"Jeanne et Marguerite", mémoires d'amour et de femmes au Buffon Théâtre
D'un côté, il y a Marguerite surnommée "Guita". Elle a 16 ans, elle ne va plus à l'école, car en 1907 "les filles n'ont pas besoin d'apprendre". Son chemin va croiser un jour, celui d'Eugène. Le grand amour de sa vie. De l'autre, Jeanne. Une femme d'aujourd'hui qui surfe sur internet à l'affût d'échanges et de rencontres. Un jour, le 17 septembre 2000, cette rencontre arrive, emportant la raison et le coeur de cette jeune femme de 34 ans. Sur scène, Françoise Cadol incarne donc tour à tour les deux femmes. Elle feuillette le grand livre de leur vie et de leurs amours. Une page se tourne, elle change de personnage et d'époque. Pour l'y aider, le metteur en scène Christophe Luthringer (qui met aussi en scène à Avignon Christophe Alévêque dans "Little Boy") a su créer une palette d'ambiances qui s'appuient sur la lumière (Thierry Alexandre) et les sons (Franck Gervais). Un univers tour à tour délicat, poétique, sombre, voire angoissant, qui suit les émotions des deux femmes...et les nôtres.
Une centaine d'années séparent Jeanne et Marguerite qui vivent chacune leur amour différement, avec les codes de leur époque. Elles partagent pourtant cet état qui semble typiquement féminin : l'attente...Et puis, un lien secret les unit. Ce qu'il faut savoir c'est que ce texte s'appuie sur une histoire vraie, avec comme point de départ, les 700 lettres échangées entre Marguerite et Eugène.
Ces lettres, c'est Valérie Péronnet, l'auteure du texte, qui en a héritées un jour. Marguerite n'est autre que son arrière-grand-mère. Et Jeanne, c'est Valérie. Journaliste et nègre pour des anonymes, elle a fait une sorte de grand écart temporel pour relier son histoire à celle de sa lointaine aïeule. Ce voyage dans le temps et la mémoire, Françoise Cadol l''incarne avec infiniment de justesse et de grâce, passant en quelques minutes de la candeur lumineuse de Marguerite à la fougue amoureuse de Jeanne. "Jeanne et Marguerite" nous donne l'occasion de découvrir la très belle plume de Valérie Péronnet. Son écriture est simple, émouvante, " soulageante" parce qu'elle sait mettre des mots sur ces tourments et ces émotions qui nous traversent sans qu'on arrive à les décrire.
"Un cadeau incroyable"
Sa rencontre avec Françoise Cadol a été déterminante car c'est la comédienne qui lui a demandé d'écrire pour elle. Valérie Péronnet a pu puiser dans ce paquet de lettres transmis par sa mère et qu'elle portait presque comme un fardeau. "Ces lettres m'ont hantées pendant longtemps et je ne savais pas quoi en faire. Depuis qu'elles sont lues et jouées, c'est comme si elles avaient été désamorcées. Les faire vivre a changé beaucoup de chose dans ma vie". Un conseil si vous allez voir "Jeanne et Marguerite" : prenez un mouchoir. Oui oui, y compris vous messieurs ! Car si cette pièce écrite et jouée par des femmes autour des chagrins de deux autres, elle touche à des sentiments universels qui résonnent y compris dans les palpitants masculins les plus endurcis. Et souvenez-vous : l'amour peut nous rendre dépendants mais c'est aussi le besoin d'aimer et d'être aimer qui rend libre parce qu'il nous pousse à vivre et à aller de l'avant. Si vous n'en êtes pas convaincu, allez rencontrer Jeanne et Marguerite...
"Jeanne et Marguerite" de Valérie Péronnet, avec Françoise Cadol, mis en scène Christophe Luthringer au Buffon Théâtre, 18 rue Buffon à Avignon, jusqu'au 27 juillet à 14H50 - Durée 1h05 - Réservations : 04 90 27 36 89
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