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Avignon : Le "Riquet" foisonnant mais parfois brouillon de Laurent Brethome

Avignon, c’est pas que pour les grands ! La preuve, cette année le In a ouvert le 5 juillet avec "Riquet", une pièce pour le jeune public signée Laurent Brethome et jouée à la Chapelle des Pénitents Blancs. Une création inspirée par le récit populaire de Perrault qui résonne dans notre époque centrée sur l'apparence. Un sujet abordé avec humour, poésie mais parfois de façon un peu brouillonne.
Article rédigé par Chrystel Chabert
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
Un Riquet à la fois simple et poétique, porté par de nombreux effets visuels
 (Christophe Raynaud de Lage / Festival d'Avignon)

Dans ce Riquet là, pas de houppe, pas de baguette magique non plus (remplacée par des poireaux), pas de belles robes pour les princesses, coiffées de sac en papier et baptisées de drôles de noms comme Mimi Pédia (vous voyez le clin d’oeil ?).

Dès le départ, Laurent Brethome tord le cou aux images traditionnelles qu’on associe au conte de Perrault, aidé en cela par Antoine Herniotte qui propose une relecture de ce texte populaire. Même l’incontournable « Il était une fois » est très vite interrompu ! Malgré tout, il y a bien devant nous un Riquet, prince laid mais spirituel qui va se réfugier dans un bois pour cacher ses traits et ne plus subir moqueries et quolibets.

Il y est rejoint un beau jour par une princesse aux traits exquis mais idiote. La forêt est sombre et les amoureux ne se voient pas. Ils s’écoutent, se touchent, se parlent et dansent. Chacun peut enfin vivre sans le regard des autres et leur jugement qui stigmatise, figeant chacun derrière une étiquette qui colle à la peau. Une liberté qui leur permet de s’inventer, de se révéler autrement.
  (Christophe Raynaud de Lage / Festival d'Avignon)
Réactualisé, le conte de Perrault est aussi rhabillé visuellement. Le parti pris de Laurent Brethome est très marqué. De bout en bout, le metteur en scène a imaginé avec le scénographe Rudy Sabounghi des effets spéciaux.

Mais ici pas de vidéos ou de 3D. On est dans l’artisanat. Du papier, du carton, des marionnettes articulées, des projections d’ombre, et surtout la présence sur scène du peintre Louis Lavedan qui peint en direct devant nous ; sa gestuelle a quelque chose d’hypnotique. 
  (Christophe Raynaud de Lage / Festival d'Avignon)
Cette recherche visuelle apporte une réelle poésie au spectacle et permet de créer un univers tour à tour magique et angoissant. Mais à trop vouloir illustrer, ils en deviennent trop systématiques, posés sans vraie justification et cela donne parfois au spectacle un côté brouillon. On pense notamment à la séquence où Riquet chante ses tourments en version rap. Etait-elle bien nécessaire, du moins sous cette forme ? Mais cela peut aussi toucher davantage le jeune public à qui s’adresse en premier lieu cette création.

"Riquet" souffre aussi d’une première partie parfois un peu poussive, avec quelques longueurs. mais le metteur en scène nous rattrape quand il opte pour l’humour, quand ses personnages assument leur vrai visage et leur caractère, à l’image de la princesse Mimi Pédia qui plutôt que d’attendre un époux part faire le tour du monde.  

Un plaidoyer pour la liberté et les différences


Impossible de ne pas penser à ces faits divers parfois dramatiques dans lesquels des adolescents se trouvent stigmatiser dans les cours d’école ou sur les réseaux sociaux pour leurs  différences, aussi minimes soient-elles (quand elles ne sont pas inexistantes). Un problème que Laurent Brethome connaît bien.
  (Quentin Ferjou)
Le metteur en scène a souffert pendant son enfance de ce qu’on appelle aujourd’hui des TIC  (trouble involontaire compulsif). Il a 8 ans, quand, sur les conseils très avisés d’un médecin, il découvre que l’énergie qu’il porte en lui peut être canalisée dans la création via le théâtre et le personnage de Riquet à la Houppe. Ses tics disparaitront mais pas le goût des planches qui le fera passer par la Comédie de Saint-Etienne. Vingt-sept ans plus tard et dans sa 35e année, Laurent Brethome rend enfin hommage à ce Riquet qui lui a donné des ailes. 

Avignon et le jeune public 

Trois programmes différents destinés au jeune public sont programmés dans le In du Festival d'Avignon du 4 au 25  juillet : "Riquet" mais aussi "Notallwhowanderarelost" ( qui peut se traduire en français  par "Tous ceux qui errent ne sont pas perdus") du 12 au 15 juillet par le Flamand Benjamin Verdonck, un artiste inspiré par le sculpteur Calder, qui déploie un "théâtre  d'objets" ; puis du 19 au 23 juillet "Dark circus", un drôle de cirque et un spectacle imaginé par la compagnie Stéréopik, avec Jean-Baptiste Maillet et  Romain Bermont, dessinateurs, projectionnistes et accessoiristes, qui fabriquent en  direct un film d'animation avec des moyens traditionnels.

Trois spectacles jeune public dans le In (tous joués à la Chapelle des Pénitents Blancs à 11h et 15h)... et plus de 100 dans le Off. De quoi occuper les petits monstres !
  (DR)
"Riquet" 
adaptation libre de Riquet à la houppe de Charles Perrault
texte Antoine Herniotte
mise en scène Laurent Brethome
à la chapelle des Pénitents Blancs à Avignon 
les 7 et 8 juillet 
à 11H et 18H
durée : 1h
dès 8 ans 


"Riquet" sera en tournée en France à partir de novembre 2015 et jusqu’en mars 2016 

 




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