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Isabelle Huppert ouvre le Festival d’Avignon dans une "Cerisaie" qui manque de sève

Isabelle Huppert a ouvert, lundi 5 juillet, la 75e édition du  Festival d’Avignon dans "La Cerisaie" d’Anton Tchekhov, sous la direction du metteur en scène portugais Tiago Rodrigues. 

Article rédigé par Sophie Jouve
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 5min
"La Cerisaie" de Anton Tchekhov, avec Isabelle Huppert au centre (CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE)

C’est une de ces journées avignonnaise un peu folles qui a vu Tiago Rodrigues nommé à la tête du premier festival de théâtre du monde le matin, par Roselyne Bachelot, et qui le soir même ouvrait le festival dans la Cour d’honneur du Palais des papes, devant 2 000 spectateurs vaccinés ou munis d’un test PCR et affamés de théâtre. Avec, en tête d’affiche, Isabelle Huppert, à l’initiative du projet.

Des applaudissements nourris du public ont répondu aux trompettes de Maurice Jarre annonçant le début du spectacle. Un public réjoui de se retrouver au coude à coude, face à la scène mythique du Palais des Papes et ses hauts murs qu’il faut savoir apprivoiser. Deux heures et demie plus tard, les applaudissements étaient moins enthousiastes.

"La Cerisaie", ouverture de la 75e édition du Festival d'Avignon (CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE)

Le monde d'avant et le monde d'après

Il faut dire que l’on attendait beaucoup de cette Cerisaie, l'histoire d'un basculement entre le monde d’avant et le monde d’après qui pourrait annoncer la révolution russe, et l’espoir pour chacun d’une ascension sociale. La dernière pièce de Tchekhov qui se savait condamné par la tuberculose, dirigée par un metteur en scène de premier plan (Antoine et Cléopâtre et Sopro ont été joués en Avignon), dans la traduction d'André Markowicz et Françoise Morvan.

Sur la scène des lustres à pampilles pendent à des silhouettes de métal, les anciens sièges de la cour occupent l’immense scène. Isabelle Huppert est Lioubov, une aristocrate désargentée qui revient, après 5 ans d’absence et la mort de son fils, dans La Cerisaie, son domaine qui va être vendu aux enchères.

Adama Diop et Isabelle Huppert dans "La Cerisaie" (CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE)

Un spectacle qui se dilue et s'étire 

Accompagnée par deux musiciens (une musique omniprésente), toute la petite communauté accompagne son retour par un chant de bienvenue nostalgique et chaleureux. Un des rares moment d’émotion d’un spectacle qui très vite se dilue et s’étire par des choix de mise en scène qui font écran autant à l’empathie qu’à l’acidité que dégage le texte, parfois écrasé sous les riffs de guitare électrique. Mise en scène, qui, au final, n’apporte pas de vrai éclairage à la pièce.

"La Cerisaie", mis en scène de Tiago Rodrigues (CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE)

Isabelle Huppert, Adama Diop...


On est déçu, d’abord pour Isabelle Huppert, merveilleuse actrice qui sait donner à son personnage de cheffe de clan, de femme fantasque, l’ambivalence et la mélancolie de celle qui ne veut pas choisir et laisse les choses se faire avec fatalité. Autour d’elle, de la galerie de portraits si bien dessinés par Tchekhov, certains tirent leurs épingles du jeu. Adama Diop est un remarquable Lopakine. Alors qu'il est souvent réduit à un cynique, Rodrigues donne une vraie épaisseur à ce fils de serf devenu riche marchand qui voudrait transformer le domaine et qui finira brutalement par l’acheter.

Remarquée aussi, Suzanne Aubert (Iphigénie dans la version de Stéphane Braunschweig) en femme de chambre, ou encore Tom Adjibi (La Reprise-Histoire du théâtre de Milo Rau) qui incarne avec un humour décalé le comptable du domaine.

Adama Diop dans "La Cerisaie" (CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE)

Les autres, un peu perdus dans une forme de chorégraphie que leur impose le metteur en scène et qui finit par paraître vaine, peinent encore à exister. En particulier, l’excellent Alex Descas dans le rôle du frère d’Isabelle Huppert, ici assez inexistant.

Isabelle Huppert et Marcel Bozonnet dans "La Cerisaie" (CHRISTOPHE RAYNAUD DE LAGE)

Et puis il y a le désarmant Marcel Bozonnet en Firs, le fidèle serviteur de la famille, à qui reviennent les derniers mots de cette pièce crépusculaire qui résonnent dans la nuit d’Avignon comme un regret : "La vie, elle a passé, on a comme pas vécu."  
       

"La Cerisaie" d'Anton Tchekhov, mise en scène de Tiago Rodrigues
11 représentations dans la cour d'honneur du Palais des Papes
5, 6, 8, 9, 10 11, 12, 14, 15, 16, 17 juillet à 22h
Durée : 2h30
Festival d'Avignon

"La Cerisaie" sera diffusée en direct sur France 5 le 9 juillet à 22h15 (précédé du nouveau spectacle d'Elodie Menant "Je ne cours pas je vol" dans le Off d'Avignon)

En tournée : 
7 janvier au 20 févier 2022 Théâtre de l'Odéon-Théâtre de l'Europe
3 au 5 juin 2022 Comédie de Clermont-Ferrand
3 au 14 septembre 2022 Théâtre National Populaire de Villeurbanne
23 au 25 septembre 2022 La Coursive de la Rochelle

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