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"En attendant Godot" : Alain Françon nous offre une version tendre et humaine de la pièce de Beckett

Parfaitement fidèle à Beckett et sans intellectualiser, Alain Françon nous offre une version bouleversante d’humanité de "En Attendant Godot" de Beckett. C’est à la Scala Paris, jusqu’au 8 avril.
Article rédigé par Sophie Jouve
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2min
"En attendant Godot" d Samuel Beckett, mise en scène d'Alain Françon (Léa Wetterhold)

Il y a bien sûr l’arbre mort et le rocher imposés par Beckett. Alain Françon et son décorateur Jacques Gabel y ont ajouté en fond de scène une magnifique toile, couleur cendre, où ciel et terre se confondent. Apparaissent Vladimir et Estragon, incarnés par Gilles Privat et André Marcon, les deux hommes dépenaillés portent des chapeaux melon élimés, ils attendent un dénommé Godot. 

André Marcon et Gilles Privat dans "En attendant Godot" (Léa Wetterhold)


Deux hommes, deux clochards, misérables et hors du temps, mais ici, dans cette version d’Alain Françon, cocasses et attachants. Pour tromper l’attente, l’ennui et la faim, ils se houspillent, échangent des propos tantôt terre à terre, tantôt essentiels sur la vie et sur le temps qui passe.

L’art d’Alain Françon dans cette partition si cadrée par l’auteur est de nous donner à voir et à entendre ce texte au travers du corps et du jeu aux mille nuances des comédiens. André Marcon est un Estragon terrien, dépendant et inquiet. Gilles Privat, sous ses airs de grand échassier sur le point de prendre son envol, sait, à sa façon, se montrer rassurant en soutenant son compagnon qui sinon se laisserait peut-être mourir.

Quel est notre rôle là-dedans (demande Estragon)
Celui des suppléants
A ce point-là ?

 


Alors qu’ils attendent la nuit, surgit Pozzo, le propriétaire terrien tenant en laisse son esclave Lucky, croulant sous les bagages : Guillaume Levêque et Eric Berger (qui fut Tanguy dans le film d'Etienne Chatiliez) forment un duo burlesque et cruel. D’abord choqués Vladimir et Estragon finissent par s’habituer à cette relation de soumission et aux mauvais traitements qui en découlent.

"En attendant Godot" (THOMAS O'BRIEN)

Le génie de Beckett est bien sûr l’épure de ces bribes de vie pour dire toute la fragilité, l’absurdité et le mystère de notre condition humaine. Alain Françon y ajoute une humanité et une tendresse bouleversante. Estragon et Vladimir sont liés par un lien indéfectible. Parce que ces deux-là peuvent compter l’un sur l’autre, rien n’est perdu. Dans cette version, ils ont raison d’espérer.

"En attendant Godot" de Samuel Beckett
Mise en scène d'Alain Françon
La Scala Paris
13 Bd de Strasbourg, 75010 Paris 
01 40 03 44 30    

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