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Festival Off d’Avignon : dans "Désaxé", un djihadiste repenti raconte sa propre histoire

Hakim Djaziri a écrit et interprète sa première pièce "Désaxé" pour exorciser son adhésion au djihad dans sa jeunesse.

Article rédigé par Jacky Bornet
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié
Temps de lecture : 4min
Hakim Djaziri, Florian Chauvet et Leïla Guérémy dans "Désaxé" de Hakim Djaziri, mis en scène par Quentin Defalt. (François Vila)

Issu de la deuxième génération d’immigrés algériens à Aulnay-Sous-Bois (Seine-Saint-Denis), Hakim Djaziri raconte dans Désaxé son arrivée en France et comment il a versé adolescent dans les trafics illicites, avant d’adhérer aux thèses du terrorisme islamiste. Mise en scène par Quentin Defalt (Les Vibrants), la pièce est jouée dans le Festival Off d’Avignon, au Théâtre du Train Bleu, du 5 au 24 juillet à 15h15.

Ferré par le théâtre

A Fleury-Mérogis, un homme se souvient des événements qui l’on conduit en prison. Tout commence avec l’anniversaire de ses 4 ans à Alger, le portrait idyllique que lui fait son oncle de la France, l’amour de ses parents, sa mère prof de français et son père haut fonctionnaire. Puis c’est leur fuite en région parisienne quand l’intégrisme islamique menace l’Algérie. Leur fils arrive plus tard, puis subit l’accueil froid sinon hostile des habitants. C'est le refuge dans la délinquance, la violence, puis l’adhésion à l’Islam radical, jusqu’à la préparation d’un attentat qui conduiront le jeune homme en prison. Nous sommes dans les années GIA (1990), quand le gouvernement algérien négocie de manière trouble avec ses membres (assassinat des moines de Tibhirine ,1996).

La rencontre de Hakim Djaziri avec les planches vaut le coup d’être racontée. Adolescent délinquant d’Aulnay-Sous-Bois, il passe un soir devant un club de théâtre et s’arrête, fasciné par des jeunes qu’il voit à travers la vitre répéter une pièce. Charrié par ses potes, il rejoint l’association sans savoir ce qui l’attend et se découvre une passion immédiate pour la scène. Encouragé par sa professeure, elle lui offre le premier rôle pour la pièce de fin d’année. Il est ferré par le théâtre et se lance dans l’écriture de Désaxé où il raconte sa propre histoire. Rencontrant Quentin Defalt, metteur en scène toujours en quête de sujets sur les cabossés de la vie cherchant leur voie, le courant passe et Désaxés se monte. Direction : Avignon 2019.

Trois acteurs en quête de vingt personnages

Hakim Djaziri interprète son avatar sur scène où il est rejoint par Florian Chauvet et Leïla Guérémy. Tous endossent une vingtaine de rôles, passant de l’oncle algérien, aux parents, aux copains de classes, aux membres du gang, à l’animateur du quartier, à l’imam recruteur, aux flics… Le texte est clair, bien construit, écrit dans l’optique didactique d’expliquer un processus aliénant. Comment peut germer l’intégrisme chez un garçon, fils de parents cultivés, qui ont justement quitté l’Algérie parce que germaient dans le pays de telles thèses ?

Florian Chauvet dans "Désaxé", pièce de Hakim Djaziri, mise en scène par Quentin Defalt.   (François Vila)

La régression sociale des parents une fois arrivés en France, les frictions de l’enfant "pas pareil" avec les autres élèves, fomentent un terreau qui accouchera d’une mauvaise graine récupérée par l’imam intégriste. Hakim Djaziri avoue avoir pimenté d’un peu de fiction la dernière partie de sa pièce pour dramatiser le propos. Ce qui ne la parasite pas pour autant. Quentin Defalt tire le meilleur de ses jeunes acteurs en dirigeant leur diction sans faille et leur transformisme bluffant. Leur dextérité à passer d’un rôle à l’autre avec une telle fluidité est remarquable. L’espace dépouillé et lumineux valorise le texte, la chorégraphie et le sens. Une percutante et éloquente réussite.

Desaxé
De Hakim Djaziri
Mise en scène : Quentin Defalt
Avec Hakim Djaziri, Florian Chauvet et Leïla Guérémy
Théâtre du Train Bleu
Du 5 au 24 juillet
Relâche les 11, 18 juillet
Du 9 au 14 juillet surtitré en anglais.
TARIFS
Abonné : 13,5 €
Plein tarif : 19,50 €

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