La Philharmonie de Berlin renoue avec le public et "ça change tout !"
Comme ailleurs en Allemagne, la situation sanitaire est inquiétante dans la capitale, avec un taux d'incidence s'élevant ce 21 mars à 94,1, plus très loin de la barre symbolique des 100 susceptibles de déclencher automatiquement de nouvelles restrictions.
Les 1.000 billets mis en vente se sont arrachés en trois minutes : après des mois de musique sans spectateurs pour cause de Covid, la Philharmonie de Berlin a renoué samedi soir, le temps d'un concert, avec un public préalablement testé, et "ça change tout !".
Au terme de l'heure et demie de concert, l'émotion était palpable, sur scène comme dans la salle. Le chef russe Kirill Petrenko et l'orchestre de la Philharmonie ont eu droit à une longue ovation debout, après des mois de sevrage imposé par la pandémie. Ils venaient d'interpréter Roméo et Juliette de Piotr Tchaïkovski et la Deuxième symphonie de Sergueï Rachmaninov.
"J'avais vu des concerts donnés en vidéo mais ça n'a rien à voir"
"Assister à un tel concert en vrai, ça change tout !", s'est enthousiasmé Peter, un trentenaire venu en couple. "J'avais vu des concerts donnés en vidéo mais ça n'a rien à voir, même si comme moi on est fou de musique".
"On a joué sans public pendant des mois, c'est mieux que rien mais avec des spectateurs, ça n'a rien à voir, c'est comme la différence entre la 2D et la 3D", a confirmé le violoniste Aleksandar Ivic, ravi d'observer sa Philharmonie "avec de la lumière, des gens biens habillés qui attendent devant...". "Cela montre que le résultat d'un concert, c'est nous plus le public, qui nous transporte dans un état qu'on ne peut atteindre en jouant seul", a-t-il témoigné auprès de l'AFP.
Médecins en combinaison
Comme ailleurs en Allemagne, la situation sanitaire est inquiétante dans la capitale, avec un taux d'incidence s'élevant ce 21 mars à 94,1, plus très loin de la barre symbolique des 100 susceptibles de déclencher automatiquement de nouvelles restrictions.
Mais pour donner des "perspectives", selon la directrice artistique Andrea Zietschman, au public et à des musiciens déprimés par une année de représentation à distance, la salle berlinoise s'est lancée dans ce "projet-test". Le succès a été au rendez-vous : les 1.000 billets mis en vente se sont arrachés en trois minutes.
Juste avant le concert, Mme Zietschman est montée sur scène pour exprimer "son émotion et celle des musiciens" de renouer avec de vrais concerts, qui donnent "énergie et inspiration" aux interprètes, même si la situation sanitaire reste "fragile".
Pour éviter tout risque de contamination, les règles étaient particulièrement strictes : l'achat d'un billet nominatif donnait accès à un test gratuit passé le jour-même dans un des cinq centres partenaires ou même à la Philharmonie, deux heures avant le concert, par des médecins en combinaison de protection. Et pas de représentation si on était testé positif, le billet étant alors remboursé. Mais, d'après la Philharmonie, ce cas de figure ne s'est pas produit.
Pendant le concert, le port d'un masque chirurgical était obligatoire et un siège sur deux était inoccupé. Sans entracte, buvette ni vestiaire, les déplacements du public étaient réduits au minimum.
Les lieux ont été régulièrement désinfectés et l'air renouvelé en permanence par un système de climatisation. Entre chaque musicien, un espace d'un mètre, porté à un mètre et demi entre ceux qui jouaient d'un instrument à vent.
L'Allemagne a relégué la culture à un"rang subalterne"
Ce concert-test s'inscrit dans le cadre d'un programme plus vaste mis en place par la ville de Berlin et impliquant d'ici au 4 avril 2021 une dizaine de salles, dont des théâtres, de la capitale, quasiment à l'arrêt depuis un an et sans réelle perspective de réouverture.
Le Berliner Ensemble, un théâtre fondé par Berthold Brecht, a ainsi proposé une première pièce en public le 19 mars devant plusieurs centaines de spectateurs eux aussi testés. "Ce qui est important, c'est que la culture se remette sur les rails. En Espagne, en Pologne, au Luxembourg, il y a du théâtre, de l'opéra", a fait valoir le directeur du Berliner Ensemble, Oliver Reese, devant l'Association de la presse étrangère.
"Nous sommes au milieu du mois de mars et nous n'avons aucune idée de ce qui se passera le 4 avril ou en mai. Nous ne pouvons pas supporter cela", a-t-il asséné, déplorant que l'Allemagne ait depuis le début de la crise sanitaire relégué la culture à un "rang subalterne".
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