec une star comme lui", se souvient la danseuse âgée aujourd'hui de 69 ans, à laquelle une exposition est consacrée en février à Paris.

Monstre sacré qui déplaçait les foules à la manière d'une rock star, personnage au destin rocambolesque, Rudolf Noureev était né le 17 mars 1938 à bord du transsibérien dans la région du lac Baïkal. À seulement 6 ans, subjugué par un spectacle de ballet patriotique, il décide de devenir danseur. Il prend des cours de danse folklorique contre l'avis de son père, et intègre à 17 ans l'école de danse de Leningrad. Engagé au célèbre Kirov, il se taille la réputation d'un prodige rebelle.
La fuite à l'Ouest, coup de tonnerre de 1961
Lors d'une tournée du Kirov à Paris, en 1961, Noureev ulcère les autorités soviétiques par ses frasques, écumant les nuits parisiennes après les représentations. Sommé de rentrer à Moscou - alors que le ballet part pour Londres - il se jette vers deux policiers français à l'aéroport du Bourget et dépose une demande d'asile. "Rudolf Noureev, danseur principal, choisit la liberté : c'était un coup de tonnerre", se souvient Brigitte Lefèvre.

Noureev danse au Royal Opera House de Londres, où il forme un couple légendaire avec la Britannique Margot Fonteyn (1919-1991). Mais c'est l'Opéra de Paris qui deviendra sa maison, en l'accueillant dans les années 80 comme danseur puis comme directeur. "Il était d'une beauté à tomber", se souvient Brigitte Lefèvre. "Quand j'étais à l'école de danse, on nous avait emmenés voir une répétition du Kirov. D'un seul coup on voit une bombe arriver: c'était Rudolf."
Si Noëlla Pontois n'a connu de lui que "son bon côté, ses attentions, son humour", beaucoup ont eu à subir le caractère d'un homme excessif. Maurice Béjart (avec lequel les relations furent compliquées) et Roland Petit lui reprochent d'être le "fantôme de l'opéra" : il réside 6 mois par an en Autriche pour des raisons fiscales.

On lui connaît un grand amour - le danseur danois Erik Bruhn (1928-1986) - mais c'est un homme "très solitaire" que décrit Noëlla Pontois : "Il avait dû abandonner sa famille derrière lui, il était culpabilisé sûrement de tout ça, c'était lourd."

Atteint du virus du sida, Noureev lutte courageusement, cache sa maladie et le public découvre brutalement un homme chancelant lors de la première de La Bayadère le 8 octobre 1992, deux mois avant sa mort à l'âge de 54 ans. "C'est toujours difficile de s'attarder sur la scène, mais pour lui c'était vraiment une question de vie ou de mort", assure Noëlla Pontois. "Il a sacrifié tellement de choses pour ça, il a dédié sa vie à la danse."
Moscou prépare un hommage qui fait office d'événement
Pour commémorer le 20e anniversaire de la mort de Noureev, le ballet du Kremlin proposera le ballet "Cendrillon" du danseur-chorégraphe. Rudolf Noureev étant passé à l'Ouest de manière fracassante en 1961, le régime soviétique, furieux, avait occulté jusqu'au nom du "traitre". Ce spectacle constituera donc un événement. Après 26 ans d'absence, Noureev avait tenté un retour au pays qui l'avait profondément meurtri : sa mère, malade, ne l'avait pas reconnu. Quant à ses compatriotes, ils ignoraient son existence.

Des galas à Paris, une pièce de monnaie, puis des reprises de ses chorégraphies
L'Opéra de Paris, où Rudolf Noureev a connu la consécration en tant que directeur de la danse de 1983 à 1989, donne le 6 mars une soirée de gala, avec des extraits des grands ballets classiques qu'il a remontés dans ses propres versions. "La Belle au bois dormant" sera en outre dansé lors de la saison 2013/2014 de l'Opéra de Paris, avant "Casse-Noisette" en 2014/2015.

Le ballet de l'Opéra de Vienne donnera un gala dédié à Noureev du 4 au 6 juillet, dans le cadre des "Etés de la danse", au théâtre du Châtelet. En Autriche, un gala sera d'ailleurs donné le 29 juin à l'Opéra de Vienne.

Le 7 janvier, la Monnaie de Paris édite deux pièces de collection, en argent et en or, à l'effigie du danseur, dessinées par Christian Lacroix. Côté face, le styliste a représenté le danseur devant le palais Garnier de l'Opéra de Paris. Au revers, son visage se découpe sur un motif de kilim, rappelant le somptueux tapis qui recouvrait sa tombe lors de ses funérailles dans le carré russe de Sainte-Geneviève-des-Bois.
Un ballet et des expos à Londres et San Francisco
A Londres, où Rudolf Noureev a dansé de nombreuses années et formé un duo célèbre avec Margot Fonteyn, le Royal Ballet donne en janvier "Raymonda" et en février "Marguerite et Armand". Une exposition Noureev est organisée dans le foyer du théâtre.

Le De Young Museum de San Francisco expose jusqu'en février les somptueux costumes de scène de Noureev, en collaboration avec le Centre national du costume de scène français (CNCS) de Moulins, où doit ouvrir un "lieu de mémoire" Noureev en septembre.

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