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"Jacques et son Maître" : Nicolas Briançon donne tout son éclat à la pièce de Kundera d’après Diderot

Au Théâtre Montparnasse, le comédien et metteur en scène Nicolas Briançon remonte avec gourmandise sa pièce fétiche "Jacques et son maître", signée Milan Kundera.

Article rédigé par Sophie Jouve
France Télévisions - Rédaction Culture
Publié Mis à jour
Temps de lecture : 2 min
"Jacques et son Maître" de Kundera au Théâtre Montparnasse (FABIENNE RAPPENEAU)

Un formidable souffle de vie balaie la scène du théâtre Montparnasse en cette rentrée : Nicolas Briançon remonte pour la quatrième fois Jacques et son maître de l'écrivain franco-tchèque Milan Kundera. Sur le plateau, quelques-uns de ses compagnons historiques (Lisa Martino et Pierre-Alain Leleu) et un petit nouveau, Stéphane Hillel, qui lui donne la réplique.

Dans ce texte, Kundera rend hommage à un de ses grands maîtres, Diderot, et au roman de celui-ci, Jacques le fataliste. L’occasion pour cet obsédé de la liberté de nous rappeler sa propre vision de l’homme. Une liberté qu’il savait condamnée lorsqu’il écrivait cette pièce juste après l’invasion des chars soviétiques en 1968 et dont il avait besoin alors de retrouver le goût profond.

"Jacques et son Maître" de Kundera, mise en scène de Nicolas Briançon (FABIENNE RAPPENEAU)

La scène ouvre à plein sur les coulisses et les cintres, un dispositif en bois symbolise une taverne ou un atelier, surplombé par une chambre-grenier où vont se dérouler quelques scènes d’une sensualité débridée.

Liberté et sensualité 

La pièce repose sur l’attelage truculent du valet, débonnaire et irrésistible (Briançon lui-même) et de son maître, aussi naïf que narcissique (Stéphane Hillel), qui exige par exemple que son serviteur lui raconte par le menu son dépucelage tout en l’interrompant sans cesse par des digressions érotiques. On imagine combien la liberté jouissive de Kundera a pu choquer, à l’époque, le pouvoir communiste pudibond.

"Jacques et son Maître" de Milan Kundera (FABIENNE RAPPENEAU)

Bousculant, comme son mentor Diderot, la construction du récit et le rapport au temps, Kundera entrecroise trois histoires d’amour et mille péripéties autour du voyage de ses deux personnages, dans une alternance de scènes intimistes ou collectives. Avec les amours de Madame de la Pommeraye (Lisa Martino), passage célèbre du texte de Diderot, Kundera orchestre, de digression en digression, une bouffonnerie slave ultime sur fond de musique populaire.
"Jacques et son Maitre" de Milan Kundera (FABIENNE RAPPENEAU)

"Je me suis toujours dit que c’était une pièce que je monterai tous les dix ans car elle résonne différemment à chaque âge", a lancé il y a déjà quelques annnées Nicolas Briançon. Il incarne avec faconde et un immense plaisir ce valet rusé et généreux, fidèle et goguenard, et au final plus intelligent et avisé que son maître. Le duo complice qu’il forme avec un Hillel un peu en retrait mais plein d’esprit et de nostalgie emporte l’adhésion. 


"Jacques et son Maître" de Milan Kundera
Avec Stéphane Hillel, Nicolas Briançon, Lisa Martino, Pierre-Alain Leleu, Camille Favre-Bulle, Maxime Lombard, Philippe Beautier, Elena Terenteva et Jana Bittnerova, Théâtre Montparnasse
31 Rue de la Gaité, 75014 Paris
01 43 22 77 74

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